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Cahiers d'études et de recherches francophones / Santé

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Contrôle de la rougeole dans les pays en développement Volume 4, numéro 3, Mai-Juin 1994

Auteurs
London School of Hygiene and Tropical Medicine, Keppel St, Londres WC1E 7HT, Grande-Bretagne, Inserm Unité 330, Université de Bordeaux II, 146, rue Léo-Saignat, 33076 Bordeaux cedex, France.
  • Page(s) : 163-71
  • Année de parution : 1994

Le Programme élargi de vaccination a fait des progrès significatifs en réduisant à la fois la morbidité et la mortalité causées globalement par la rougeole. De nombreux pays pensent qu’il est nécessaire de développer de nouvelles stratégies pour répondre aux modifications épidémiologiques de la rougeole dues à l’augmentation de la couverture vaccinale. La vaccination contre la rougeole transforme la distribution des cas par âge au profit des tranches d’âge les plus élevées. En effet, la transmission de la rougeole régresse alors, de sorte que les enfants atteignent un âge plus avancé avant d’être exposés au virus sauvage. Des flambées épidémiques peuvent se produire après quelques années de basse incidence dans des pays où la vaccination est modérément ou largement appliquée, ceci pour plusieurs raisons : - accumulation graduelle de sujets susceptibles pendant quelques années jusqu’à ce qu’apparaisse une flambée épidémique « postlune de miel » ; - constitution de poches de moindre couverture vaccinale, par exemple dans les bidonvilles, parmi la population nomade et d’autres groupes de population coupés du monde extérieur, ou au sein de groupes refusant la vaccination pour des raisons religieuses ou philosophiques ; - flambées chez des enfants vaccinés qui n’ont pas répondu au vaccin. Même dans les pays industrialisés, où le vaccin contre la rougeole est administré au cours de la deuxième année de vie et protège à 90 % de la maladie, de petites flambées épidémiques ont eu lieu chez des sujets ayant eu un échec vaccinal et en situation de promiscuité, par exemple en milieu scolaire. Dans les pays en développement, où la vaccination contre la rougeole est habituellement pratiquée à l’âge de 9 mois, 15 % des enfants environ ne sont pas protégés et il faut s’attendre à ce que les échecs vaccinaux jouent, à l’avenir, un rôle plus important dans les flambées épidémiques. De plus, de grandes épidémies peuvent se déclencher si l’efficacité du vaccin se trouve amoindrie par un stockage et/ou une manipulation inappropriés. Aussi, les programmes de vaccination bien établis se trouvent confrontés à une série de décisions sur les changements potentiels en matière de politique de vaccination contre la rougeole. Dans les situations où l’on trouve une transmission de la rougeole importante avant l’âge de 9 mois, on peut envisager un calendrier à deux doses, l’une à 6 mois et l’autre à 9 mois. Dans les zones où une couverture élevée est assurée par une dose unique de vaccin anti-rougeoleux à l’âge de 9 mois ou plus, et où ce sont les enfants les plus âgés qui transmettent la maladie, l’administration d’une dose supplémentaire peut être envisagée pour ces derniers : on pourrait élaborer cette stratégie dans un programme de vaccination avec un calendrier à deux doses, comme cela se fait dans de nombreux pays industrialisés, ou lors de campagnes massives concernant les enfants âgés de 9 mois à 14 ans, comme cela a été fait récemment sur le continent américain. D’autres études sont nécessaires pour déterminer le coût-efficacité de ces nouvelles approches supplémentaires destinées à la lutte contre la rougeole et à son élimination. Pour contrôler les changements dans l’épidémiologie de la rougeole, il faut absolument améliorer la surveillance épidémiologique ; l’investigation de flambées épidémiques aidera également à définir les modèles de transmission. Il faut des techniques de terrain pour confirmer le diagnostic de la rougeole et pour mesurer par un test de dépistage la prévalence des anticorps dans la population. Les stratégies de vaccination doivent être souples pour répondre aux données émanant de la surveillance et de l’évaluation.