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Cahiers d'études et de recherches francophones / Santé

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Le refus du dépistage VIH prénatal : étude de cas à Abidjan (Côte d’Ivoire) Volume 17, numéro 3, juillet-août-septembre 2007

Auteurs
IRD, UMR 151, 37, rue d’Amsterdam, 75008 Paris, France, ENSEA, Abidjan, Côte d’Ivoire, ADES/SSD, CNRS UMR 5185, université de Bordeaux-II, France

En Afrique, un des obstacles à la prévention de la transmission du VIH reste l’insuffisance du dépistage. La faible proportion de personnes connaissant leur statut sérologique, sur ce continent, tient en partie aux réticences des individus à effectuer cette démarche. Le développement à large échelle de la prévention de la transmission mère-enfant du VIH, rendu maintenant possible par l’existence de traitements peu coûteux et faciles à mettre en œuvre, va de pair avec le développement d’une proposition de dépistage VIH prénatal. Dans cet article, nous nous intéressons aux femmes qui refusent cette offre de dépistage en prénatal, à partir d’informations collectées dans un programme de recherche sur la prévention de la transmission du VIH de la mère à l’enfant, le programme Ditrame Plus mené à Abidjan entre 2001 et 2005. Trois groupes de femmes ont été suivis pendant 2 ans après une proposition de dépistage prénatal : 347 femmes infectées par le VIH, 393 femmes séronégatives pour le VIH, et 62 femmes ayant refusé d’être dépistées. Ces dernières avaient une nouvelle proposition de dépistage neuf mois après la grossesse. Des informations quantitatives ont été recueillies sur les caractéristiques sociodémographiques de ces femmes, et sur leur comportement sexuel et la communication sur les IST, le VIH et le dépistage avec leur partenaire masculin avant et après la grossesse. Des entretiens approfondis sur ces sujets ont été menés auprès de 15 femmes ayant refusé le dépistage. Le groupe des femmes qui ont refusé le dépistage a un profil sociodémographique très proche des femmes qui ont accepté le dépistage et qui sont séronégatives. Elles n’ont pas eu de comportements sexuels particulièrement à risque. Après la proposition de dépistage prénatal, on observe une augmentation de 23 % de la proportion de celles qui parlent des risques IST/VIH avec leur partenaire, et plus de 9 sur 10 suggèrent à ce dernier de se faire dépister. Une femme sur cinq a accepté le dépistage lorsqu’il a été reproposé dans le post-partum, cette acceptation étant très liée au dépistage du partenaire masculin (RR = 4,05 [1,55–10,58]). Cette étude montre, d’une part que le conseil et dépistage VIH proposés en prénatal sont bénéfiques pour améliorer la prévention, même lorsque le dépistage est refusé, et d’autre part que la démarche de dépistage requiert du temps, et le soutien du partenaire.