Illustrations
Figure 1
Exemple de deux voies antivirales contre un virus ssRNA(+) : la voie de signalisation RLR humaine versus l’ARN interférence de la drosophile. Une fois qu’un virus à ARNsb(+) pénètre dans la cellule, son génome et son anti-génome sont synthétisés par l’ARN-polymérase ARN-dépendante (RdRp), ce qui entraîne la présence d’un intermédiaire ARNdb, le ligand ARN nécessaire à la fois pour la voie RLR et la voie ARNi.
Détection RLR-dépendante (à gauche) : Une fois que Retinoid acid-inducible gene I (RIG-I) et Melanoma Differentiation-Associated protein 5 (MDA-5) se lient à leurs ligands ARN, RIG-I subit un changement conformationnel qui libère ses domaines CARD pour les interactions, tandis que la MDA-5 forme des oligomères filamenteux sensibles à l’ATP. Ils sont ensuite recrutés aux mitochondries, où ils interagissent avec la protéine de signalisation antivirale mitochondriale (MAVS). Il en résulte la formation d’agrégats, qui servent de plateforme de signalisation pour le recrutement et l’activation des protéines TRAF. Les protéines TRAF permettent l’activation de TANK-binding kinase 1 (TBK1) et I B kinase-ε (IKK-ε), qui à leur tour activent IRF3 et IRF7. Ces facteurs de transcription, ainsi que le facteur nucléaire- B, se déplacent ensuite vers le noyau, où ils induisent l’expression des interférons α et β.
Mécanisme d’interférence de l’ARN (à droite) : Une fois que le ligand est reconnu par l’endonucléase Dicer-2, il est utilisé par l’endonucléase afin de produire des duplex de petits ARN interférents (siARN). Ceux-ci sont ensuite chargés sur la protéine Argonaute 2 (AGO2) par Dicer-2 et son cofacteur R2D2, afin de former le RNA-Induced Silencing Complex (RISC). Lors de la formation du complexe RISC, l’un des deux brins composant le duplex siARN sera éliminé tandis que l’autre servira de guide pour conduire RISC vers l’ARN viral complémentaire. Une fois que le RISC aura atteint sa cible, il sera clivé par une protéine Argonaute, puis dégradé, ce qui inhibera la réplication virale.
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Caractéristiques de l’ARN viral par rapport à l’ARN cellulaire. Comme les molécules d’ARN naissantes sont synthétisées à l’aide de nucléotides triphosphates. l’extrémité 5’ de la molécule d’ARN contient un triphosphate libre. Cependant, les ARNm endogènes sont synthétisés dans le noyau et subissent ensuite un traitement supplémentaire afin d’éliminer cette extrémité 5’ triphosphate libre comme des modifications de base, par exemple un coiffage 5’ co-transcriptionnel avant leur exportation dans le cytosol. La voie de coiffage, que l’on trouve chez toutes les eucaryotes, peut contenir différents niveaux de méthylation (Cap0, Cap1 et Cap2) et peut même être hyperméthylé comme la coiffe de la 2,2,7-triméthylguanosine (m3G). Certaines espèces d’ARN cellulaires contiennent différentes extrémités 5’, comme les ARNt et les ARNr, qui possèdent un monophosphate. Au contraire, la synthèse d’ARN dans le cytosol à l’aide d’une ARN-polymérase ARN-dépendante (RdRp), telle qu’elle est souvent exécutée par la plupart des virus à ARN, donne lieu à la présence d’une extrémité 5’ PPP. Pour dissimuler cette extrémité, certains virus produisent leur propre coiffe en utilisant des protéines cellulaires ou virales, ou bien utilisent un mécanisme de vol de coiffe pour voler la coiffe des ARNm cellulaires. D’autres possèdent une protéine liée de manière covalente comme VPg à leur extrémité 5’. De plus, certains virus protègent leur ARNdb à l’intérieur d’usines à virus (vésicules à double membrane ou par réarrangement de la membrane des organites cellulaires), ou en recouvrant l’ARNdb de protéines de liaison à l’ARNdb comme les protéines N du VSV.
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Structures des protéines Dicer à travers les espèces. Les protéines Dicer sont des endonucléases spécifiques de l’ARNdb, membres de la famille des RNase III et de la famille des hélicases DExD-box. Ces hélicases sont caractérisées par la présence d’un motif Asp-Glu-x-Asp (DExD), et un certain nombre d’entre elles jouent un rôle dans la reconnaissance des acides nucléiques étrangers. Les protéines Dicer possèdent un domaine central atypique de liaison à l’ARNdb (dsRBD), un dsRBD C-terminal, deux domaines RNase III, un domaine hélicase et un domaine plateforme-PAZ. Le domaine hélicase de Dicer, situé à l’extrémité Nter de la protéine, n’hydrolyse pas l’ATP dans toutes les protéines de Dicer. La production de siARN à partir d’ARNdb nécessite de l’ATP dans C. elegans et D. melanogaster (uniquement pour dmDicer-2 mais pas pour dmDicer-1). Au contraire, bien que le domaine de l’hélicase soit conservé dans le Dicer humain, il n’hydrolyse pas l’ATP in vitro . Le domaine PAZ contient une poche de liaison au phosphate, qui reconnaît le monophosphate 5’ des substrats ARNdb longs et courts et ancre l’extrémité 5’ du substrat ARN.
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Structures des différents RLR . Comme les protéines Dicer, les récepteurs RIG- like font également partie de la famille des hélicases DExD-box, et contiennent également un motif Asp-Glu-x-Asp (DExD). RIG-I, MDA-5 et LGP2 reconnaissent différents ligands. RIG-I reconnaît le 5’ triphosphate, ainsi que le 5’ diphosphate, s’il possède une portion d’ARN entièrement apparié à son extrémité 5’, comme c’est le cas pour de nombreux virus à ARN à brin négatif. Par opposition, MDA-5 reconnaît des longs ARNdb (jusqu’à 2kb). Comme MDA-5, LGP2 se lie à l’ARNdb indépendamment de l’extrémité 5’PPP. Cependant, LGP2 n’a pas de domaine CARD et ne peut donc pas induire de cascade de signalisation. En dehors de cela, le reste de la structure des trois protéines est similaire, elles contiennent toutes un domaine hélicase et un domaine de régulation C-terminal (CTD).
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Réponse antivirale du virus de la dengue et suppresseurs viraux. Exemple de DENV, un arbovirus doté de mécanismes d’évasion pour ses hôtes humains et moustiques. DENV se réplique à l’intérieur de membranes induites par le virus [126] , protégeant ainsi son ARNdb de la reconnaissance des RLR chez l’Homme et de Dicer-2 chez Aedes aegypti . Chez les mammifères, plusieurs protéines du DENV agissent à différents niveaux de la réponse immunitaire IFN. Le sfRNA empêche l’activation de RIG-I en se liant à la protéine TRIM25, qui ubiquitine normalement RIG-I afin de l’activer [116] . NS3 empêche la translocation de RIG-I vers les mitochondries en se liant à la protéine responsable de cette translocation, 14-3-3ε [145] , et NS4A inhibe en outre la liaison entre RIG-I et MAVS en interagissant avec MAVS [112] . De plus, NS4B et NS2A empêchent la phosphorylation de TBK1 et la phosphorylation ultérieure de IRF3 [113] . Enfin, NS5 permet d’imiter l’ARNm cellulaire en induisant une 2’O-méthylation sur l’ARN viral [114] , une modification qui inhibe la reconnaissance par RIG-I. Chez les insectes, il a été démontré que trois de ces facteurs viraux, le sfRNA, NS2A et NS4B, sont des VSR, bien qu’ils agissent par des mécanismes distincts de ceux décrits pour les mammifères juste au-dessus. Un modèle dans lequel le sfRNA hautement exprimé agit comme un leurre pour empêcher la machinerie de l’ARNi de traiter l’ARNg viral moins abondant a été décrit [119] . De plus, il a été démontré que NS2A et NS4B séquestrent l’ARNdb et empêchent sa liaison et son traitement par Dicer-2 [146, 147] .
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Auteurs
Université de Strasbourg, CNRS UPR9022, Institut de biologie moléculaire et cellulaire, Strasbourg, France
Un élément clé de l’immunité antivirale est la distinction entre les éléments du « soi » et du « non-soi ». Cette distinction peut être effectuée à travers la détection d’ARN double-brin (ARNdb), un signe courant d’infection virale, notamment par des hélicases ARN cytosoliques. Selon l’organisme, deux voies antivirales majeures peuvent être induites par des hélicases agissant sur l’ARN : la voie de l’ARN interférence et celle des interférons (IFN). Dans la voie de l’ARN interférence, les ARNdb sont détectés par une protéine Dicer, puis guident la reconnaissance séquence-dépendante et la dégradation subséquente de l’ARN viral complémentaire. Dans la voie de signalisation IFN, les ARNdb sont reconnus par un récepteur RIG-like (RLR), conduisant à l’expression d’IFNs, de cytokines et de chimiokines. Dans cette revue, nous abordons les caractéristiques des ARN qui peuvent être utilisées par la cellule afin de détecter une infection virale, les deux types de reconnaissance par des hélicases mentionnées plus haut, ainsi que certains mécanismes d’échappement qui permettent aux virus d’éviter la détection.