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Médecine

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Fatigue chronique : quelle prise en charge ? Volume 5, numéro 5, Mai 2009

Auteurs

Deux essais hollandais en soins primaires nous apportent des données utiles dans ce difficile et fréquent problème.

VAMPIRE (pour Vague Medical Problems In REsearch) est un essai randomisé [1] réalisé dans 91 cabinets de médecine générale hollandais. Cet essai à la logistique assez complexe du fait du syndrome retenu a inclus au final 296 patients qui ont été tirés au sort : 158 avaient un bilan sanguin immédiat, 138 un bilan après 4 semaines si la fatigue persistait. Les résultats de ces tests étaient analysés par ailleurs sous forme de 13 dosages, soit seulement de 4 (Hb, VS, glycémie, TSH). Les données de l’année de suivi ont été extraites des dossiers informatisés des patients. Au total, 8 % avaient une maladie somatique détectable par dosage sanguin ; le nombre de faux positifs augmentait avec le nombre de dosages effectués ; les patients ont rarement re-consulté après 4 semaines ; le fait d’avoir fait l’examen sanguin immédiatement ou après 4 semaines n’affecte en rien les résultats à terme. L’étude de cohorte [2] a suivi prospectivement durant 1 an 642 patients (73 % de femmes, 42 ans en moyenne) dans 147 cabinets de médecine générale. L’intensité de la fatigue perçue en début d’étude et les craintes du patient que cette fatigue se prolonge sont des indicateurs significatifs de mauvais pronostic, ainsi que l’existence d’une douleur notable au départ, et un environnement social défavorable. À l’inverse, les indicateurs de récupération rapide sont le sexe masculin, un métier n’impliquant pas de soins (par exemple aux plus âgés), un sentiment de « bon état général » et une fatigue récente.

1. Koch H, van Bokhoven MA, ter Riet G, van Alphen-Jager TMT, van der Weijden T, Dinant GJ, Bindels PJE. Ordering blood tests for patients with unex plained fatigue in general practice: what does it yield? Results of the VAMPIRE trial. Br J Gen Practice. 2009;59:243-9.

2. Nijrolder I, van der Windt D, van der Horst H. Prediction of outcome in patients presenting with fatigue in primary care. Br J Gen Practice. 2009;59:250-5.

3. Harvey SB, Wessely S. Tired all the time: can new research on fatigue help physicians? Br J Gen Practice. 2009;59:237-9.

Les questions que se pose la rédaction

• Les psychologues anglais [3] soulignent les points forts et les limites de ces deux études :

• Le moment opportun de faire un minimum d’examens biologiques fait débat. Mais la plupart des causes organiques sont détectables par une anamnèse et un examen clinique soigneux : les examens biologiques ont alors pour but de confirmer rapidement l’hypothèse. Dans les autres cas, limiter et retarder les tests biologiques est une bonne approche. Comme le soulignent les auteurs de VAMPIRE, ces examens aggravent plutôt l’angoisse de ces patients, surtout lorsque la « batterie » faite augmente d’autant le risque de faux positifs !

• La fatigue durable (dépassant 1 mois) est une plainte fréquente en médecine générale, atteignant environ 10 % des patients selon les éditorialistes, mais parfois plus dans certaines études. Elle est le plus souvent multifactorielle et n’a que rarement une réponse univoque. Le véritable objectif de la prise en charge de cette fatigue est bien d’éviter le passage à la chronicité. C’est l’objet de nombreuses autres études.

• Relevons la fragilité des soignantes, plus particulièrement encore lorsqu’il s’agit de soins peu spécifiques. Nijrolder et al. [2] l’ont retrouvée dans d’autres études.