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Cahiers d'études et de recherches francophones / Santé

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Représentations de la transmission mère-enfant du sida, perception du risque et messages d’information sanitaire au Burkina Faso Volume 9, numéro 3, Mai - Juin 1999

Auteur
Institut de recherche pour le développement (IRD), Laboratoire population environnement, Université de Provence, place Victor-Hugo, 13391 Marseille Cedex 3, France.
  • Page(s) : 195-9
  • Année de parution : 1999

Au Burkina Faso, en milieu rural mossi, les représentations populaires contemporaines de la transmission mère-enfant du VIH se fondent sur l’idée que « la maladie est dans le sang » et que le fœtus est conçu à partir du « mélange des sangs » des parents. Aussi, la contamination de l’enfant est jugée inévitable et systématique car elle aurait lieu in utero. Le lait maternel aurait le même pouvoir contaminant que le sang car « le lait, c’est du sang », mais son rôle dans la transmission est jugé secondaire puisque la contamination serait antérieure à la naissance. Cependant, l’allaitement est jugé responsable de la transmission de la maladie selon deux autres directions : un enfant sain pourrait être contaminé en tétant une femme malade ; une femme saine pourrait être contaminée en allaitant un enfant né de mère malade. Le caractère systématique de la transmission et la crainte de la contagion à partir de l’enfant conduisent la population à affirmer qu’aucun soin ne peut être accordé à un enfant né d’une femme malade du sida, qu’il faut l’abandonner et le laisser mourir. Ces représentations sont des constructions récentes élaborées par la population à partir des croyances préexistantes relatives à la physiologie et au rôle du sang dans la transmission des maladies, sur la base des informations sanitaires entendues. Les messages d’information sanitaire ont une responsabilité majeure dans l’élaboration de ces représentations. En effet, jusqu’à présent, leur description des modes de transmission du VIH reposait sur l’énoncé simplifié de la trilogie : sexe, sang, mère-enfant, sans jamais préciser la valeur des risques de transmission. Des lors, ces informations incomplètes, interprétées à partir des conceptions populaires de la contagion, conduisent à attribuer à chacun des modes de transmission une probabilité de transmission maximale. Les messages d’information sanitaire constituent la principale voie de diffusion d’une information scientifique auprès de la population. Les enjeux liés à la qualité et la justesse des informations diffusées sont donc majeurs. Les notions de risque de transmission et l’énoncé de leur valeur constituent une part essentielle du contenu des explications des modes de transmission du sida. Elles ne peuvent être passées sous silence car elle sont indispensables à une juste compréhension de la transmission et à une gestion raisonnée des prises de risque par les individus.