JLE

Médecine thérapeutique / Pédiatrie

MENU

Utilisation de l'érythropoïétine dans l'anémie du prématuré Volume 4, numéro 4, Juillet - Août 2001

Auteurs
Néonatologie et Réanimation pédiatrique, Hôpital de Hautepierre, Hôpitaux Universitaires de Strasbourg, 67098 Strasbourg cedex, France.

A la naissance, le nouveau-né à terme se trouve en situation de polyglobulie, suite à l'hypoxie relative de la vie intra-utérine. L'oxygène étant largement disponible en période post-natale, cette polyglobulie n'a plus de raison d'être ; de ce fait, on observe chez les nouveau-nés à terme une chute progressive de la concentration d'hémoglobine dans le sang avec un minimum vers l'âge de 3 mois à une moyenne de 11,5 g/dl d'hémoglobine. Par la suite, on assiste à une lente remontée pour atteindre les chiffres adultes. Chez les prématurés la situation est quelque peu différente. Ils possèdent un stock d'hémoglobine moindre à la naissance, mais surtout, et cela concerne essentiellement le grand prématuré de moins de 33 semaines d'âge gestationnel, les prélèvements de sang en raison d'examens biologiques entraînent une chute plus rapide et plus profonde de la concentration d'hémoglobine. Enfin, la sécrétion d'érythropoïétine endogène est faible chez le prématuré lorsqu'on la compare à l'enfant à terme ou à l'enfant plus grand pour un même niveau d'anémie. De la sorte, l'anémie chez le prématuré est plus marquée et plus précoce que celle de l'enfant à terme et ce phénomène est d'autant plus marqué que l'enfant est plus immature. Pendant de nombreuses années la seule thérapeutique disponible était la transfusion de globules rouges. Un grand nombre de grands prématurés recevait de nombreuses transfusions (parfois supérieures à 10), de donneurs différents. Cette pratique a été fortement remise en cause surtout avec l'apparition du sida dans le risque transfusionnel, vers la fin des années 80. De ce fait, la possibilité d'utiliser l'érythropoïétine recombinante, disponible à partir de 1985, a été jugée très intéressante et étudiée chez le prématuré à la fin des années 80 et au début des années 90. Elle était justifiée par la démonstration que les cellules souches de la lignée érythroïde étaient d'une part présentes dans la moelle des prématurés, et d'autre part sensibles à l'action de l'érythropoïétine exogène, et par le fait qu'il semblait exister une insuffisance de sécrétion d'érythropoïétine endogène. Il est indéniable que le traitement par érythropoïétine diminue les besoins transfusionnels des enfants prématurés traités. Cependant, ces besoins ne sont la plupart du temps pas annulés, en particulier chez les enfants de très faible âge gestationnel. La question de la validité du traitement par érythropoïétine a été soulevée dans la mesure où on ne parvenait pas à annuler complètement les besoins transfusionnels, sachant que, dans la plupart des cas, on utilisait un seul donneur par enfant. En fait, chez un certain nombre d'enfants, les besoins transfusionnels persistent encore au cours du deuxième mois. Il n'est donc plus possible d'utiliser un seul donneur : l'érythropoïétine pourrait au moins éviter le recours à un deuxième donneur. D'autre part, un certain nombre d'enfants traités ne reçoivent aucune transfusion grâce à leur traitement. Le traitement par érythropoïétine dans le but de diminuer l'exposition au sang reste donc à notre avis justifié. A notre sens, il est indiqué pour les enfants < à 30 semaines < 1000 g car les enfants plus matures sont rarement transfusés. Il est par ailleurs vraisemblable qu'avec l'amélioration de la prise en charge des grands prématurés et les progrès dans les techniques de soins, associés à une rationalisation de la prescription des transfusions, les besoins transfusionnels de ces enfants vont diminuer, rendant ainsi l'effet de l'érythropoïétine moins évident. En tout cas, un suivi à long terme des enfants traités reste indispensable.