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Bulletin du Cancer

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Gemcitabine et radiations ionisantes : radiosensibilisation ou association radiochimiothérapique Volume 89, numéro 4, Avril 2002

Auteurs
Département d'oncologie-radiothérapie, CRLC Val-d'Aurelle-Paul-Lamarque, rue de la Croix-Verte, 34298 Montpellier Cedex 05.

La gemcitabine (2',2'-difluoro-2'-déoxycytidine), agent analogue de la déoxycytidine, est un nucléotide difluoré proche de la cytosine arabinoside (Ara-C). Son activité radiosensibilisante se fonde désormais sur des données publiées et complète ses effets cytotoxiques déjà connus dans de nombreuses localisations, particulièrement les carcinomes du pancréas, du poumon et de la vessie. Cette revue résume les études précliniques et cliniques de phase I-II associant la gemcitabine et les radiations ionisantes de la manière la plus exhaustive possible. Les données in vitro permettent de conclure que l'effet de radiosensibilisation nécessite simultanément une déplétion du taux de dATP intracellulaire et une redistribution des cellules dans la phase S du cycle cellulaire. Peu d'études de radiobiologie ont véritablement montré un effet supra-additif bien qu'il y ait peu de doute actuellement du fait d'une toxicité importante sur les tissus sains dans les premières publications des essais de phase I. Une exposition prolongée à une concentration faible est comparable à une exposition courte à une concentration élevée. L'effet de radiosensibilisation a été retrouvé à partir de la 4e heure après la fin du traitement avec un maximum entre la 16e et la 24e heure. Ces résultats précliniques permettent de comprendre a posteriori les problèmes majeurs de toxicité et les décès toxiques rencontrés lors des premiers essais cliniques de l'association gemcitabine et radiothérapie, la molécule étant associée à doses cytotoxiques ou légèrement inférieures à des doses conventionnelles de radiothérapie. Une recherche par des études de phases I, voire II, de doses radiosensibilisantes de gemcitabine compatibles avec une utilisation clinique a alors débuté, dont les résultats ne sont disponibles que sous la forme préliminaire de résumés de congrès pour la grande majorité. Les quelques articles publiés confirment la nécessité d'utiliser des doses très nettement inférieures aux doses cytotoxiques usuelles, voisines de 100 mg/m2/semaine. Ces doses se rapprochent d'un contexte radiosensibilisant ou synergique dans lequel les radiations ionisantes sont associées à une drogue à dose non ou peu cytotoxique. Les effets secondaires déterministes tardifs permettraient de mettre en évidence une éventuelle interaction de la drogue dans la réparation des radio-lésions. En revanche, dans un contexte d'association radiochimiothérapique, les doses des drogues utilisées sont nettement cytotoxiques permettant des effets additifs, actifs en parallèle sur la tumeur. Ces associations ont pour conséquence une majoration des effets aigus sans permettre sur de telles observations d'écarter une possible potentialisation. Des études cliniques de phase I bien conduites et un recul plus long des différents essais cliniques permettront sans doute l'autorisation de l'association gemcitabine-radiothérapie dans de nombreuses localisations cancéreuses en gardant constamment à l'esprit la notion d'un index thérapeutique optimal.