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Virologie

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Activation du génome méthylé du virus d’Epstein‐Barr par la protéine lytique Z Volume 8, numéro 6, nov.-décembre 2004

Auteur
Laboratoire de virologie moléculaire et structurale, CNRS, Gif‐sur‐Yvette

Auteur(s) : David Pasdeloup

Laboratoire de virologie moléculaire et structurale, CNRS, Gif-sur-Yvette

La méthylation de l’ADN est connue pour moduler l’expression de gènes viraux et cellulaires. C’est par exemple le cas pour le virus d’Epstein-Barr (EBV) dont le génome est fortement méthylé dans les cellules infectées à l’état latent. 
Les auteurs d’un article récent de Nature Genetics ont voulu déterminer l’influence de la méthylation de l’ADN du virus sur son établissement en latence et sur sa réactivation. Ils se sont intéressés à deux facteurs de transcription viraux, Z et R, respectivement codés par les gènes BZLF1 et BRLF1, ciblant les promoteurs Rp et Zp. Ces deux protéines sont connues, d’une part, pour activer mutuellement le promoteur l’une de l’autre et, d’autre part, pour provoquer l’entrée en phase lytique. Z active l’expression des gènes lytiques dans toutes les cellules positives pour l’EBV tandis que R ne le fait que dans certains types cellulaires.
Les auteurs démontrent que la sensibilité de ces protéines à la méthylation de leur promoteur cible est différente. Z est ainsi capable de se lier préférentiellement à l’ADN méthylé et de l’activer. Cette propriété unique de Z permet au virus de se réactiver malgré la méthylation intensive du génome viral.
Les auteurs se sont intéressés au promoteur du gène BRLF1 ou Rp, ciblé par Z. Ce promoteur contient trois ZRE (Z responsive element) dont 2 (ZRE 2 et 3) contiennent des motifs CpG méthylables. Par des expériences de retard sur gel, les auteurs montrent que Z se fixe au motif ZRE2, avec une affinité plus forte pour la forme méthylée. La protéine se fixe également au motif ZRE3, mais cette fois uniquement à sa forme méthylée.
Par la suite, les auteurs visualisent la transactivation d’un gène rapporteur CAT sous la dépendance de Rp afin de quantifier la transactivation induite par Z selon l’état de méthylation de Rp. Ces expériences ont permis de constater que Z active préférentiellement les formes méthylées de la construction Rp-CAT. Des expériences similaires menées sur la transactivation par R de constructions Zp-CAT et Rp-CAT montrent que cette activation est inhibée par la méthylation des deux promoteurs. Ces données suggèrent que l’état de méthylation du génome viral affecte différemment la capacité des protéines Z et R à lever la latence. La dernière expérience consiste à visualiser l’effet de Z et R en cellules infectées en fonction de la méthylation du génome viral. Pour cela, des cellules infectées à l’état latent par un virus BRLF1- ou BZLF1- sont utilisées. Quand des cellules infectées à l’état latent par un virus BRLF1- sont transfectées par un plasmide codant pour R, il y a induction du cycle lytique (visualisé par la synthèse d’une protéine précoce de cycle lytique BMRF1) et production de Z. Quand le génome est déméthylé, le résultat est le même mais les quantités de Z et de BMRF1 produites sont plus importantes. Dans le cas des cellules infectées par le virus BZLF1-, il y a induction du cycle lytique par transfection d’un plasmide codant pour Z uniquement dans le cas où le génome est méthylé. Si le génome est déméthylé, l’effet de la transfection est quasi-nul.
Les résultats présentés par cette équipe montrent de façon élégante la capacité originale d’un facteur de transcription à pouvoir se lier et activer des promoteurs méthylés préférentiellement à des formes non méthylées de ces mêmes promoteurs.
Z et R ont donc une action complémentaire dans la mesure où la transactivation par R est inhibée par la méthylation de ses promoteurs-cibles, contrairement à Z dont l’action est inhibée pour les promoteurs non méthylés et activée pour les promoteurs méthylés. Sachant que l’état de méthylation du génome viral dépend du type cellulaire infecté, cette complémentarité permet d’induire un cycle lytique quelles que soient les circonstances. Dans les cas où Z est en quantité limitante, la méthylation du génome permettrait en outre de favoriser la latence du virus.

Référence 

Bhende PM, Seaman WT, Delecluse HJ, Kenney SC. The EBV lytic switch protein, Z, preferentially binds to and activates the methylated viral genome. Nature Genet 2004 ; 36 : 1099-104.