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Cahiers d'études et de recherches francophones / Santé

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Mesurer l’accessibilité financière aux médicaments : l’exemple du Sénégal Volume 15, numéro 1, Janvier-Février-Mars 2005

Auteurs
Consultant, 5, avenue Bartholoni, 74140 Sciez, Consultante, Institut de recherche pour le développement (IRD), Institut Santé et développement (ISD), 15, rue de l’École de médecine, 75006 Paris, Direction des Affaires internationales, 88, rue de la Faisanderie, 75016 Paris

Cet article présente les résultats obtenus en utilisant un outil original de mesure de l’accessibilité financière aux médicaments élaboré et testé dans le cadre d’une étude globale sur l’accès au médicament réalisée au Sénégal en 2001. La méthodologie suivie s’appuie sur l’identification de cinq pathologies traceuses et des traitements thérapeutiques correspondants et sur la détermination du montant théorique que chaque quintile de population peut consacrer à l’acquisition de ces traitements aux conditions du marché, sans détérioration de son statut économique (seuil d’accessibilité financière). Les résultats obtenus avec cette méthode sont comparés à ceux obtenus dans le cadre d’une enquête de terrain, réalisée auprès de 987 patients de 41 centres et postes de santé et de 51 pharmacies privées. Les principaux résultats obtenus montrent que la capacité financière de la population, mesurée par la technique des seuils d’accessibilité financière est faible (moins de 40 % des individus aux prix de la filière publique et un peu plus de 20 % à ceux de la filière privée) et que, même aux prix les plus bas du marché (secteur public), 20 à 60 % de la population n’ont pas accès aux traitements de maladies courantes. L’enquête de terrain montre par ailleurs que ces résultats sont aggravés par quatre facteurs externes : les dépenses monétaires induites (coût du transport, consultation…), le non-respect des prix licites du médicament, les pratiques de prescription et les pratiques de dispensation. Après intégration de ces coûts, l’accessibilité effective de la population aux coûts des traitements des pathologies traceuses n’est significative que pour moins de 20 % calculés aux prix de la filière publique et encore inférieure à ceux de la filière privée. Au-delà de la mesure statique de l’accessibilité financière aux médicaments, cet outil trouve son utilité dans deux autres domaines : d’une part, pour mettre en évidence les insuffisances des stratégies en faveur de pathologies cibles (incohérence entre la politique tarifaire et les priorités sanitaires) ; et d’autre part, pour permettre de mesurer à l’instant t 0 le niveau d’accessibilité financière des différents groupes socio-économiques et constater aux instants t 1, t 2… t n l’amélioration ou la dégradation de la situation observée à l’instant t 0, pour un groupe socio-économique donné ou pour un traitement donné.