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Revue de neuropsychologie

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Le syndrome de Korsakoff revisité Volume 1, numéro 1, mars 2009

Auteurs
Unité U923, GIP Cyceron, Inserm – EPHE – université de Caen/Basse-Normandie, CHU Côte-de-Nacre, Caen, Department of Psychiatry and Behavioral Sciences, Stanford University School of Medicine, Stanford, États-Unis, Neuroscience Program, SRI International, Menlo Park, États-Unis, Service de neurologie, CHU Côte-de-Nacre, Caen

Le syndrome de Korsakoff (SK) est classiquement décrit comme un syndrome amnésique diencéphalique caractérisé par des troubles sévères de la mémoire épisodique, des déficits exécutifs et la préservation de la mémoire sémantique. Les travaux de recherche récents sur ce syndrome nous amènent à reconsidérer cette conception traditionnelle, notamment à la lumière des troubles que présentent les patients alcooliques sans complications neurologiques (AL). En effet, malgré la sévérité des troubles de mémoire épisodique dans le SK, le profil d’atteinte des différentes composantes de ce système mnésique est très proche de celui des AL, les performances des deux groupes se situant tout au long d’un continuum. De même, les troubles de la mémoire de travail, incluant à la fois une altération des systèmes esclaves et de l’administrateur central, sont présents dans ces deux affections. Le SK se caractérise également par une atteinte des capacités d’apprentissage de nouvelles connaissances sémantiques résultant d’un déficit per se de la mémoire sémantique et de l’utilisation d’un système d’apprentissage différent des sujets témoins, contournant l’implication de la mémoire épisodique et s’avérant par conséquent lent et peu efficace. Enfin, les travaux récents de neuro-imagerie ont montré que les atteintes cérébrales morphologiques et fonctionnelles des SK ne concernent pas seulement les thalami et les corps mamillaires, mais aussi les lobes temporaux internes, le cortex frontal, le cervelet, et surtout le cortex cingulaire. Ces altérations cérébrales ayant également été rapportées chez les patients AL, la notion de continuité pourrait s’appliquer aux effets de l’alcool non seulement sur certaines capacités mnésiques, mais aussi sur le cerveau. Pour conclure, même s’il semble nécessaire de revisiter la conception classique du SK au regard des résultats récents de la littérature, ce syndrome amnésique demeure un modèle d’étude remarquable de la mémoire humaine et de ses bases cérébrales.