Illustrations
Figure 1
Visualisation en microscopie à épifluorescence d’un échantillon prélevé d’eau de surface côtière après une coloration au SYBR Green. Cette image révèle la prédominance numérique des virus par rapport aux autres entités microbiennes, qu’elles soient procaryotiques ou phytoplanctoniques [125] .
Figure 1
Figure 2
Ces deux diagrammes révèlent la contribution relative dans l’océan des virus, des procaryotes (organismes dépourvus de noyau, tels que les bactéries et archées) et des protistes (unicellulaires eucaryotes). Les virus sont largement dominants en termes d’abondance (94 % des microbes marins sont des virus), mais, étant donné leur taille, ils ne représentent que 5 % de la biomasse totale dans l’océan [106] .
Figure 2
Figure 3
Frise chronologique retraçant l’histoire de l’écologie virale marine à travers les découvertes importantes. La première étude mentionnant l’isolement d’un virus marin provient de Spencer en 1955 [3] . Il s’agissait alors d’un phage lytique de Photobacterium phosphoreum . À cette époque, l’étude des virus marins reposait principalement sur leur propagation chez les poissons, les mollusques, ou leur transmission à l’homme [126-128] . L’étude des virus marins ne prit de l’ampleur qu’au début des années 1990 grâce aux travaux de Bergh et al . en 1989 [4] . Cette équipe norvégienne a en effet mesuré des concentrations virales marines allant de 109 à 1011 particules par litre. Plus tard, l’utilisation de nouvelles technologies telles que la cytométrie en flux et le séquençage ont permis d’étudier leur diversité, leur dynamique spatiotemporelle ou encore leurs interactions avec les organismes marins [6, 27, 33, 129-131] . Les premières analyses de viromes marins (ensemble des génomes de communautés virales) ont été publiées il y a 15 ans et ont permis d’accumuler des séquences dans toutes les régions océaniques majeures [132] . Ces métadonnées sont aujourd’hui hébergées au sein de différentes bases de données globales (VIROME, POV, TaraOcean dataset, iMicrobes). La métagénomique a depuis permis des avancées majeures en écologie virale marine [3, 4, 27, 29, 42, 78, 80, 119, 133-143] .
Figure 3
Figure 4
Schématisation du contrôle des communautés microbiennes orchestré par les virus marins. A. Les efflorescences/proliférations d’espèces planctoniques sont stoppées par les populations virales. Cela permet à long terme un maintien de la structure des communautés et une diversité inter-espèces importante [30, 84] . B. La population de l’hôte est maintenue par pression virale mais reste présente en concentration élevée dans l’environnement. Cette coexistence est permise par l’alternance entre développement de résistances chez l’hôte et adaptation du virus, ce qui favorise la diversité intra-espèce. Les fluctuations de concentrations sont majoritairement dues aux différences de conditions environnementales sur l’année (i.e. nutriments disponibles, température, ensoleillement). Ce cas se retrouve habituellement avec les bactéries hétérotrophes et les cyanobactéries [27, 92] .
Figure 4
Figure 5
Schématisation des interactions entre micro-organismes dans l’environnement marin telles qu’établies sans les communautés virales. La matière organique dissoute (MOD) générée par les producteurs primaires et les micro-organismes marins (lyse cellulaire, excrétion) se retrouve soit recyclée via la boucle microbienne puis la chaîne alimentaire, soit séquestrée dans les océans et fonds marins via la pompe biologique. (MOP : matière organique particulaire) [101] .
Figure 5
Figure 6
Schématisation des implications biologiques et biogéochimiques des virus marins. Les communautés de phytoplancton (producteurs primaires) et de bactéries hétérotrophes vont être la cible des virus dès leurs proliférations. La lyse cellulaire induite par l’infection virale aura pour effet de libérer de la matière organique dissoute (MOD) dans l’environnement (« shunt viral »). Cette matière organique sera recyclée essentiellement par les bactéries hétérotrophes non infectées, ce qui permettra le développement de cette communauté et des niveaux trophiques supérieurs. Une partie de la matière organique, dite réfractaire au recyclage par les bactéries, sera séquestrée dans les océans durant des milliers d’années.
Figure 6
Auteurs
Sorbonne Universités, UPMC Université Paris 06, France
CNRS, Adaptation et diversité en milieu marin UMR7144, Station biologique de Roscoff, Place Georges Teissier, 29680 Roscoff, France
Au cours des 50 dernières années, les virus marins sont passés du statut d’entités insignifiantes à celui d’acteurs majeurs dans le fonctionnement des océans. Ces parasites prédominent les communautés microbiennes marines et infectent majoritairement les micro-organismes (bactéries, microalgues et autres protistes) qui constituent la base de tous les réseaux trophiques dans l’océan. Les virus se répliquant avec un mode de vie lysogénique ont un fort impact sur l’expression des gènes une fois le génome viral intégré et favorisent les échanges génétiques au sein des communautés microbiennes marines. Les virus ayant un mode de vie lytique vont engendrer un contrôle strict des communautés et un relargage important de matière organique dans les océans. De la manipulation génétique de leurs hôtes à la modification des cycles biogéochimiques, les virus marins jouent un rôle essentiel dans leur environnement et ne peuvent plus être écartés des modèles écologiques. Cette revue propose de décrire l’impact des virus sur l’environnement marin en se focalisant sur trois niveaux d’organisation : la cellule, la communauté et l’écosystème.