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Médecine thérapeutique

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Virus et Sjögren Volume 5, numéro 7, Août - Septembre 1999

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Le syndrome de Sjögren est une maladie auto-immune caractérisée par une infiltration lymphoïde des glandes salivaires et lacrymales, responsable d’une sécheresse buccale et oculaire, et par la production de nombreux auto-anticorps. A partir des données dont nous disposons aujourd’hui sur virus et syndrome de Sjögren, il est possible de faire trois hypothèses physiopathogéniques. • La première est que les glandes salivaires sont une espèce de « poubelle » où l’on peut retrouver beaucoup de virus à l’état latent, que ces virus sialotropes peuvent entraîner un syndrome sec sans auto-anticorps et que ce syndrome sec est différent du syndrome de Sjögren auto-immun. • La deuxième hypothèse est de voir le syndrome de Sjögren comme un vrai syndrome avec différentes étiologies dont différents virus sialotropes qui détermineraient un phénotype un petit peu particulier de la maladie. Ces virus pourraient infecter les cellules épithéliales salivaires et entraîner une hyperexpression des molécules HLA de classe I et de classe II, ces modifications favoriseraient la présentation d’auto ou d’hétéroantigènes (viraux) par les cellules épithéliales à des cellules lymphoïdes, aboutissant à la prolifération lymphocytaire puis à la destruction de la glande. • La troisième hypothèse donnerait aux virus un rôle encore plus indirect : tout virus spécifique d’une cible qui était génétiquement prédisposée à faire une maladie auto-immune entraîne des modifications de cette cible qui favorisent alors l’apparition de la maladie auto-immune. Deux arguments expérimentaux ont été apportés récemment en faveur de ce dernier mécanisme : – les souris NOD, génétiquement prédisposées à faire un diabète, lorsqu’elles expriment un répertoire T autoréactif artificiellement accru par transgenèse, développent la maladie beaucoup plus précocement quand elles sont infectées avec le virus Coxsackie qui entraîne une inflammation du pancréas et la libération d’autoantigènes [34] ; – les souris B6-lpr/lpr déficientes en Fas, génétiquement prédisposées à faire une maladie auto-immune systémique avec glomérulonéphrite mais sans atteinte salivaire vers l’âge de 6/8 mois, développent une maladie inflammatoire des glandes salivaires proche du syndrome de Sjögren 3 mois après avoir été infectées par le cytomégalovirus murin, virus sialotrope mais qui a été complètement éliminé des glandes salivaires au moment où apparaît la maladie auto-immune [35]. La poursuite des recherches sur les mécanismes immunopathologiques pouvant relier virus et Sjögren devrait apporter des arguments en faveur de l’une ou l’autre de ces hypothèses physiopathogéniques ; le syndrome de Sjögren reste donc un important modèle pour mieux élucider les relations complexes entre virus et auto-immunité.