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Médecine de la Reproduction

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Les follicules ovariens de jeunes patientes turnériennes contiennent des ovocytes normaux mais des cellules granuleuses monosomiques 45,X Volume 21, numéro 4, Octobre-Novembre-Décembre 2019

Tableaux

La question que se posent Ronald Peek et al. est simple : quel est le contenu en chromosome X des cellules ovariennes (ovocytes et granulosa des follicules primordiaux et des petits follicules primaires, cellules stromales) chez de jeunes patientes turnériennes ?

Le syndrome de Turner, monosomie complète ou partielle pour le chromosome X, atteint une fille sur 2 500 à la naissance [1]. La conséquence, outre des anomalies phénotypiques caractéristiques et des malformations cardiaques et rénales, en est une infertilité plus ou moins complète que l’on attribue à une apoptose accélérée des cellules germinales et à une folliculogenèse altérée durant la vie fœtale, réduisant considérablement le pool folliculaire disponible [2]. Cette déplétion ovocytaire est cependant variable et la fonction ovarienne résiduelle, après la naissance, dépendrait du pourcentage de cellules 46,XX encore présentes dans les ovaires [3].

La perte ovocytaire se poursuit en postnatal et, dans la population générale, les femmes ne conserveront à la puberté que 400 000 des 2 millions d’ovocytes existant à la naissance (Baker, 1963). Dans le syndrome de Turner, déplétion pré- et postnatales se conjuguent pour aboutir à une insuffisance ovarienne dans plus de 80 % des cas [4]1. Pour tenter de conserver la fertilité de ces patientes, il faudrait donc agir en période prépubertaire et congeler du tissu ovarien (OTC, pour ovarian tissu cryopreservation) contenant encore suffisamment de follicules primordiaux [5]. Cela se fait déjà dans plusieurs pays comme la Suède [6,7], le Québec [8], le Royaume-Uni [9], l’Allemagne, la Suisse et l’Autriche [10]. Aucune naissance après transplantation de tissu ovarien chez une femme turnérienne n’a cependant été encore rapportée [11]. Il est donc important de documenter l’efficacité de l’OTC dans ce groupe de patientes et, en particulier, la fonctionnalité des follicules préservés qui pourrait dépendre, entre autres, de leur pourcentage en cellules 46,XX, indispensables à une croissance normale. L’objectif de l’étude de l’équipe néerlandaise de Peek et al. est de réaliser cette évaluation.

Matériel et méthodes

Patientes

Ce sont dix filles de 2 à 17 ans, recrutées de janvier à octobre 2018 aux Pays-Bas, dans le cadre d’un essai clinique national visant à évaluer les différents aspects de la préservation de la fertilité dans cette pathologie (NCT03381300). Elles étaient diagnostiquées comme présentant un syndrome de Turner (ST) avec anomalies de nombre du chromosome X (45,X ou 47,XXX). En effet, bien que des anomalies de structure soient également observées dans le ST (isochromosome X, chromosome X en anneau, délétions ou translocations, etc.), leur analyse n’est pas possible par hybridation in situ en fluorescence (FISH) avec les sondes centromériques utilisées dans cette étude, et l’utilisation de sondes spécifiques ciblées serait difficile sur les ovocytes des follicules primordiaux et primaires bloqués en méiose I, d’où cette restriction dans le recrutement. Le tissu ovarien normal, utilisé comme témoin, provient de deux hommes transgenre ayant subi une intervention chirurgicale de réassignation sexuelle.

Toutes les patientes et/ou leurs parents ont bien entendu signé un consentement éclairé et l’étude a été approuvée par le comité central néerlandais concernant la recherche impliquant des êtres humains.

Recueil du tissu cortical ovarien et quantification de son contenu en follicules

Après ovariectomie, la gonade est transportée au laboratoire dans un milieu froid et manipulée sur une surface prérefroidie à 4 ̊C. Le cortex est isolé puis découpé en fragments de 5 × 8 mm qui sont cryopréservés [12]. Un seul fragment est conservé pour la recherche et divisé en deux parties dont l’une servira à l’isolement des petits follicules et des cellules stromales, l’autre étant réservé à l’analyse histologique. Cette dernière est réalisée sur coupes de 4 μm d’épaisseur colorées à l’hématoxyline éosine tous les 24 μm afin de ne passer à côté d’aucun follicule primordial ou d’un petit follicule primaire, d’un diamètre de 45 μm environ. La faible densité en follicules permet d’éviter de compter plusieurs fois le même follicule, sans avoir besoin pour cela de colorer toutes les sections. La densité est exprimée en nombre de follicules par millimètre cubede tissu cortical.

Dissociation du tissu cortical ovarien et séparation des différents composants cellulaires avant hybridation in situ en fluorescence

L’isolement des petits follicules et des cellules stromales comprend plusieurs modifications par rapport aux techniques déjà décrites [13, 14]. L’autre partie du fragment cortical dévolu à la recherche est subdivisée en cubes de 1 mm de côté qui sont soumis pendant 75 min à une digestion enzymatique à 37 ̊C (libérase DH 0,1 mg/mL, ADNase I 10 μg/mL et collagénase I 1 mg/mL). Après lavage par centrifugation, la suspension cellulaire est examinée sous loupe binoculaire. Elle comprend principalement des cellules stromales isolées et des petits follicules (< 50 μm), s’il y en a. Lorsque l’analyse histologique a conclu à l’absence de follicules, la suspension est utilisée directement pour l’analyse par FISH des cellules stromales. Lorsqu’il y a des petits follicules (< 50 μm), ils sont pipetés manuellement et transférés dans un milieu enrichi en sérum de veau fœtal pour éviter leur agrégation. Les cellules stromales restantes sont récupérées pour l’analyse par FISH, à partir de la suspension, en ayant soin de ne prélever aucun follicule résiduel. Follicules et cellules stromales sont transférés dans des gouttelettes (0,04 mM KCl) sur des lames distinctes et incubés 20 min à 37 ̊C avant séchage et fixation.

Analyses génétiques

  • L’analyse du contenu en chromosome X des cellules extra-ovariennes : lymphocytes (trente cellules), cellules buccales (100 cellules) et urinaires (100 cellules) se fait par FISH, selon le protocole déjà décrit pour les cellules buccales [15], en utilisant des sondes centromériques pour les chromosomes X (spot vert) et 18 (spot rouge). Les signaux pour le chromosome X ne sont évalués dans ces cellules somatiques que lorsque deux signaux sont visibles pour le chromosome 18. La détermination du pourcentage des différentes lignées se fait par caryotype classique des lymphocytes.
  • L’analyse par FISH des cellules stromales (100) suit le protocole sus-décrit.
  • L’analyse par FISH du contenu en chromosome X des ovocytes (n > 40) et cellules granuleuses (n > 100) nécessitera deux adaptations du protocole.
  • Traitement enzymatique : tout d’abord, un traitement enzymatique supplémentaire des follicules isolés est nécessaire, qui comprend leur exposition à une solution de 0,06 % de trypsine, 1 mg/mL d’EDTA, et 1 mg/mL de glucose pendant 20 min à 37 ̊C. On obtient ainsi un meilleur étalement des cellules granuleuses autour de l’ovocyte, et une meilleure individualisation de leurs noyaux qui, de plus, ne recouvrent plus celui de l’ovocyte – ce qui facilite l’analyse par FISH. De plus, la contre-coloration par le 4’,6-diamidino-2-phénylindole (DAPI) permet de distinguer l’ADN contre-coloré du noyau ovocytaire, plus diffus, de celui des noyaux des cellules granuleuses.

Ensuite, l’analyse par FISH du contenu en chromosomes X des ovocytes est beaucoup plus difficile que celle des cellules diploïdes somatiques ovariennes (granuleuses et stromales) où il suffit de compter le nombre de spots colorés correspondant à chaque chromosome. Les ovocytes des petits follicules sont bloqués en fin de la prophase I méiotique et sont donc tétraploïdes. À ce stade, a eu lieu l’appariement des chromosomes homologues, paternel et maternel constitués chacun de deux chromatides, qui sont maintenus ensemble par le complexe synaptonémal. Cette étroite proximité ne permet pas l’individualisation par FISH des deux chromosomes homologues et donne lieu à un seul signal d’hybridation – au lieu des deux observés dans les cellules somatiques –, mais beaucoup plus intense. Le nombre de spots verts ne suffit donc pas à déterminer le nombre de chromosome X. En revanche, si un ovocyte ne contient qu’un seul X, soit deux chromatides sœurs appariées au lieu de quatre, il est vraisemblable que le signal sera moins intense. La mesure de cette intensité pourrait donc servir à l’analyse du nombre de chromosomes.

Plusieurs techniques ont été décrites pour quantifier l’intensité du signal ; aucune, d’après les auteurs, n’a été validée pour des chromosomes ovocytaires tétraploïdes. Ils proposent donc une mesure de la surface de chaque spot, comme équivalent de son intensité. Pour valider cette hypothèse, les auteurs analysent les noyaux ovocytaires peu nombreux, chez les patientes turnériennes mosaïque et les deux témoins, qui contiennent non pas un mais deux spots séparés pour l’X, le 18 ou les deux chromosomes, sans doute du fait d’une rupture du complexe synaptonémal, scindant le signal fluorescent en deux entités contenant la moitié du matériel génétique. Peek et al. vérifient que, dans le même ovocyte, le rapport entre l’intensité d’un seul spot de signal FISH scindé en deux et son témoin non scindé est d’environ 0,6, soit une réduction à environ la moitié. Ainsi, une réduction de moitié du nombre de chromatides sœurs du chromosome X entraînera une réduction similaire du rapport entre les surfaces des signaux FISH pour l’X et le 18.

Résultats (tableau 1)

Contenu en chromosome X des cellules extra-ovariennes des patientes ST

Cinq patientes (F à J) présentent une monosomie X (45,X) tandis que les cinq autres (A à E) ont un caryotype en mosaïque, dont quatre avec deux lignées cellulaires (45,X/46,XX) (patientes B à E) et une avec trois lignées cellulaires (45,X/46,XX/47,XXX) (patiente A).

Le rapport entre ces lignées varie considérablement d’un tissu à l’autre chez la même patiente. Ainsi, chez la patiente A, plus de 80 % des lymphocytes sont 47,XXX alors que dans l’urine, la proportion de cellules 47,XXX et 46,XX s’équilibre. Chez la patiente C, le rapport 45,X/46,XX est voisin de 1 dans les cellules buccales et les lymphocytes tandis que dans l’urine, ne sont identifiées que des cellules 45,X.

Morphologie macroscopique et histologie des ovaires

Chez les cinq patientes turnériennes en mosaïque, les ovaires sont macroscopiquement de taille et de morphologie normales. Ils contiennent de trois à soixante-quatre follicules par millimètre cube de tissu, dont 98 % sont au stade primordial ou petit primaire et 2 % au stade secondaire.

Chez les cinq patientes monosomiques, en revanche, les ovaires prennent l’apparence d’une bandelette fibreuse et aucun follicule n’est observé ; seule persiste une texture fibreuse avec très peu de cellules.

L’analyse par hybridation in situ en fluorescence du noyau des cellules ovariennes

  • Les cellules stromales des cinq patientes ayant une monosomie X dans toutes leurs cellules extra-ovariennes sont également 45,X. Chez les patientes mosaïques, en revanche, le pourcentage des cellules 45,X, 46,XX ou 47,XXX est variable, semblable tantôt à celui des cellules buccales, urinaires ou lymphocytaires (tableau 1).
  • Les cellules granuleuses des petits follicules ovariens chez trois des cinq patientes en mosaïque (C, D et E) sont curieusement toutes 45,X alors que 45 à 72 % de leurs cellules stromales sont 46,XX. Les deux dernières patientes, en revanche, présentent un mosaïcisme de leurs cellules granuleuses mais avec tantôt une majorité de cellules 45,X (patiente A), tantôt une majorité de cellules 46,XX (patiente B). L’analyse de vingt-cinq à quarante-neuf cellules granuleuses de six follicules individuels chez cette dernière patiente montre une grande variabilité du pourcentage des différentes lignées cellulaires entre follicules : toutes les cellules analysées d’un des follicules sont normales 46,X, alors que pour les cinq autres, le pourcentage de cellules 45,X varie de 13 à 59 % (tableau 1).
  • En déterminant la surface du spot des chromosomes X et 18 en FISH, dans les ovocytes des petits follicules, bloqués en fin de méiose I, les auteurs montrent que le rapport entre les signaux X et 18 avoisine 1 pour quarante-deux ovocytes des trois patientes ST mosaïque (B, C et E) et treize ovocytes des deux témoins. Ces ovocytes ST sont donc 46,XX. Chez la patiente A, la majorité des ovocytes présente ce rapport de 1 mais trois ovocytes ont un rapport de 0,5, suggérant que le nombre de chromatides X est réduit de moitié et qu’ils sont donc 45,X. Il en va de même pour un des neuf ovocytes examinés de la patiente D. Au total, chez ces patientes ST en mosaïque, 91 % des ovocytes sont 46,XX (42/46).

Discussion

Chez les cinq patientes turnériennes mosaïque

  • Il n’y a aucune valeur prédictive du caryotype des cellules extra-ovariennes quant à celui des cellules ovariennes. Il n’y a pas deux patientes identiques et cette variation du mosaïcisme existe entre patientes, entre les tissus d’une même patiente et entre les cellules d’un même tissu.
  • L’étude n’a pas non plus permis de montrer de corrélation entre le nombre de follicules identifiés dans le fragment de cortex ovarien analysé chez les cinq patientes ST mosaïque et le caryotype de ces patientes, de leurs diverses cellules somatiques ou de leurs ovocytes. Il est par ailleurs connu que la distribution des follicules est inhomogène dans le cortex ovarien normal, comme l’ont montré Schmidt et al.[16] ; aussi un seul fragment cortical ne peut-il rendre compte de la totalité du pool folliculaire de l’ovaire entier.
  • Les résultats de l’analyse par FISH des ovocytes sont rassurants puisque la plupart (91 %) semblent posséder deux chromosomes X. Cependant, quatre ovocytes au signal réduit de moitié seraient 45,X, ce qui étonne les auteurs : ces ovocytes, ne pouvant réaliser l’appariement des chromosomes homologues, devraient être éliminés, comme cela a été montré chez l’humain [17] – à la différence de la souris, où des ovocytes 45,X pourraient échapper à l’atrésie [18].
  • Les ovocytes 46,XX des patientes de cette étude sont-ils fonctionnels ? L’ovocyte dépend de ses cellules granuleuses pour son maintien en arrêt méiotique puis pour assurer, par un dialogue bidirectionnel, un développement folliculaire normal. Le fait que toutes les cellules granuleuses des follicules de trois patientes ST mosaïque étaient 45,X pourrait être une source d’altération de leur développement ultérieur. De même chez les deux autres patientes, qui présentent un degré variable de mosaïcisme de leurs cellules granuleuses et une grande hétérogénéité du pourcentage des différentes lignées entre follicules de la même patiente. Pendant le développement folliculaire, la couche unique de cellules granuleuses qui entoure l’ovocyte des petits follicules subit plus de dix divisions mitotiques avant d’arriver au nombre de cellules du follicule antral mature. Les cellules 45,X, sujettes à l’apoptose et dont le cycle cellulaire est ralenti, pourraient avoir du mal à assurer cette croissance. Ainsi, des follicules apparaissant histologiquement normaux mais équipés d’une granulosa exclusivement ou majoritairement 45,X pourraient être fonctionnellement défaillants. Même si cette hypothèse doit être confirmée, il semble difficile de présumer que la présence de follicules, dans le cortex ovarien de sujets ST mosaïque, garantit une fonction ovarienne normale.
  • Le statut génétique des cellules stromales peut également être un facteur déterminant de la fonctionnalité des follicules, puisqu’elles représentent leur support physique et métabolique, ainsi que la source des cellules thécales au cours du développement ultérieur. Le développement macroscopique de l’ovaire semble, lui, indépendant de l’équipement des cellules stromales en chromosome X puisqu’il est normal même s’il n’y a, comme chez la patiente A, que 10 % de cellules stromales 46,XX. C’est également le cas rapporté par Balen et al. en 2010 [9], d’une patiente 45,X/46,XX, ayant une fonction ovulatoire normale, chez laquelle des ovocytes normaux et matures sont observés après stimulation par hormone folliculostimulante, bien que les cellules stromales soient majoritairement (60 %) aneuploïdes 45,X (36/60).

Chez les cinq patientes turnériennes monosomiques 45,X

  • Les ovaires sont réduits à des bandelettes fibreuses, ne contenant que des cellules 45,X dans une abondante matrice extracellulaire. L’hypothèse selon laquelle le phénotype particulier de ces gonades dysgénétiques pourrait être lié à la monosomie 45,X uniforme de leurs cellules stromales est jugée peu probable par les auteurs. En effet, la morphologie ovarienne demeure normale chez les patientes ST mosaïque même avec seulement 10 % de cellules stromales 46,XX.
  • L’analyse histologique de Peek et al. ne rapporte aucun follicule ovarien et donc aucun ovocyte mais, à la différence des ST mosaïque, les ovaires de ces patientes sont réduits à des bandelettes fibreuses, au sein desquelles des ovocytes 45,X n’ont peut-être pas la possibilité de survivre et de se développer. C’est l’hypothèse qu’émettent les auteurs, étonnés de ce que, chez les patientes ST mosaïque de leur série, des follicules puissent se développer et contenir parfois des ovocytes 45,X (patientes A et D) alors qu’ils sont considérés comme voués à l’atrésie du fait de leur constitution génétique [17] et que l’environnement stromal peut contenir jusqu’à 90 % de cellules 45,X (patiente A).
  • Borgström et al.[7], pour leur part, ont étudié les biopsies ovariennes de quarante-sept jeunes filles ST et observé des follicules chez 10,7 % des jeunes filles ST monosomiques 45,X (3/28). Cependant, l’analyse génétique des follicules n’ayant pas été faite, il n’est pas exclu que ces patientes aient présenté un mosaïcisme occulte. On regrette d’ailleurs l’absence, dans cet article, de données sur le phénotype clinique des différentes patientes, monosomie 45,X et ST en mosaïque.
  • Dans la série, petite il est vrai, des cinq patientes monosomiques 45,X de cette étude, aucun des trois tissus extra-ovariens n’était mosaïque. Les auteurs suggèrent que la présence d’un caryotype aneuploïde uniforme dans les lymphocytes, mais aussi les cellules buccales et urinaires, pourrait être un bon indicateur prédictif de l’absence de follicules ovariens et donc d’ovaire fonctionnel. Certes, la présence d’ovocytes et même la survenue de grossesses ont été rapportées, dans la littérature, chez des femmes 45,X [19, 20] mais sans description précise de la méthodologie utilisée pour réaliser les caryotypes de ces patientes. Là encore, on ne peut donc être certain qu’elles ne présentaient pas en fait un mosaïcisme occulte. D’où l’importance de la qualité du diagnostic génétique chez ces patientes pour guider une information la plus honnête possible sur les possibilités reproductives et l’intérêt de l’OTC.

En résumé

  • Ronald Peek et al. présentent une étude, qui n’avait pas encore été réalisée, d’analyse détaillée par FISH du contenu en chromosome X des ovocytes et des cellules ovariennes, granuleuses et stromales, chez des jeunes filles avec un syndrome de Turner (ST).
  • La série est certes limitée : dix patientes (3 à 17 ans), mais les résultats obtenus apportent des données inédites et importantes pour mieux définir la prise en charge des troubles de la fertilité inhérents au ST, au moment où la cryoconservation de tissu ovarien est envisagée, proposée et même pratiquée par certaines équipes dans cette indication.
  • De petits follicules primordiaux et primaires sont identifiés dans le cortex ovarien des cinq jeunes filles avec ST en mosaïque (45,X/46,XX ou 45,X/46,XX/47,XXX), déterminée par l’analyse de trois types de cellules extra-ovariennes (lymphocytes, cellules buccales et urinaires). En revanche, aucune des cinq patientes ayant une monosomie X uniforme (45,X) dans leurs cellules extra-ovariennes n’avait de follicules dans leurs ovaires en bandelette.
  • Chez les sujets ST mosaïque, 91 % des ovocytes sont normaux 46,XX, ce qui est très rassurant, mais tout ou partie des cellules granuleuses folliculaires sont monosomiques 45,X avec un degré de mosaïcisme variable entre follicules d’une même patiente. Les cellules stromales sont majoritairement 46,XX mais avec, chez certaines patientes, un taux élevé de mosaïcisme qui n’affecte cependant pas la morphologie macroscopique de l’ovaire, même si le pourcentage de cellules 46,XX ne dépasse pas 10 %. De plus, le degré de mosaïcisme des cellules ovariennes n’est pas corrélé à celui des cellules extra-ovariennes dont l’analyse ne peut donc constituer un examen prédictif aisément accessible. Pourtant, un mosaïcisme important des cellules granuleuses ou des cellules stromales qui contribuent à la constitution des thèques folliculaires, peut altérer la physiologie des follicules.
  • La présence de follicules dans les ovaires de patientes ST en mosaïque ne garantit donc pas qu’ils soient fonctionnels. Cette possibilité devrait être prise en compte dans l’information donnée et la stratégie de préservation de la fertilité de ces patientes.

Liens d’intérêt

Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt en rapport avec cet article.

Références non citées

[15, 16, 19-21].


1 Ainsi, dans l’étude rétrospective multicentrique de Pasquino et al. (1997), 16,1 % seulement des 522 jeunes filles turnériennes de plus de 12 ans étudiées avaient eu un développement pubertaire spontané et des menstruations à 13 ± 1,5 ans.

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