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Bulletin du Cancer

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Comment considérer le cancer ? Implications pour le risque dû aux rayonnements ionisants Volume 92, numéro 11, Novembre 2005

Auteur
Commissariat à l’énergie atomique, 31, rue de la Fédération, 75752 Paris Cedex 15

Les cancers radio-induits ne présentent pas de spécificité particulière ni de signature génétique marquante, excepté un nombre élevé de multidélétions. Leur étude doit donc s’intégrer dans le processus de réflexion portant sur la biologie du cancer au sens large. Un hiatus existe toujours entre les faits initiaux tels que les altérations assez bien identifiées du génome et l’apparition ultérieure d’un clone cellulaire présentant les caractéristiques du cancer. Les étapes intermédiaires sont en général décrites comme des accumulations de mutations et de modifications épigénétiques favorables à un moment donné au phénotype cancéreux. Mais il n’y a pas pour le moment de modèle clair et compréhensible sur ces étapes de la cancérisation. Il est fort possible que les causes spécifiques (tabac, alcool, rayonnements, toxiques chimiques) qui produisent des anomalies initiales différentes conduisent ensuite à (ou accélèrent l’entrée dans) une voie commune avec celle formée par l’accumulation d’altérations cancérigènes dues au vieillissement. L’instabilité du génome est sans doute un facteur déterminant de la dérive qui conduit à la transformation maligne. On postule que seules seraient cancérisables les cellules ayant une activité télomérase forte et une activité apoptotique faible. L’hypothèse est que le cancer résulte d’une reprogrammation du génome de ces cellules par suite d’une pression mitotique d’origine oncogénique induisant une perte de l’asservissement à la différenciation. On propose de dénommer désapoptose, par opposition à l’apoptose qui est la mort programmée, le processus ultime par lequel la cellule perd ses propriétés tissulaires. L’activation oncogénique peut se propager à des gènes primordiaux du développement avec émergence d’un subnoyau à activité tumorale. Ce sont probablement les études biomoléculaires du développement embryonnaire et de la reprogrammation du génome qui permettront de progresser dans la compréhension des mécanismes du cancer.