JLE

Médecine

MENU

Pour un meilleur usage des antibiotiques Volume 2, numéro 3, Mars 2006

Auteur
  • Page(s) : 105
  • Année de parution : 2006

Malgré un plan national diffusé en novembre 2001 pour préserver l'efficacité des antibiotiques et une campagne lancée en septembre 2002 sur le thème « les antibiotiques, c'est pas automatique », la France reste le pays européen où la consommation d'antibiotiques est la plus élevée (environ 100 millions de prescriptions d'antibiotiques par an en 2001).

Afin de limiter le développement des résistances bactériennes, un bon usage de l'antibiothérapie s'impose à tous les médecins, quels que soient leur mode d'exercice et leur spécialité. L'absence de nouveaux antibactériens innovants vient encore renforcer cet impératif. L'Académie nationale de Médecine a donc émis des recommandations portant sur sept points [1] :

* Tout médecin prescrivant un traitement antibiotique doit formuler avec précision les modalités de son administration au patient qui va le recevoir, en mentionnant la durée du traitement sur l'ordonnance. La prescription non justifiée d'antibiotiques lors d'infections respiratoires bénignes, le plus souvent virales, ne peut que favoriser les résistances bactériennes. L'emploi d'antibiotiques à titre préventif doit être réservé à des cas particuliers.

* Les praticiens doivent faire prendre conscience à leurs patients que le fait de garder en réserve des antibiotiques, parfois même au-delà de leur date de péremption, et de les utiliser en automédication pour divers symptômes aspécifiques est une pratique qui doit être proscrite.

* Les antibiotiques sont souvent vendus sous des conditionnements qui ne correspondent pas aux traitements prescrits. Il serait nécessaire de mieux ajuster la quantité d'antibiotique délivrée sur prescription en proposant des présentations ne contenant que la dose adaptée au traitement des infections usuelles.

* Les recommandations de bonnes pratiques et les conclusions des conférences de consensus doivent être appliquées avec rigueur. Il convient aussi de promouvoir, par les organismes de formation médicale continue, les mesures susceptibles de rationaliser les prescriptions d'antibiotiques telles que le diagnostic étiologique rapide de l'angine, les recommandations de traitement court, etc.

* Les étudiants recevront une formation conforme à ces règles dans le cadre de l'enseignement qui doit aborder le traitement d'infections aussi banales que les rhinopharyngites.

* Chaque hôpital doit désigner un médecin référent en antibiothérapie, instaurer une commission des anti-infectieux et créer un système de dispensation contrôlée de ces médicaments, ces mesures complétant les programmes de prévention des infections nosocomiales et de leur transmission interhumaine.

* Cette politique doit s'intégrer dans un ensemble de réglementations visant tous les autres modes d'utilisation des antibiotiques (médecine vétérinaire, industrie agroalimentaire par exemple).

Mais quel est l'impact sur la pratique, notamment en médecine de ville, de ces recommandations [2] ? Celles-ci, au caractère moins coercitif et plus didactique que les anciennes recommandations médicales opposables (RMO), semblent de ce fait plus difficiles à mettre en œuvre, d'autant qu'elles sont souvent jugées comme une synthèse biaisée et donc partiale et qu'il existe fréquemment un écart entre les motivations des médecins prescripteurs et celles des rédacteurs. Il s'agit d'abord de changer les mentalités et le regard porté sur les antibiotiques ; pour qu'enfin les textes des recommandations passent dans les pratiques.


1. Frottier J, Pechère JC. Du bon usage des antibiotiques. Bull Acad Natle Méd. 2005;189:1061-2.

2. Gaillat J. Impact des recommandations sur l'usage des antibiotiques en médecine de ville. Antibiotiques. 2005;7:213-18.