JLE

e-VEGF-IMMUNO-actu

MENU

L'hormonothérapie : un traitement de choix pour les cancers du sein hormono-dépendants métastatiques Volume 11, issue 3, Juillet 2016

L’hormonothérapie reste un traitement de choix pour les cancers du sein hormono-dépendants métastatiques et ce avec un index thérapeutique favorable. Les mécanismes d’acquisition d’une hormono-résistance, parmi lesquels un haut niveau d’expression du VEGF, sont en cours d’exploration.

Cette étude américaine de phase III randomisée 1:1 multicentrique du CALGB (Cancer And Leukemia Group B) connue également sous le nom d’Alliance, a pour objectif d’évaluer l’association létrozole +/- bévacizumab ou placebo chez les femmes ménopausées présentant une tumeur du sein RH positifs et métastatique.

Initiée en double aveugle en mai 2008 puis amendée en mai 2010, cette étude en est au tiers de ses inclusions (136/350 femmes) et se poursuit en mode « ouvert » et sans groupe placebo.

Les principaux critères d’inclusion sont : une maladie localement avancée inopérable ou une situation métastatique, présence sur la tumeur de RE +/- RP ≥ 1 %, statut HER2 négatif ou positif, statut de ménopause définitif ou transitoire et enfin maladie mesurable ou non selon les critères RECIST 1.0. Une chimiothérapie néo ou adjuvante terminée depuis plus de 12 mois est autorisée ainsi qu’une hormonothérapie adjuvante quelle qu’en soit la durée. Les patientes ne doivent pas avoir reçu de traitement à visée anti-angiogénique.

A l’issue de l’amendement, l’inclusion de patientes ayant reçu une ligne de chimiothérapie en situation métastatique a été autorisée.

L’objectif principal est la survie sans progression déterminée par l’investigateur. La médiane de survie sans progression attendue était de 6 mois pour le létrozole et de 9 mois pour l’association létrozole et bévacizumab, soit un gain attendu de 3 mois avec un nombre requis de patientes de 352. Les objectifs secondaires comportent l’étude du taux de réponse, du bénéfice clinique, de la survie sans progression à 6 et 12 mois, de la tolérance et de la survie globale.

De mai 2008 à novembre 2011, 350 femmes ont été incluses dans cette étude ; 348 remplissaient les critères d’inclusion. Les caractéristiques de la population étudiée sont comparables dans les deux bras : 98 % de tumeurs RE positives et majoritairement un statut HER2 négatif (92 % dans le bras létrozole + bévacizumab versus 89 % dans le bras létrozole), un âge médian de 58 ans (25-87 ans) avec presque 80 % des femmes âgées de 41 à 70 ans, une maladie mesurable dans environ 60 % des cas. Un peu moins de la moitié des patientes (43 % dans le bras létrozole + bevacizumab et 48 % dans le bras létrozole) étaient d’emblée métastatiques ; pour un peu moins de l’autre moitié, les patientes avaient un intervalle libre sans traitement de plus de 2 ans. Ainsi, dans le bras létrozole + bévacizumab, 35 % des femmes avaient reçu du tamoxifène au préalable et 42 % une chimiothérapie. Dans le bras létrozole seul, 36 % des femmes avaient reçu du tamoxifène et 38% une chimiothérapie.

Les résultats sont les suivants :

- Avec un suivi médian de 39 mois : la survie sans progression dans le bras létrozole + bévacizumab est augmentée de 4.6 mois par rapport au bras létrozole seul (15,6 mois à 20,2 mois) (HR = 0,75, IC : 0,59-0,96, p = 0,016).

- Il n’y a pas de gain statistiquement significatif en survie globale, celle-ci passant de 43,9 mois dans le bras létrozole à 47,2 mois dans le bras létrozole + bévacizumab (HR = 0,87, IC : 0,65-1,18, p = 0,188)

- Les toxicités de grade 3 /4 observées sont dominées par la survenue d’effets secondaires connus du bévacizumab : hypertension artérielle (24 % bras avec bévacizumab versus 2 %) et protéinurie (11 % bras avec bévacizumab versus 0 %).

- Le taux de réponse s’est montré supérieur en cas d’association bévacizumab et létrozole avec un taux de réponses objectives de 69 % versus 49 %, cette augmentation étant toutefois surtout liée à des réponses partielles.

- L’analyse à titre exploratoire de différents sous-groupes, n’a pas permis de dégager un sous-groupe d’intérêt particulier pour l’association thérapeutique : tranche d’âge (≤ 50 ans, 51-60 ans, 61-70 ans ou plus de 70 ans), maladie métastatique d’emblée ou non, atteinte osseuse seule ou non, nombre de métastases (1, 2, 3, 4, ou plus).

Que retenir au final ?

Le gain en survie sans progression est cliniquement significatif, supérieur à celui qui avait été envisagé, avec une séparation des courbes dès le début des traitements ;

Le taux de réponse est supérieur pour l’association létrozole + bévacizumab ;

La toxicité observée est celle connue du bévacizumab dans les autres indications, elle reste à mettre en perspective en fonction du bénéfice attendu ;

Aucune étude biologique ancillaire prévue ;

Aucune étude de qualité de vie prévue ;

Il n’est pas possible d’identifier les populations qui pourraient tirer plus de profit de l’association : les patientes les plus symptomatiques avec une réponse plus rapide appartiennent-elles à des sous-groupes biologiques particuliers ?

En conclusion :

Celle des auteurs rend bien compte des limites de l’étude : au vu de ces résultats, aucun changement de pratique n’est actuellement à envisager dans les cancers du sein RH positifs métastatiques. Néanmoins, le gain en survie sans progression incite à rechercher quel(s) sous groupe(s) plus particulier(s) pourrai (en)t être ciblé(s).

Liens d’intérêts : L’auteur déclare n’avoir aucun lien d’intérêt avec cet article.