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Pathologies

Maladies de la civilisation

YearBook 2018

Anne Perrin

Consultante « Risques, science et société » ; Experte rayonnements non ionisants et santé (RNI) ; Vice-présidente de la section RNI de la Société française de radioprotection (SFRP)

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Synthèse publiée le : 28/05/2018

SYNTHESE : Hypersensibilité électromagnétique

En 2004, l’OMS a classé l’hypersensibilité électromagnétique dans la famille des Intolérances environnementales idiopathiques (IEI), c’est-à-dire sans explication ni cause connue [1]. Si les symptômes génèrent une souffrance qui peut conduire à un grave handicap, notamment du fait des conduites d’évitement et à l’isolement social qui en résulte, à ce jour aucun lien de causalité n’a été établi entre l'exposition aux champs électromagnétiques ambiants et les troubles ressentis [2,3].

 

Contexte

L’hypersensibilité électromagnétique (EHS) se manifeste par un ensemble de symptômes de nature et d’intensité variables d’un individu à l’autre, et rapporté aux champs électromagnétiques (CEM) ambiants. Ils relèvent principalement des radiofréquences utilisées dans les technologies de communication sans fil récentes (Wi-Fi, téléphonie mobile, etc.), dites hautes fréquences, et des équipements émettant dans d’autres gammes de fréquences, notamment les champs électriques et magnétiques basses fréquences liées à la production, au transport et à l’utilisation de l’électricité, mesurables à proximité des lignes à haute tension, câbles et tout appareil électrique ; c’est aussi le cas des compteurs communicants Linky.

Les symptômes ressentis sont sans rapport avec les effets connus de ces rayonnements, qui surviennent au-delà des niveaux d’exposition autorisés (échauffement à haute fréquence, stimulation des tissus excitables et courants induits à basse fréquence).

Les symptômes attribués aux ondes électromagnétiques sont de même nature que ceux attribués aux éoliennes, aux produits chimiques, au bruit, à l’air ambiant (syndrome des bâtiments malsains), aux implants et amalgames dentaires, à la maladie de Lyme dite chronique, au syndrome de la guerre du Golfe, etc. Ils se rapprochent souvent des manifestations de la fibromyalgie ou du syndrome de fatigue chronique [4]. Le cumul de plusieurs IEI est fréquent ; une étude menée en Suède montre par exemple que 58 % des personnes souffrant d’hypersensibilité électromagnétique (EHS) rapportent également un autre type d’IEI, et 27 % en rapportent au moins deux en plus de l’intolérance attribuée aux CEM (IEI-CEM) [5].

Quelques particularités cliniques doivent être mises en exergue :

  • les symptômes sont subjectifs (maux de tête, fatigue, etc.) et l’examen des sujets ne permet pas de retrouver de signe physiologique ou biologique objectif permettant d’établir un diagnostic  ;
  • quand le bilan médical initial ne met pas en évidence de dysfonctionnements, l’évolution ne fait apparaître aucune pathologie méconnue, après quelques mois, voire années. En revanche, il arrive qu’une pathologie connue soit diagnostiquée tardivement et explique l’origine des troubles ;
  • il est possible d’induire l’apparition de symptômes similaires chez des personnes sans a priori sur les effets des ondes en leur faisant croire qu’elles sont exposées, surtout si l’on a pris soin, au préalable, de leur dresser un tableau effrayant des effets des ondes [6-8]. Cet effet est commun avec d’autres types d’intolérances environnementales, liées à la pollution chimique par exemple (MCS) [9], et permet un processus de « contagion ».

Notons à l’inverse que des informations rassurantes peuvent réduire l’apparition de symptômes chez des personnes qui en éprouvent lorsque qu’elles sont exposées à la source incriminée [10]. L’analyse du profil psychologique des sujets volontaires montre une plus forte tendance à la somatisation chez ceux qui attribuent des symptômes aux ondes électromagnétiques, ainsi qu’une plus grande attention vis-à-vis des facteurs environnementaux et une tendance accrue à l’anxiété. 

 

Que dit la recherche ?

Des recherches sur les IEI sont conduites au niveau international depuis les années 1980. Elles visent à en connaître la prévalence et la population concernée, à rechercher des spécificités ou la présence de marqueurs diagnostics, et à comprendre les processus cognitifs associés. Le test de référence est l’étude de provocation destinée à tester la sensibilité de volontaires et leurs réactions lors d’expositions en conditions contrôlées. D’autres travaux s’intéressent aux modalités de prise en charge au plan thérapeutique et aux dimensions sociologiques de la question.

Sans faire une analyse exhaustive de la littérature, nous allons balayer un ensemble de travaux produits durant l’année 2017, en lien avec l’hypersensibilité électromagnétique, et qui ont contribué à apporter des éclairages nouveaux.

 

Études de provocation

Les études de provocation conduites en laboratoire n’ont pas permis d’apporter de preuve d’un lien de causalité entre les symptômes et la présence d’ondes électromagnétiques.

Dans l'optique de tester la sensibilité des personnes au plus près des conditions de vie réelles, un système portatif a été mis au point afin de réaliser des tests de provocation en double aveugle au domicile de personnes EHS, dans des conditions d’exposition personnalisées (durée, intensité, basses fréquences ou radiofréquencestype téléphonie mobile, Wi-Fi, DECT) [11]. En plus du test de sensibilité, s’ajoutait une autre dimension visant à apprécier si les sujets pouvaient reconsidérer leur conviction en cas d’échec à détecter la présence du champ. En 2017 [12], 42 volontaires EHS ont été inclus, majoritairement des femmes (âge moyen 55 ans). Dans un premier temps, les signaux et conditions choisis par la personne ont été testés en exposition non cachée (ON et OFF) ; 2 sujets ne réagissant pas à l’exposition n’ont pas été inclus dans l’étude. À l’issue de 10 tests en double aveugle, aucun des participants ne s’est avéré capable de distinguer si le champ était présent ou pas. En revanche, juste après les tests, une partie d’entre eux qui ressentaient moins de symptômes en sont venus à douter de leur hypersensibilité (ce qui avait déjà été observé dans d’autres études de provocations [13-14]). Toutefois, ces doutes se sont dissipés dans les mois qui ont suivi.

Une étude similaire, où l’émetteur permettait une exposition à radiofréquences de type téléphonie ou Wi-Fi, a fourni des résultats comparables : la sévérité des symptômes ressentis restait inchangée que l’appareil soit en marche ou pas [15].

 

Point de vue des médecins généralistes et des professionnels de santé en milieu du travail

Slottje et al. ont centré leur travail sur des professionnels de santé aux Pays-Bas [16].Le questionnaire était soumis à 478 hygiénistes, 1 665 médecins du travail et 8 462 médecins généralistes. Environ un tiers d’entre eux est consulté par des patients qui attribuent des symptômes à l'exposition aux CEM. Dans la majorité des cas, il en résulte des absences fréquentes ou prolongées, notamment pour les cas rapportés par les médecins du travail. L’existence d’une relation causale entre une exposition aux CEM et les plaintes étaient considérée comme plausible par 18 à 37 % des professionnels interrogés, les conduisant à donner des conseils de réduction de l'exposition, y compris des recommandations pour changer de lieu de travail, d'emploi ou de lieu de résidence.

La majorité des répondants ayant déclaré manquer d’information sur le sujet (72 %), les auteurs préconisent des campagnes d’information ciblées pour les aider à aborder le sujet avec une approche fondée sur la preuve. Ces résultats sont cohérents avec ceux des études publiées antérieurement auprès des médecins généralistes en Suisse [17], en Allemagne [18], en Autriche [19] et en France [20].

Notons au passage qu’en France, cette enquête montrait qu’un tiers d’entre eux estimait que des personnes étaient capables de détecter de faibles niveaux de CEM, un tiers pensait le contraire et le tiers restant n’avait pas d’opinion [20].

 

L’hypersensibilité électromagnétique en France : ni exception, ni paradoxe français

Andrianome et al. [21] ont réalisé une enquête à l’aide d’un questionnaire à des volontaires recrutés, en France, par Internet, bouche à oreille ou par l’intermédiaire d’associations et collectifs concernés. Sur 82 personnes, 52 ont répondu, parmi lesquels 30 membres d'associations regroupant des personnes EHS. Les femmes représentaient 79 % du panel ; 92 % des participants avaient un niveau d'éducation élevé (diplôme d'études secondaires ou supérieur). Des allergies alimentaires et diverses indispositions ont été rapportées, liées à d’autres facteurs environnementaux : fumée de cigarette (37 %), gaz d'échappement (35 %), air étouffant (37 %), décharges électrostatiques (35 %), odeurs de la rue (31 %), température basse (29 %) et parfums (29 %).

Sur 77 symptômes répertoriés dans l’étude, les troubles jugés les plus intenses sont, par ordre décroissant : fatigue et épuisement, troubles du sommeil, maux de tête et acouphènes, stress, difficulté de concentration, sensibilité au bruit, anxiété, douleurs auriculaires et picotements au niveau des mains, la migraine étant le plus fréquemment cité. La symptomatologie est la même pour les hommes et les femmes. En revanche, les auteurs notent une différence significative entre les répondants issus d’associations et ceux qui n’en font pas partie qui manifestent moins de symptômes.

Concernant les sources incriminées ou suspectées, les systèmes de communications sans fil arrivent en tête sans que la moitié des répondants ne soit en mesure de citer une source particulière parmi les 22 propositions du questionnaire. Des appareils ont été cités en plus (convecteurs, les véhicules à moteurs, les systèmes de surveillance, les câbles électriques, etc.) parmi lesquels certains appareils qui n’émettent pas d’ondes. Les participants disent ressentir des symptômes, soit dès qu’ils sont exposés ou en quelques minutes, voire plusieurs heures après, et ceux-ci mettent quelques heures à plusieurs jours à se dissiper. La majorité d’entre eux a consulté un médecin généraliste ou un spécialiste sans trouver satisfaction. Les approches en psychologie comportementale et cognitive préconisées rencontrent peu de succès auprès des personnes EHS qui adoptent plutôt une attitude d’évitement des sources d’exposition ou de réduction des niveaux expositions et font appel à des médecines alternatives.

 

Physiologie, métabolisme et recherche de biomarqueurs

En 2017, le travail d’Andrianome et al. [22] montre, parmi un ensemble de paramètres biologiques mesurés, un taux d’alpha-amylase salivaire (sAA) significativement plus élevé, ainsi qu’un lien entre la durée de l’hypersensibilité (depuis sa découverte par le patient) et les niveaux de néoptérine (marqueur d’inflammation) et de sAA. Il pourrait s’agir d’une activation de système médullosurrénalien sympathique, mais aucune variation n’a été observée pour les paramètres du système immunitaire, de l'activité sympathique et du rythme circadien.

Un second travail de cette équipe porte sur l’étude des variations du système nerveux autonome [23]. Globalement, l’exposition à la radiofréquence n’a pas eu d’effet sur les paramètres étudiés (paramètres du système cardiovasculaire, conductance cutanée, réponse électrodermale générée par des signaux auditifs). La seule différence significative observée est une plus forte réactivité aux stimuli auditifs chez les sujets EHS par rapport aux témoins.

Cette équipe, dirigée par B. Selmaoui, avait également conduit une étude comparative sur la qualité du sommeil (évaluation subjective par questionnaire) et la concentration de mélatonine dans la salive et son principal métabolite 6-sulfatoxymélatonine dans l'urine [24]. Les résultats ont montré une moins bonne qualité de sommeil chez les sujets EHS, mais aucune différence significative entre les groupes pour les métabolites analysés.

 

Vers une approche intégrée de la problématique de l’hypersensibilité électromagnétique

Perception du risque et représentations mentales

Dans la littérature sur les syndromes médicalement inexpliqués, notons deux articles d’une même équipe, publiés en 2017 [25-27], sur l’attention portée aux sensations du corps, dont une revue indiquant qu’il s’agirait plutôt d’une amplification de la perception des menaces pour l’intégrité du corps que la seule amplification des événements corporels perçus ou réels, processus favorisant en corollaire l’attribution de troubles inexpliqués à des facteurs environnementaux et le développement d’inquiétudes pour la santé contemporaines (modern health worries).

Parmi les productions 2017, la thèse de doctorat en sociologie de M. Dieudonné s’intéresse aux représentations mentales des individus s’estimant hypersensibles à l’environnement (chimique ou électromagnétique) [28]. Un premier volet analyse les controverses autour des hypersensibilités environnementales et constate leur faible niveau de reconnaissance, due notamment aux difficultés rencontrées pour les objectiver. Dans le second volet sont présentés les résultats d’une enquête qualitative afin d’étudier le vécu, le parcours et le fonctionnement cognitif des personnes concernées [29, 30]. Selon l’auteur, leur conviction d’être hypersensible apparait à l’issue d’un processus décliné en 7 étapes, où des symptômes invalidants et inexpliqués, existant parfois de longue date, prennent soudain sens grâce à une émission de radio, un article de presse ou une conversation avec des proches relatant des effets néfastes des ondes. S’ensuivent des périodes de doute, puis de renforcement de la conviction que les ondes sont bien la cause des maux, recouvrant un véritable processus d’apprentissage.

L’effet nocebo est susceptible de jouer un rôle amplificateur mais non déclencheur. Dans le troisième volet, ces résultats sont analysés dans une perspective sociocognitive afin d’expliquer l’apparition et le maintien de la conviction d’être hypersensible. Le diagnostic d’EHS présente des avantages variés, liés notamment à la maîtrise et à la prévisibilité des symptômes, qui en compensent partiellement les coûts (contraintes quotidiennes, solitude, coût financier…). Il postule ensuite l’existence d’un phénomène d’engagement, rendant difficile de renoncer à ce diagnostic lorsque ses plus graves inconvénients se révèlent, ou même face à une amélioration objective de l’état de santé. Les personnes hypersensibles ne sont pas « irrationnelles », même si leur conviction présente une dimension aliénante. La question reste ouverte de savoir si leur situation s’améliorerait en cessant de se considérer hypersensibles. En conclusion, l’auteur suggère de rapprocher l’EHS d’autres syndromes médicalement inexpliqués, comme la fibromyalgie qui font l’objet de dynamiques sociales identiques, orientées vers la reconnaissance de souffrances insaisissables pour la médecine (par l’intermédiaire des catégories qui les désignent). Le caractère épidémique de la propagation de l’EHS est également analysé.

Psychologie scientifique et symptômes médicalement inexpliqués

Enfin, il semble intéressant de signaler deux analyses, fondées sur une importante revue de littérature, produites par quatre spécialistes en psychologie scientifique belges, anglais et allemand. L’une porte sur les possibilités d’une approche nouvelle des syndromes médicalement inexpliqués, l’autre s’intéresse plus particulièrement aux IEI [31, 32].

Dans la première [31], les auteurs réfléchissent à un nouveau modèle de perception des symptômes pouvant transcender la distinction entre « expliqués » et « non expliqués » partant du fait que la relation entre l’expérience de symptômes physiques et les indicateurs physiologiques objectifs d’un dysfonctionnement est variable selon les individus et le contexte. Le diagnostic médical repose sur le principe que des symptômes physiques réels ont des causes physiologiques, permettant de remonter à des problèmes dont la résolution vise à réduire ou faire disparaître les symptômes. Cependant, cette approche échoue dans le cas des symptômes médicalement inexpliqués pour lesquels aucun dysfonctionnement n’est trouvé. Ils rappellent que des symptômes médicalement inexpliqués par une maladie organique sont ressentis par une large majorité de la population et représentent une proportion importante des motifs de consultations auprès des médecins généralistes, ainsi qu’un budget considérable en matière de dépenses de santé.

D’après les auteurs, la division des systèmes médicaux occidentaux en disciplines de santé « physique » ou « mentale » sont sans doute à l'origine de la plupart des controverses autour des symptômes médicalement inexpliqués. Le rôle des facteurs psychologiques dans la perception des symptômes a été clairement documenté. Les facteurs tels que les croyances, les attributions, les états émotionnels et l'attention modulent la relation entre le dysfonctionnement physiologique et les rapports de symptômes, mais remettent rarement en question l'hypothèse de base du modèle de la maladie. D’après les données analysées, la prise de conscience des symptômes passe par un processus de tests d'hypothèses automatiques et inconscients qui prend appui sur les prédictions issues d’expériences passées et ceci est variable selon les individus (présent, historique…), leur intéroception (capacité à percevoir des variations internes au corps) et selon le contexte.

En intégrant de nombreuses données issues des recherches et des théories scientifiques, ce travail de synthèse sur la perception et la façon dont des symptômes en viennent à être perçus ouvre des perspectives sur des outils de diagnostic et des pistes pour prendre en charge les symptômes médicalement inexpliqués, notamment par des approches comportementales et cognitives. Se dessine aussi un vaste champ de recherche scientifique sur la perception, les facteurs qui y contribuent et ceux qui l’influencent, et sur ce qui permet de discerner les sensations liées à un disfonctionnement physiologique du « bruit de fond ».

Dans la seconde publication [32], les auteurs passent en revue les connaissances sur les IEI attribuées aux substances chimiques (MCS), aux CEM et aux sources d’infrasons et de vibration sonore, typiquement les éoliennes. Landgrebbe et al. [33] montrent en IRM fonctionnelle qu’une exposition simulée à un champ électromagnétique entraine une activité accrue dans les mêmes zones cérébrales que la stimulation nociceptive réelle chez des sujets EHS, effet également observé chez des sujets MCS avec une exposition également simulée. Des effets métaboliques cérébraux peuvent donc être générés par la signification et le caractère déplaisant des stimuli, même en leur absence. Suivant leur approche, les auteurs conceptualisent la perception des symptômes en tant que processus actif qui dépend fortement des expériences antérieures, des attentes et du contexte. Des comportements de contrôle, tels que des consultations médicales fréquentes et des comportements d'évitement qui renforcent la conviction d’une attribution causale sont déconseillés. En revanche, les auteurs suggèrent de développer des stratégies de prise en charge où le patient est actif et bénéficie d’une information lui permettant de s’impliquer. Par exemple, comme la perception causale est fortement influencée par ses propres actions, la provocation volontaire des symptômes en l'absence de déclencheurs environnementaux peut infirmer le fait qu’ils provoquent les symptômes. Inversement, l'exposition à des déclencheurs, en modulant les réactions par des techniques de respiration, peut également fournir des preuves utiles pour modifier les attributions causales a priori, et réduire les sensations négatives qui s’y rapportent.

 

Conclusion

L’hypersensibilité électromagnétique est une des composantes des intolérances environnementales idiopathiques, qui elles, s’insèrent dans le cadre des syndromes médicalement inexpliqués. Ces manifestations existent depuis très longtemps en prenant des formes et des appellations diverses selon les époques ; elles ne sont donc pas inconnues du corps médical, même si leur prise en charge est difficile. Toutefois, un effort particulier demeure nécessaire pour informer et former les médecins sur les IEI, notamment l’EHS.

L’évolution sociétale en est aussi un facteur important, liée tant aux modes de vie qu’à la multiplication d’alertes médiatiques et de fake news conduisant à une dramatisation et une attention exagérée pour certains risques, qu’ils soient avérés ou hypothétiques. Ceci parait coïncider avec une hypervigilance vis-à-vis des sensations corporelles. Il est possible que les préoccupations concernant la situation économique, sociale et politique visibles dans les sondages [34] confortent un sentiment d’insécurité. Autant d’éléments propices aux inquiétudes vis-à-vis de l’environnement et au développement d’un mal-être diffus centré sur la santé. Dans ce contexte, la définition de la santé comme « un état de complet bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité » telle qu’énoncée en préambule de la Constitution de l’OMS est particulièrement d’actualité [35].

Aborder l’ensemble des syndromes se rattachant aux IEI en vue d’une compréhension et d’une approche plus globale est une modalité prometteuse. Ceci favorise des regards croisés sur les données obtenues dans les différents domaines de recherche et pourrait permettre de prendre la mesure de l’ampleur du phénomène à l’échelle de la population ainsi que ses répercussions et les mesures à prendre, en termes de santé publique.

 

Liens d’intérêt en rapport avec le texte publié : aucun

 

Références

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