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Soigner les enfants mineurs faisant l’objet d’une mesure de placement Volume 15, numéro 5, Mai 2019

Journal de terrain, septembre 2017

« Daniella, âgée de 16 ans, d’origine ivoirienne, se présente pour la première fois au cabinet, accompagnée par une éducatrice du centre d’éducation renforcée (CER) où elle vient d’arriver. Elle est enceinte et souhaite garder l’enfant. Le placement au CER est l’alternative à l’incarcération encourue pour fait de délinquance. Elle séjourne avec 5 autres adolescents venus de divers départements. Son père serait actuellement en Afrique. Elle ne conserve pas de lien avec sa mère, qui reste joignable par téléphone. La grossesse est estimée à 12 SA. Des démangeaisons vulvaires constituent en réalité son motif initial de consultation. Elle confie avoir eu plusieurs partenaires sexuels et entretenu des rapports protégés à l’exception de sa première relation.

Pour l’équipe éducative, la prostitution est probable. D’après elle, elle ne présente pas d’antécédent notable, elle fume un demi-paquet par jour et consomme ponctuellement du cannabis.

Un dépistage d’IST est pratiqué et la PCR sur les urines s’avère positive pour C. trachomatis. L’échographie permet de corriger la date de début de grossesse à 7 SA + 2 jours.

Elle consulte la semaine suivante pour des douleurs abdominales et évoque un trouble du sommeil. Elle en profite pour exposer sa gêne liée à l’acné. Finalement convaincue par une consultation au planning familial de ne pas vouloir mener cette grossesse à terme, la décision est prise de recourir à IVG. L’alprazolam 0,5 mg est introduit avec un traitement par doxycycline.

Plus tard, elle revient en consultation. Un implant contraceptif a été posé le jour de l’IVG par aspiration. Elle semble avoir assez mal vécu ce moment et reste mutique, venue initialement pour un tableau viral, puis, au cours de l’examen, des douleurs abdominales depuis l’avortement, associées à des saignements. L’échographie de contrôle n’a jamais été réalisée. Elle avance que c’est impossible du fait de l’emploi du temps au CER. L’importance de la pratiquer est soulignée en présence de l’éducateur. Par ailleurs, le trouble du sommeil toujours marqué (sevrage en cannabis ?) conduit à prescrire un traitement adjuvant. Un nouveau rendez-vous a lieu 20 jours plus tard. Les douleurs se latéralisent, la jeune patiente n’a toujours pas réalisé son échographie… ».

La protection de l’enfance une mission d’ordre public et d’intérêt général

Accompagner, soutenir et aider les enfants et familles par des actions de prévention, de protection et de lutte contre la maltraitance infantile, telles sont les missions qu’assurent les services de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE) [1]. Cette mission s’inscrit dans la loi de décentralisation du 6 janvier 1986, menée à l’échelle de chaque département sous la responsabilité du président du conseil départemental. Le Code de l’Action Sociale et des Familles (CASF) précise l’importance de l’action de prévention notamment via les dispositifs de signalement et d’informations préoccupantes. Lorsque les mesures de prévention sont insuffisantes, des mesures de protection sont imposées par le juge des enfants (JE). Il s’agit des mesures d’actions éducatives en milieu ouvert (AEMO) ou d’accueil des enfants en dehors du domicile familial (mesures de placement). Si pour des raisons physiques, d’abandon, de manquements graves à leurs devoirs ou de désintérêt manifeste, les parents, tuteurs légaux, font défaut à la protection de l’enfant, celle-ci se doit d’être assurée aux plans judiciaire et administratif. Non sans perturber le schéma familial dit « traditionnel », s’ouvre un questionnement sur l’autorité parentale (AP) et un relatif « transfert » vers les services de l’ASE auxquels les enfants sont confiés.

D’après l’Observatoire national de la protection de l’enfance (ONPE) [2], en 2016 2 % des mineurs faisaient l’objet de mesure de protection de l’enfance, soit près de 299 600 jeunes (en hausse depuis 2007 de + 13 %), ainsi qu’environ 20 900 jeunes âgés de 18 à 21 ans bénéficiant d’une aide « jeune majeur » (en baisse) : 51,7 % en milieu ouvert, 48,3 % placés en structure spécialisée ou en famille d’accueil, avec des variations en fonction des départements [3].

Les questions de santé constituent l’un des axes essentiels du projet construit pour l’enfant au sein des structures de l’ASE. Ancrés dans un dispositif morcelé aux multiples intervenants, et chargés de leur histoire de vie, ces jeunes se trouvent facilement en rupture avec l’organisation sociétale et le système de santé en particulier. Face à des besoins sanitaires parfois immédiats, l’obligation éthique de porter assistance à ces mineurs dans le respect du cadre juridique ne saurait s’accorder à l’attente de l’obtention des accords parentaux. Ces situations peuvent générer une certaine tension entre les acteurs responsables (parents, éducateurs, médecins généralistes (MG) ambulatoires et praticiens hospitaliers, psychiatres notamment). Le cadre et les ressources accessibles variant fortement entre monde hospitalier et libéral, les praticiens composent au mieux pour apporter des soins les plus adaptés à ces jeunes patients aux besoins d’exception dans des situations d’exception.

Une enquête en immersion

Nous avons réalisé une étude qualitative mêlant diverses méthodes (observation participante, entretiens semi-directifs et libres, individuels ou en focus group, menés à un ou deux enquêteurs) pendant la période de septembre 2017 à mai 2018 sur la région stéphanoise. Nous avons interrogé des MG, plus ou moins investis auprès de divers dispositifs de l’ASE (CER, pôle éducatif, foyer). Nous avons également pu rencontrer des psychiatres, des pédiatres, ainsi que des médecins urgentistes, des éducateurs spécialisés, chefs de pôle, psychologues, équipes soignantes et sociales (encadré 1).

Il s’agissait de permettre aux professionnels d’exprimer leur vision du cadre juridique relatif à l’AP, des soins courants et leur vécu de ces situations. Une part des matériaux relève d’observations de terrain en stage hospitalier et ambulatoire, ou d’observation pure au sein des dispositifs de la Sauvegarde 42. L’étude a été déclarée à la CNIL et au comité « Terre d’éthique » du CHU de Saint-Étienne (no IRBN282018/CHUSTE).

Pour garantir l’anonymat, seuls les genres et les âges des interviewés ont été conservés et les identités codées, des pathologies ont été interverties entre patients, des indices géographiques ont été modifiés.

Une réunion trimestrielle interdisciplinaire d’analyse de pratique et de groupe de discussion réunissant les directeurs et psychologues des divers dispositifs et les MG et psychiatres consultés par les adolescents servira de méthode d’analyse intermédiaire et de triangulation interne. Un groupe de supervision composé des maîtres de stage universitaire de médecine générale, de psychiatres du service de psychiatrie de l’adolescence du CHU de Saint Étienne et d’enseignants chercheurs en sciences sociales de Saint-Étienne proposera d’autres triangulations externes. L’analyse sera effectuée sous le paradigme positiviste et inductif, avec pour modèle théorique l’interactionnisme symbolique et la théorisation ancrée de Glaser et Strauss.

L’Aide Sociale à l’Enfance (ASE), un dispositif sous tension

« La protection de l’enfance vise à garantir la prise en compte des besoins fondamentaux de l’enfant, à soutenir son développement physique, affectif, intellectuel et social et à préserver sa santé, sa sécurité, sa moralité et son éducation, dans le respect de ses droits. » (Art L 112-3 CASF dans sa version issue de la loi n̊ 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfance).

L’ASE s’inscrit dans le cadre de l’action sociale et est définie par la loi L-221 du CASF. À travers les divers dispositifs qui la composent, ses objectifs sont d’accompagner les familles, prévenir les difficultés en matière d’éducation des enfants, et assurer la prise en charge de ces derniers lorsque cela s’avère nécessaire [4]. Les professionnels conduisent des actions de prévention en cas d’inadaptation sociale, de délinquance ou conduites à risque [1]. Ils interviennent lorsque la santé, les intérêts, les droits et la sécurité de l’enfant sont compromis, tout en s’efforçant de maintenir les liens entre l’enfant et sa famille. L’ASE assure la mise en place de mesures de soutien éducatif, d’accompagnement de l’enfant, mais aussi des parents, qui peuvent être décidées dès le plus jeune âge grâce aux services de PMI [3].

Les parents peuvent parfois eux-mêmes initier une demande d’intervention. Il s’en suit une visite au domicile de l’enfant (actions éducatives à domicile) pour mettre en place un soutien psychologique et éducatif et renforcer les liens familiaux comme les responsabilités éducatives des tuteurs légaux.

Lorsque la prévention est insuffisante, le JE décide [5] de mesures de protection (mesures d’actions éducatives), voire du retrait du milieu familial notamment lorsque l’enfant vient à se mettre en danger. Le placement peut être prononcé de manière administrative, sur décision conjointe du conseil départemental et des parents pour un accueil provisoire, ou judiciaire au pénal ou au civil (art 375 Cc), via une ordonnance de placement provisoire (OPP) dans les cas d’urgence ou par une assistance éducative prononcée le plus souvent pour une période de deux ans.

En application de l’art 375 Cc, le JE est en règle générale saisi par le Procureur de la République sur requête, mais peut également agir sur demande d’un ou des parents, de l’institution d’accueil, ou même de l’enfant. Selon les termes de l’art 375-7 du Cc, il lui incombe de définir le type de placement, les objectifs attendus, mais également d’organiser le maintien du lien avec la famille (visites – correspondances) afin de proposer le mode de prise en charge le plus adapté pour s’inscrire dans un projet éducatif cohérent [6]. Le choix des modalités de placement reste souvent théorique, notamment devant le nombre de places disponibles limité. Le risque, c’est qu’un jeune soit accueilli au sein d’une structure n’ayant pas les capacités de contenir et gérer son comportement (en cas de troubles psychiatriques). Les situations de « crise » voire d’urgence sont alors à redouter. Source de stress, de tension, ces épisodes génèrent des difficultés à mener un travail conjoint avec des perspectives communes pour les partenaires intervenant aux différents niveaux médico-psycho-socio-éducatifs autour des jeunes.

L’autorité parentale (AP), des droits et des devoirs

Le concept de l’AP n’a pas toujours été défini comme aujourd’hui (encadré 2).

L’AP n’est pas toute puissante

C’est une fonction, plus qu’un pouvoir [7]. Si elle accorde des droits aux parents, elle leur impose des devoirs à l’égard de l’enfant, « ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant […] jusqu’à la majorité ou l’émancipation […] pour le protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne » (Art 371-1, Alinéa 1 du Cc). L’art 373-2-6 du Cc (loi no 2010-769 du 9 juillet 2010) prévoit qu’il revient au Juge des Affaires Familiales (JAF) de statuer sur l’exercice de l’AP. Il tient compte de divers éléments (art 373-2-11 du Cc) : les accords ou pratiques d’usage précédemment établis entre les parents, l’aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l’autre, de l’âge de l’enfant, des renseignements recueillis lors d’enquêtes et contre-enquêtes sociales et des expertises éventuelles, des pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre, et les sentiments exprimés par l’enfant mineur.

Quand les parents sont en grandes difficultés, en cas de carences affectives, ou lorsqu’ils souffrent de troubles psychiques, et que le développement de l’enfant s’en trouve impacté (échec scolaire, mise en danger, fugue, sentiment de toute-puissance, agressivité, reproduction des violences du domicile…), il faut intervenir et porter assistance pour l’équilibre de l’enfant. Le JAF statue quant à la délégation ou non de l’AP.

Une ligne directrice s’impose : agir en faveur de la sauvegarde des intérêts de l’enfant mineur. Les éducateurs font le point et réévaluent régulièrement les situations. Le JE reçoit leurs rapports et statue sur l’orientation à donner : reconduite en l’état ou révision des mesures déjà en place.

À l’admission des enfants intégrant les services de l’ASE, un livret d’accueil est établi par les différents services. Il regroupe toutes les informations afin de fixer des objectifs, élaborer un projet individuel avec ses modalités pratiques, financières et matérielles, mais aussi définir le rôle donné aux parents. Il est consigné par le président du conseil départemental, les représentants légaux et les organismes de l’ASE.

« L’objectif reste que l’enfant placé ne le soit pas ad vitam aeternam, l’idée c’est qu’à un moment donné il puisse réintégrer sa famille… On va essayer de leur rendre compte tout au long du placement de ce qui est fait pour leurs enfants, ce qui va ou pas, et comment les impliquer ». [I. Éducateur].

Qui porte (holding) les soins des adolescents ?

L’AP et l’importance centrale de l’enfant sont régies par les articles 371 et suivants du Cc. Étendu à tous les aspects du quotidien des enfants, le cadre juridique encadre aussi la pratique en matière de santé et des soins portés à ces jeunes patients pour lesquels des mesures éducatives sont mises en place.

Lors de l’accueil au sein des dispositifs de l’ASE, le dossier d’admission comporte souvent un document à l’attention du détenteur de l’AP par lequel celui-ci « déclare donner les autorisations de soins, d’hospitaliser et d’opérer en cas d’urgence ». Signée à une date donnée, sans spécificité réelle d’actes concernés, cette pièce intégrée au dossier semblerait plutôt viser à tranquilliser les équipes et tenter de simplifier d’éventuelles prises en charge. « On ne fait pas toujours les choses comme on devrait les faire, déjà parce qu’on n’a pas le temps et puis aussi parce qu’on n’a pas toujours la réponse, alors qu’est-ce qu’on décide au final ? On attend les parents ? On ne soigne pas l’enfant du coup ? Ça nous met quand même un peu en porte à faux, donc éthiquement parlant on ne peut pas ne pas soigner un enfant s’il se présente » réagissait le Dr Z. à propos du délai d’obtention des autorisations de soin des parents.

Nombre d’articles de lois explicitent les obligations médico-légales pour soigner les enfants confiés à l’ASE. La santé est un élément majeur pour la prise en charge globale des enfants placés. L’assurer s’inscrit dans la loi comme l’un des devoirs des détenteurs de l’AP. Les art 372 et 373-3 du Cc fixent l’exercice conjoint de l’AP par les deux parents, quelle que soit leur situation. Ainsi, en application de l’art 372-2 du Cc chaque parent peut décider seul pour « un acte usuel de l’autorité parentale relativement à la personne de l’enfant » (c’est-à-dire qui se conforme aux pratiques antérieures ou qui n’engage pas l’avenir de l’enfant). À ce titre, les soins, les opérations nécessaires relèvent pleinement de l’autorité parentale des pères et des mères. L’enfant, en fonction de sa maturité et de son discernement, est toujours associé aux décisions le concernant. Les parents sont « codécideurs » jusqu’à ses 18 ans ou son émancipation.

« Une jeune fille de 12 ans consulte aux urgences, amenée par son éducatrice pour un épisode d’hématémèse survenu l’après-midi. Le saignement a récidivé peu de temps après son arrivée. Le médecin en charge de l’enfant a souhaité attendre le fax de l’autorisation d’un des deux parents avant d’effectuer un bilan sanguin et de mettre en place une perfusion. L’état de la fillette restait stable, mais pouvait se dégrader rapidement. L’éducatrice ne disposait d’aucun document sur elle autorisant les soins ». [Journal de terrain, urgences pédiatriques].

Chacun des parents dispose des mêmes pouvoirs sur la santé du mineur et les décisions qui s’y rapportent doivent être prises par les deux parents sauf si l’acte envisagé relève de la présomption d’accord définie dans l’art 372-2 du Cc en vertu duquel chacun des parents est réputé agir avec l’accord de l’autre quand il faut seul décider d’un acte usuel y compris en cas de séparation des parents. Lorsque l’autorité parentale est exercée par un seul parent, la décision médicale relève alors du seul parent titulaire (art 373-2 et 373-2-1 du Cc).

En cas de défaillance dans l’exercice de l’autorité parentale, des mesures d’assistance éducative peuvent être ordonnées par le JE « si la santé, la sécurité ou la moralité d’un mineur non émancipé sont en danger ou si les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises » [Art 375 du Cc]. Elles sont établies pour une durée de 2 ans pouvant être allongée pour garantir une meilleure stabilité relationnelle affective et géographique au sein d’un lieu de vie adapté aux besoins évolutifs de l’enfant.

L’art 375-2 du Cc prône le maintien du mineur dans son « milieu actuel chaque fois qu’il est possible », l’évaluation du risque et de la mise en « danger » du mineur demeurant soumise à l’appréciation du JE et des professionnels socio-éducatifs. La séparation intervient parfois non pas à l’issue de l’évaluation éducative et dans un cadre préparé, mais dans l’aigu, sur la crise de trop, un acte délictueux factuel (l’ordonnance du 2 février 1945, pénal vs éducatif) poussant le juge à prononcer l’éloignement du « milieu actuel » (foyer d’accueil d’urgence, centre de placement immédiat).

Les services de l’ASE s’assurent qu’un accompagnement permet le retour et le suivi de l’enfant dans sa famille dans les meilleures conditions. Derrière la question de l’Autorité parentale, se profilent et se tissent la question des liens, d’affiliation et de désaffiliation, les questions d’attachement.

La délégation de l’AP (ou DAP)

Certaines situations conduisent à déléguer l’exercice de l’AP à un tiers ou un organisme spécialisé de l’ASE. Elle est le fait du JAF en application de l’art 376-1 du Cc.

La délégation peut être « à la demande des parents » ou « à la demande d’un tiers » (département, membre de la famille, etc.) en cas de désintérêt ou bien devant l’incapacité des parents à assurer l’exercice partiel ou total de l’AP, sur demande de l’ASE, du parquet, d’une personne accueillant l’enfant ou d’un membre de la famille. Le JAF peut baser sa décision sur les sentiments de l’enfant, le bilan de l’éventuelle enquête sociale menée et bien sûr l’intérêt de l’enfant. Lorsqu’une mesure de placement judiciaire est en cours, la DAP requiert l’avis du JE en charge du dossier.

La DAP peut aussi être émise par les parents dans l’intérêt de l’enfant lorsqu’ils sont dans l’incapacité temporaire d’exercer l’AP (hospitalisation, maladie, éloignement, incarcération, difficulté avec l’enfant, difficultés matérielles ou psychologiques).

Synthèse pour la pratique

  • Le principe de l’AP : les parents sont tous deux titulaires de l’AP (art 372 Cc) même s’ils sont séparés (art 373-2Cc) sauf si AP confiée exclusivement à l’un des deux par le JAF (art 373-2-1 Cc) ou par la loi (reconnaissance tardive/art 372 alinéa 2 Cc).
  • Lorsque l’enfant est placé, les parents conservent l’AP (art 375-7 Cc) sauf en ce qui concerne les actes dits usuels ce qui signifie que, pour tout acte non usuel leur accord doit être recherché.
  • Une exception à ce principe (art 375-7 Cc) permet de passer outre l’accord des parents : intervention ponctuelle du JE pour autoriser un acte non usuel aux conditions suivantes : si l’intérêt de l’enfant le justifie, en cas de refus abusif ou injustifié ou en cas de négligence des détenteurs de l’AP et à charge pour le demandeur de rapporter la preuve de la nécessité de cette mesure.
  • Les exceptions :
  • 1. La délégation d’autorité parentale (art 376-1 et suivants Cc) : cette délégation peut être totale (en ce cas, les parents n’interviennent plus en aucune façon pour les décisions concernant l’enfant et sont substitués par le délégataire) ou partielle et ne concerner que certains domaines (santé, scolarité...). Dans ce second cas, assez rare car complexe en pratique, on aboutit alors à un exercice partagé de l’autorité parentale entre le délégataire et un ou les parents.
  • La délégation parentale est prononcée sans limitation de durée (contrairement aux décisions du JE). Elle peut prendre fin à la demande des parents ou, pourquoi pas, d’un tiers, « s’il est justifié de circonstances nouvelles ». Un nouveau jugement est donc nécessaire.
  • 2. Le retrait d’autorité parentale (art 378 et suivants Cc) : rare en pratique, en cas d’infraction grave commise par le parent sur la personne de l’enfant ou de l’autre parent ou en cas de mauvais traitements sur l’enfant ou de toute autre conduite notoirement dangereuse (alcool, drogues, etc.).
  • La procédure de délaissement parental (art 381-1 et suivants Cc) concerne les parents qui, sans motif légitime, n’entretiennent plus, depuis au moins un an avant la saisine du juge, aucune relation avec leur enfant de quelque manière que ce soit. Le juge peut alors prononcer le délaissement parental à l’égard d’un des parents ou des deux, ce qui peut avoir pour effet, si les deux parents sont concernés de rendre l’enfant adoptable. C’est une décision lourde de conséquences.

Remerciements

à Florence Chevallard (juge des affaires familiales au TGI de Saint-Étienne) pour ses conseils et sa relecture minutieuse.

Liens d’intérêts

les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt en rapport avec l’article.

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