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La pomme Volume 7, numéro 1, Janvier-Février-Mars 2019

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Ce fruit d’or de l’immortalité que vola Héraclès au jardin des Hespérides, ce fruit de la tentation que croquèrent Adam et Eve au jardin d’Eden, ce fruit chargé de mystère dont bien des artistes comme Cézanne et Magritte s’inspirèrent pour en saisir l’intemporalité… Ce fruit mais c’est la Normandie ainsi que le chantait Lucie Delarue-Mardrus : « L’odeur du pays était dans une pomme, Je l’ai mordue avec les yeux fermés du somme, Combien de fois, ainsi, l’automne rousse et verte, Me vit-elle au milieu du soleil et, debout, Manger les yeux fermés la pomme rebondie, De tes près, copieuse et forte Normandie ?... Ah ! Je ne guérirai jamais de mon pays… »

Connue depuis l’Antiquité par les Grecs et les Égyptiens, elle nous viendrait d’Orient et ce sont les Croisés qui l’amenèrent dans nos régions. On raconte qu’un certain gentilhomme espagnol, Darous de l’Estre, au XVIe siècle, débarquant dans le Cotentin, introduisit du côté de Valognes les meilleures variétés de pommes douces. Au Moyen Âge, la Normandie est le principal verger de France, et peu à peu le cidre remplace la cervoise, un cidre vraisemblablement de mauvaise qualité, aux antipodes du cidre mousseux actuel, témoin de la qualité des cultures depuis le XIXe siècle.

Que de variétés ! Le pommier est en effet une espèce auto-stérile, ce qui signifie que le pollen d’une variété d’arbre ne peut féconder les ovules des fleurs de cette même variété, et ainsi il faudra avoir recours à la greffe pour copier la variété qu’on veut stabiliser. On estime à plusieurs milliers les variétés de pommes en France et à plusieurs centaines celles de Normandie : « Les Reinettes de toutes sortes, grises, blanches, d’Angleterre, de Bihorel… les Melrose de la vallée de la Seine, les Pigeons de Jérusalem du Pays de Bray en forme de poire, les Calville rouges d’automne ou blanches d’hiver, les Bénédictins tardifs, mordorées et croquantes, les Belles de Boskoop, rouges de fierté et d’émotion belles pommes rondes et joufflues. » (Mr Vittecoq, pomologue du Pays de Caux).

À ses qualités gustatives s’ajoutent de nombreuses qualités nutritionnelles et Winston Churchill n’a-t-il pas dit : « Une pomme par jour chasse le médecin… pour qui vise bien ! » ? Cent grammes de fruit contiennent 12,5 % de glucides, 0,3 % de protides, 2,5 % de fibres, 0,3 % de lipides et 84,3 % d’eau et ses atouts nutritionnels participent au bon fonctionnement de l’organisme. Sa grande richesse en potassium (100-200 mg/100 g) et sa faible teneur en sodium permet de lutter contre l’hypertension artérielle. Il a été prouvé (Université de Toulouse) qu’elle permet une meilleure assimilation du cholestérol et des lipides grâce à sa richesse en fibres ; elle a aussi un potentiel antioxydant (vitamine C) donc anticancéreuse… POUR GARDER LA FORME, MANGEZ DES POMMES (non pelées si possible, mais attention, certaines pommes subissent de nombreux traitements et leur peau est bien trop brillante car « cirée », donc optez pour une culture biologique).

Il y a pléthore de recettes à base de pommes tant salées que sucrées ! Et qu’en est-il de cette coutume gastronomique, le trou normand ?

Le trou normand

Le « coup du milieu » terme déjà utilisé par le poète latin Térence, consiste à boire un verre de Calvados entre deux plats, véritable pause digestive qui s’est fait une renommée sur toutes les tables : mangeailles gargantuesques, repas gastronomiques ou dîner familial.

Ses ORIGINES sont controversées mais l’appellation « made in Normandie » a su s’imposer et traverser les siècles et les mers ! C’est le fameux Sieur de Gouberville qui en 1553, dans son château du Mesnil-au-Val, a distillé son cidre pour en faire une eau-de-vie, élixir base du « trou normand » qui trouve sa place dès le XIXe siècle lors des repas, en témoignent certains écrits comme Bouvard et Pécuchet de Gustave Flaubert (1881) ;

Ses VERTUS : Les Normands confèrent à leur breuvage des qualités thérapeutiques, permettant de « stimuler l’estomac en créant une sensation de vide afin de continuer à manger sans effet de satiété et de brûler les graisses !

Le CÉRÉMONIAL (hymne de J. Bauny)

« Ami lève ton verre, car voici le moment, sans trait et sans manière, Calvados, pure eau-de-vie, tu nous aides à digérer et dans notre confrérie, tu as l’âme des chevaliers à faire le Trou Normand » et… la Confrérie du Trou Normand, c’est du sérieux ! créée en 1997, son objectif est de promouvoir la qualité des produits cidricoles normands, et compte plusieurs milliers de chevaliers dans le monde dont la devise est « Bois peu mais Bon ».

Et aujourd’hui… Le Calvados est souvent accompagné d’un sorbet à la pomme et se sert après le plat de résistance et il est inutile de jeter son verre derrière son épaule comme Louis de Funès dans La Zizanie après avoir fait découvrir à des industriels japonais cette tradition : « Trou normand, vieille coutume française, comme Hara-kiri, vieille coutume japonaise ».

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