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Médecine thérapeutique

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Interféron alpha et auto-immunité Volume 6, numéro 1, Janvier 2000

Auteur
Service de médecine interne, Groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75661 Paris Cedex 13, France.

Les interférons sont des glycoprotéines appartenant à 3 classes principales déterminées par l’origine cellulaire et des différences structurales, biochimiques et antigéniques : a) leucocytaire (monocytes, lymphocytes B) ou interféron alpha, b) fibroblastique ou interféron bêta et c) immun (lymphocytes T activés) ou interféron gamma. Une nomenclature regroupant les interférons en types I (alpha et bêta) et II (gamma) est moins utilisée. La mise en évidence d’une activité antivirale en culture cellulaire permet à la fois de définir fonctionnellement l’interféron et de le quantifier dans les liquides biologiques en unités internationales. Actuellement, les tests utilisant des anticorps monoclonaux spécifiques, commercialisés pour la pratique courante, sont fiables et beaucoup plus rapides (2-4 h) que la méthode de référence (16-48 h). Les techniques de recombinaison génétique et le clonage des gènes ont permis de déterminer au moins 20 sous-types au sein de la classe des interférons alpha. Les sous-types recombinants alpha-2a et alpha-2b sont des polypeptides de 165 acides aminés qui ne différent qu’en une seule position (respectivement lysine et arginine en position 23). Le risque d’aggravation ou d’induction d’une maladie auto-immune par l’interféron alpha est étayé par deux séries d’arguments : l’apparition et/ou l’augmentation du titre de nombreux auto-anticorps, fréquente ; la survenue, plus rare, de maladie auto-immune clinique. En pratique, une recherche initiale d’anticorps antithyroïdiens et un suivi régulier des hormones thyroïdiennes paraît souhaitable, eu égard à la fréquence des dysthyroïdies déclarées en cours de traitement ; ces dysthyroïdies peuvent être responsables de l’asthénie chronique souvent attribuée au seul alpha-interféron. Nous pensons que la survenue d’un effet latéral inhabituel, pendant le traitement par interféron alpha, doit faire : a) rechercher des stigmates cliniques et biologiques d’auto-immunité ; b) reconsidérer le diagnostic de la maladie initiale ; c) interrompre éventuellement le traitement ; d) se donner, si possible, un délai après l’arrêt de l’interféron alpha afin d’observer si il y a régression spontanée des troubles en l’absence d’autre thérapeutique. Enfin, la prescription d’un traitement par interféron alpha en tant qu’immunomodulateur dans le cadre d’une pathologie auto-immune est potentiellement dangereuse et doit faire l’objet d’essais contrôlés extrêmement prudents.