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Médecine thérapeutique

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Orlistat et obésité : le point sur les connaissances Volume 5, numéro 5, Mai 1999

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L’augmentation de la masse grasse est appréciée par l’indice de masse corporelle, ou indice de Quetelet, qui est le rapport du poids (en kg) à la taille (en m2) [1]. Un indice de masse corporelle supérieur à 30 kg/m2 définit l’obésité chez l’adulte. Au-delà de ce chiffre, l’obésité recouvre différents stades de gravité et s’associe à une augmentation du risque de mortalité. La prévalence de l’obésité ne cesse de croître dans les pays industrialisés. On estime, en France, qu’elle touche de 7 à 10 % de la population [2]. Elle s’accompagne d’un cortège de complications cardio-vasculaires (hypertension artérielle, accidents vasculaires cérébraux, insuffisance cardiaque et coronarienne), respiratoires (insuffisance respiratoire, syndrome d’apnée du sommeil, hypertension artérielle pulmonaire), mécaniques (arthrose, goutte), métaboliques (diabète, dyslipidémies, hyperuricémie…) et autres [1]. Depuis les recommandations de l’Agence du médicament, en 1995, et le retrait de la fenfluramine et de la dexfenfluramine, l’arsenal thérapeutique, en dehors de la diététique, est restreint [3]. Une nouvelle molécule, l’orlistat, vient d’être commercialisée. Que faut-il en savoir et en penser ? Au-delà des chiffres, on constate que la perte pondérale, critère majeur d’efficacité du traitement étudié, reste modeste avec l’orlistat en regard des résultats obtenus dans le groupe placebo. Bien que significative, la différence à 1 an reste minime (3,9 kg). A 2 ans, la différence entre les deux groupes s’amenuise encore (2,4 kg). Les résultats obtenus pour les autres paramètres, tels que les profils lipidiques, l’équilibre glycémique ou l’hypertension artérielle, sont soit modestes, soit nuls (pression artérielle diastolique). Ces différences sont, de plus, obtenues au prix d’un inconfort digestif marqué, même s’il se réduit au bout des 12 premières semaines de traitement pour devenir négligeable lors de la deuxième année. Les résultats pondéraux chez les patients diabétiques sont encore plus modestes. Il s’agit, il est vrai, de populations différentes pour lesquelles les phénomènes d’insulinorésistance, étroitement intriqués aux troubles métaboliques, ralentissent l’amaigrissement. Dans cette population spécifique, on remarque, ce qui était déjà connu, qu’une perte de poids modeste suffit à améliorer le profil biologique (insulinémie, glycémie, lipides). Le prix de vente du médicament doit également entrer en ligne de compte au vu de ces résultats. Si l’orlistat ouvre la voie d’une nouvelle classe thérapeutique pour aider certains patients obèses, il ne doit être prescrit qu’à des sujets susceptibles d’obtenir de bons résultats : perte de plus de 2,5 kg lors de la phase de régime seul pendant 4 semaines puis de 5 % du poids corporel lors des 3 premiers mois de traitement. Chez ces sujets, la perte de poids à 1 an atteint en effet 16,4 %, ce qui parfois est suffisant. Chez les autres, qui s’astreignent déjà à des régimes pauvres en lipides, la prescription d’orlistat restera sans effet. Les résultats à 2 ans, très modestes, confirment que la prise en charge d’une obésité ne doit pas s’envisager pour une trop courte période. Si l’orlistat peut aider à l’amaigrissement, il ne permet en rien de restaurer un métabolisme énergétique normal et le maintien d’un amaigrissement en 12 mois de traitement sans une alimentation vraiment adaptée. L’obésité est une maladie hétérogène, dont la prise en charge reste difficile et qui est ouverte à de nouvelles recherches. Si la mise à disposition d’une nouvelle molécule reste intéressante par son mécanisme d’action original, les résultats obtenus confirment que la seule réduction des calories lipidiques est insuffisante.