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Médecine thérapeutique

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Morphine et obésité : que savons-nous ? Volume 15, numéro 4, octobre-novembre-décembre 2009

Auteurs
Unité de recherche thérapeutique, Service de médecine interne, Hôpital Lariboisière, 75010 Paris, INSERM U705, CNRS UMR 7157, Faculté de pharmacie, Université Paris Descartes, Paris F-75006

L’obésité, définie par un excès de masse grasse ayant des conséquences pour la santé (OMS 1996), représente un problème de santé publique du fait de ses complications et de ses conséquences financières. Elle fait l’objet de nombreuses études sur le plan physiopathologique et thérapeutique afin de comprendre, prévenir et corriger l’excès pondéral. Des questions majeures sur la pharmacologie se posent régulièrement mais il s’agit d’un domaine de la médecine de l’obésité peu étudié. Les problématiques non résolues sont nombreuses : le devenir de l’absorption des médicaments après bypass gastrique, la prescription de médicaments à marge thérapeutique étroite, l’adaptation de la posologie des anticancéreux, des immunoglobulines… Ces questions présentent des enjeux variés et parfois communs : qualité de vie, efficacité thérapeutique, morbi-mortalité et coûts de santé. Dans cet article, nous nous sommes intéressés à la prescription de morphine chez les sujets obèses. Il s’agit d’un médicament dont l’intérêt est majeur puisque les douleurs articulaires sont une complication fréquente de l’obésité. Elles engendrent une altération de la qualité de vie, des incapacités au travail, une réduction de l’activité physique, outil majeur des stratégies de réduction pondérale et de la prévention des pathologies cardiovasculaires, même en présence d’une obésité constituée. L’absence de prise en charge optimale de la douleur après prescription d’antalgiques de palier II est principalement liée à une méconnaissance des facteurs déterminant la variabilité de réponse aux morphiniques dans cette population particulière où le rapport efficacité/toxicité respiratoire est vraisemblablement non superposable à celle de l’adulte non obèse. La crainte de la survenue d’effets indésirables est probablement justifiée, dans une population où la prévalence du syndrome d’apnées du sommeil et de l’hypoventilation alvéolaire est élevée. Par ailleurs, l’obésité est un facteur de risque de cancers et la proportion de sujets obèses pris en charge en cancérologie et susceptibles de bénéficier d’un traitement par morphine augmente régulièrement. Nous aborderons dans cette revue les différents facteurs de variabilité de la morphine et nous identifierons ceux susceptibles de modifier l’action de la morphine orale dans ce groupe de patients. L’administration de morphine chez les patients obèses n’a à ce jour jamais fait l’objet de travaux spécifiques.