JLE

Dermato Mag

MENU

Gratin de cardons à la moelle Volume 7, numéro 4, Octobre-Novembre-Décembre 2019

Un incontournable de la table lyonnaise. Considéré comme un mets délicieux au temps des Romains, il est mentionné à Lyon par l’agronome Olivier de Serres au XVIsiècle, ce légume ayant apparu au menu d’un banquet officiel à l’Hôtel de Ville en 1548 ; très consommé jusqu’au XIXsiècle, le cardon est maintenant relégué au club des légumes oubliés.

Ses origines

Le bassin méditerranéen où il vit à l’état sauvage. Ce sont les Romains qui en font les premières cultures, en Italie puis en France dans la région lyonnaise. Dioscotide (Ier siècle après JC), médecin et apothicaire grec, père de la pharmacologie dans son livre « De materia medica », mentionne ces cultures près de Carthage et Pline l’Ancien, à la même époque, décrit une culture de luxe près de Carthage, très rémunératrice, « sestercium sena milia e parvis reddere a cru », véritable « parade » monstrueuse de la nature pour la gourmandise humaine tournée vers la jouissance ! Mais il souligne aussi ses vertus médicinales axées sur le tube digestif (« Naturalis historia » livre 19, chapitre 43 « De cardeis »).

Ses vertus médicinales

De la famille des Astéracées, et de la tribu des Cynarées, (plantes à rosette pénétrante), il contient des phytonutriments, des vitamines et des sels minéraux : riche en vitamine C, en fibres, en potassium, cuivre, manganèse, sélénium, zinc, fer et magnésium.

En flavonoïdes aussi, piégeurs de radicaux libres : lutioline, silymarine, et surtout la cynarine ou acide décaféylquinique, composé amer de la feuille, aux vertus digestives sur l’axe hépato-biliaire (cf. une étude sur des patients porteurs d’hépatite C publiée dans le JAMA du 18 juillet 2012 qui comparait sylimarine et interféron) et hypoclestérolémiantes, ce qui en fait un légume de fête et. d’après-fête !

Sa culture

Elle a fait de Vaulx-en-Velin sa capitale. Sur les alluvions du vieux Rhône, le sol est argileux et sablonneux, grâce au limon drainé par les anciennes crues, essentiel pour une plante qui va chercher l’eau profondément grâce à son pivot racinaire (rosette pénétrante) atteignant 1,80 mètre sous terre à maturité. Une poignée d’agriculteurs maintiennent cette tradition : on sème le cardon autour du 15 mai pour l’éclaircie à la mi-juillet ; à partir du 15 août, il faut l’irriguer car il accomplit sa croissance et passe de 20 cm à 1,80 m en un mois ; à la mi-septembre, on procède à l’empaillage (enveloppement de la plante pour l’abriter de la lumière afin de préserver la blancheur de ses côtes sinon elle sera dure et amère) ; à la mi-octobre c’est l’arrachage, physiquement éprouvant. Le cardon de Vaulx-en-Velin a été mis en valeur par une Confrérie en 1993 et chaque année, le 8 décembre, la ville fête son légume-roi autour d’un gratin de cardons géant… après séance d’épluchage !

La recette en hommage à Paul Bocuse

Prévoir des gants car le cardon est mal-aimé des cuisinières qui l’accusent de piquer et noircir leurs mains.

Prévoir pour 6 personnes :

  • 1 cardon bien blanc de 1,3 kg environ ;
  • 200 g de moelle de bœuf (2 os) ;
  • 20 g de beurre ;
  • 3 cuillères à soupe de farine ;
  • un litre de bouillon de bœuf ;
  • 50 g de gruyère râpé
  • 1 citron, sel et poivre.

Méthode :

Éplucher le cardon en retirant le gros fil central et le détailler en bâtonnets de 3 cm ; les laver puis les cuire dans un blanc composé de 3 litres d’eau dans laquelle on aura ajouté une cuillère de farine préalablement délayée dans de l’eau, un jus de citron et 20 g de sel.

Chauffer 20 g de beurre dans une casserole ; ajouter rapidement la farine restante et faire un roux blond ; y verser un litre de bouillon de bœuf rapidement ; bien mélanger au fouet et laisser cuire 20 minutes à petit feu ; vérifier l’assaisonnement.

Égoutter les cardons cuits et les mélanger à la sauce ; les mettre dans un plat à gratin beurré.

Faire pocher les os (10 minutes environ) et retirer la moelle ; la couper en lamelles et la disposer sur les cardons ; semer de gruyère râpé l’ensemble avant de faire gratiner au four à 180̊ pendant 20 minutes environ.

Avec ce plat un vin blanc assez corsé (Beaujolais, Mâcon ou Bourgogne).

Mes sources

Abraham B, Lhomme V. Légumes et Fruits d’antan. Editions Larousse, 2011.

Terrier Robert V. L’Histoire de nos plats. Editions Bachès, 2011.

Salmon R. Dégustation : le secret bien gardé du cardon. le parisien.fr, 13 décembre 2013.

Les meilleures recettes des bouchons lyonnais. tribune de lyon.fr, 6 novembre 2011.

Licence Cette œuvre est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International