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Cahiers d'études et de recherches francophones / Santé

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Violences sexuelles à Brazzaville Volume 15, numéro 1, Janvier-Février-Mars 2005

Auteurs
Service Gynécologie-Obstétrique B, CHU Brazzaville, BP 32, Brazzaville Congo

Il s’agit d’une étude rétrospective sur six ans (1998-2003) qui a porté sur 102 personnes de sexe féminin, examinées dans le service sur réquisition à médecin par l’officier de police judiciaire. Les variables de l’étude étaient : les facteurs sociodémographiques de la victime et de l’agresseur (âge, profession, résidence) ; le lien entre la victime et l’agresseur ; le mode de viol ; les lésions occasionnées par le viol. Sur un total de 102 cas, nous avons observé un pic important en 1998 (35,5 %) et une baisse significative en 2003 (5,9 %). Toutes les tranches d’âge sont concernées avec une prédominance de 11 à 15 ans, soit 46,1 %, chez la victime, et de 21 à 25 ans, soit 37,3 %, chez l’agresseur. L’agresseur le plus âgé avait 56 ans et sa victime 11 ans alors que la victime la moins âgée avait 4 ans et 8 mois et son agresseur 14 ans. La violence sexuelle a été surtout le fait de personnes au niveau socio-économique bas, soit 86,3 %. La nature de la relation entre l’agresseur et la victime est variable. Dans 57,9 % des cas, l’agresseur était une personne déjà connue de la victime. Une tentative de corruption par l’argent a précédé le viol dans 40,2 % des cas et la contrainte physique a été utilisée d’emblée dans 47 % des cas. Le mode de viol couramment utilisé était la pénétration sexuelle, soit 80,4 % des cas, alors que la fellation et l’attouchement sexuel au doigt ne représentaient respectivement que 6,9 % et 12,7 % des cas. Une fillette de 11 ans a eu un délabrement vulvovaginal sans cloaque. Dans 15 cas (14,7 %), il a été relevé des infections génitales et dans 2 cas (2 %) une sérologie VIH positive. Sur le plan psychologique, deux jeunes filles présentaient un syndrome dépressif avec mutisme le jour de leur examen. La violence sexuelle est fréquente à Brazzaville. Cette étude, loin d’être exhaustive, permet cependant de se faire une idée de l’ampleur du phénomène. Les troubles sociopolitiques ont très probablement amplifié ce phénomène dans notre société. Même si les lésions physiques ont été rarement constatées, l’agression sexuelle occasionne un préjudice moral à vie et, avec l’avènement du VIH-sida, le risque de transmission du virus est potentiel. La paix et la sécurité représentent les premiers moyens de lutte contre ce fléau. L’éducation ciblée des agresseurs potentiels, notamment les hommes en arme, ne doit pas occulter les mesures répressives judiciaires prévues par la législation dans ce domaine.