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Hépato-Gastro & Oncologie Digestive

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Prise en charge des complications des chimiothérapies : ce qu’il faut connaître Volume 29, numéro 6, Juin 2022

Illustrations


  • Figure 1

  • Figure 2

Tableaux

Introduction

La prise en charge du cancer en France, respectivement première et deuxième causes de mortalité chez l’homme et chez la femme, a mobilisé près d’un quart de l’activité hospitalière en 2019 [1]. La chimiothérapie (CT) (2 700 000 séances en 2019) a de nombreux effets secondaires, notamment digestifs, les toxicités digestives étant au nombre des plus fréquentes. Tout hépato-gastroentérologue, qu’il soit ou non oncologue digestif, sera donc souvent impliqué dans leur prise en charge. Cette dernière doit être rigoureuse car ces complications ont un impact potentiellement péjoratif sur le pronostic, en entraînant des retards de cure, une diminution de la dose-intensité (DI) de la CT, voire son arrêt [2]. En oncologie digestive, des données récentes démontrent cet impact pronostique péjoratif. Dans l’étude prodige 24 (Folfirinox vs. gemcitabine pour le traitement adjuvant du cancer du pancréas), les patients qui n’ont pas pu recevoir l’ensemble des cycles prévus ont une survie globale (SG) significativement inférieure à cinq ans (27 % vs. 41,9 % ; HR 0,64 (0,49-0,84), p = 0,002) [3]. De même, une analyse poolée des bases de données ACCENT et IDEA a permis de montrer que les patients qui recevaient moins de 75 % des cycles de CT à base d’oxaliplatine planifiés pour le traitement adjuvant d’un cancer colique de stade III, avaient une survie sans récidive à trois ans (69 % vs. 78,8 % ; HR 1,61 (1,48-1,75), p < 0,0001) et une SG à cinq ans (74,7 % vs. 84,7 % ; HR 1,73 (1,57-1,91), p < 0,0001) significativement inférieure par rapport à ceux qui recevaient plus de 75 % des cycles de CT planifiés [4].

“ Les complications des chimiothérapies ont un impact potentiellement péjoratif sur le pronostic ”

La gestion de ces complications repose sur une démarche clinique et thérapeutique classique avec cependant quelques particularités :

  • Évaluer leur sévérité en suivant des échelles standardisées validées [5]. Ces échelles sont surtout utiles dans le cadre des essais cliniques mais leur utilisation en pratique quotidienne apporte une aide précieuse pour l’appréciation de la gravité de ces toxicités (tableau 1).
  • Connaître et s’appuyer sur les recommandations des sociétés savantes (AFSOS, ESMO, ASCO, MASCC) pour prévenir et traiter ces complications. Elles sont accessibles sur leurs sites internet respectifs.
  • S’informer du pronostic de la maladie sous-jacente avant toute décision thérapeutique : la CT est-elle administrée dans le cadre d’un traitement néo-adjuvant, adjuvant, métastatique, à visée curative ou métastatique avancée ? La consultation de la dernière fiche de réunion de concertation pluridisciplinaire apporte souvent des informations importantes au praticien amené à prendre en charge un patient qu’il ne connaît pas dans le cadre de l’urgence.
  • Enfin, se conformer aux éventuelles directives anticipées du patient pour déterminer le niveau d’intensité de la prise en charge.

Le but de cet article est d’apporter des éléments pratiques de prise en charge des complications les plus fréquentes des CT auxquelles tout hépato-gastroentérologue peut être confronté.

Les complications digestives

Nausées et vomissements

On distingue les nausées et vomissements anticipés, aigus, survenant le jour de la CT, et ceux qui sont retardés, survenant classiquement entre 24 heures et 5 jours après l’administration de la CT. Une prophylaxie primaire est recommandée, adaptée en fonction du risque émétisant du protocole de CT utilisé. Le risque de nausées et vomissements chimio-induits (CI) est déterminé en fonction de la drogue la plus émétisante du protocole :

  • hautement émétisante (risque de nausées et vomissements CI > 90 %) : protocole à base de cisplatine ;
  • modérément émétisante (risque de nausées et vomissements CI > 30 % et ≤ 90 %) : protocole à base d’oxaliplatine, irinotécan ;
  • faiblement émétisante (risque de nausées et vomissements CI > 10 % et ≤ 30 %) : gemcitabine, 5-Fluorouracile (5-FU), capécitabine, taxanes, régorafénib en monothérapie ;
  • très faiblement médisante (risque de nausées et vomissements CI ≤ 10 %) : sorafénib [5].

Les classes médicamenteuses utilisées sont les corticoïdes, les antagonistes des récepteurs 5HT3 (sétrons) et de la neurokinine de type 1 (aprépitant, nétupitant), les antagonistes de la dopamine (métoclopramide), les benzodiazépines, les neuroleptiques (tableau 2). Le deuxième facteur à prendre en compte est l’existence de facteurs de risque individuels de nausées et vomissements CI (tableau 3). Il faut également insister sur l’importance de la prophylaxie primaire des nausées et vomissements CI (tableau 4) et de la prise en compte des facteurs individuels de risque, sachant que la tolérance du premier cycle de CT est déterminante dans la prévention des nausées et vomissements CI anticipés pour les cycles suivants. On peut être ainsi amené à discuter de l’utilisation du NEPA (association nétupitant + palonosétron) en première intention, sachant que cette drogue a une AMM mais non un remboursement (au moment de la publication de cet article) dans la prévention des nausées et vomissements aigus et retardés associés aux CT anticancéreuses modérément émétisantes [6].

Quelle doit être la prise en charge d’un patient présentant des nausées et vomissements retardés non contrôlés ?

  • Évaluer la gravité et le retentissement clinique et biologique : dès lors que les nausées et vomissements ne permettent plus des apports par voie orale satisfaisants et qu’ils s’accompagnent d’une déshydratation clinique, de troubles hydro-électrolytiques et/ou d’une insuffisance rénale, une hospitalisation doit être envisagée.
  • Éliminer une cause autre que la CT : métastases cérébrales, hypercalcémie, hyponatrémie, syndrome occlusif, stase gastrique favorisée par une ascite ou une hépatomégalie, introduction récente d’un traitement morphinique (il s’agit d’une cause fréquente, qui doit toujours être cherchée).
  • S’informer de la prophylaxie primaire prescrite et de l’observance au traitement.
  • Mettre en œuvre un traitement curatif adapté : le niveau de preuve des recommandations dans cette situation est faible. On peut cependant retenir les éléments suivants : si les corticoïdes ont été utilisés en prophylaxie primaire, ils sont en général peu efficaces [7]. Un traitement par anti-D2 type métoclopramide 10 mg IV, une à trois fois par jour (dose maximale : 0,5 mg/kg/j) peut être introduit [7]. À noter que l’utilisation de la chlorpromazine (Largactil) au PSE ne figure dans aucun référentiel ; ce médicament doit être administré avec précaution, en raison de ses effets sédatifs potentiels [8]. L’olanzapine a montré son efficacité à la posologie de 10 mg/j dans la prévention des nausées et vomissements CI des CT hautement émétisantes et la posologie de 5 mg/j a été démontrée comme non inférieure (à 10 mg/j) [9]. Son utilisation a d’ailleurs été introduite en prophylaxie dans les dernières recommandations de l’ASCO [5]. En cas d’introduction récente d’un traitement morphinique, une rotation morphinique doit être envisagée si un traitement symptomatique ne permet pas de contrôler rapidement la symptomatologie [5].
  • Adapter le traitement prophylactique au cycle suivant : si l’observance de la prophylaxie primaire prescrite initialement a été bonne, il peut être proposé de renforcer cette dernière en surclassant le potentiel émétisant de la CT et/ou par la prescription d’une classe thérapeutique non utilisée précédemment.

“ La prophylaxie primaire des nausées/vomissements est déterminante pour la tolérance de la chimiothérapie et une prophylaxie efficace dès le premier cycle de chimiothérapie permet souvent de maintenir l’absence de nausées et vomissements lors des cycles suivants ”

Diarrhée et colite post-chimiothérapie

La diarrhée est une des complications les plus fréquentes de la CT, notamment avec les molécules (5-FU, capécitabine, irinotécan, taxanes, thérapies ciblées, inhibiteurs de tyrosine kinase) et les protocoles (folfirinox, folfiri-aflibercept, gemcitabine-nab-paclitaxel, FLOT) utilisés en cancérologie digestive. Avec ces protocoles, les patients présentent une diarrhée dans 30 à 40 % des cas, de grade 3/4 dans 10 à 20 % des cas. Le plus souvent, la diarrhée est uniquement secondaire à une toxicité de la CT, mais les formes s’intégrant dans un tableau de colite post-CT ne doivent pas être méconnues. La prise en charge initiale vise donc à évaluer la gravité du tableau clinique et à chercher des éléments évocateurs d’une colite post-CT (tableaux 1 et 5).

Avant tout, il convient de rappeler au patient les règles hygiéno-diététiques portant notamment sur l’hydratation et la limitation des irritants digestifs.

“ Le traitement médicamenteux de première ligne de la diarrhée chimio-induite est le lopéra-mide, jusqu’à huit gélules par jour ”

La diarrhée de grade 1/2 sans signe de gravité relève d’une prise en charge ambulatoire [10] :

  • hydratation abondante, fractionnement des repas en privilégiant les féculents et en limitant les apports en fibres et en lactose ;
  • lopéramide : 2 gélules à la première selle liquide puis 1 gélule à chaque selle liquide ; maximum 8 par jour. Arrêt en l’absence de selle liquide depuis plus de 12 heures ;
  • diosmectite : 1 à 2 sachets, trois fois par jour ;
  • si diarrhée non contrôlée : racécadotril : 1 gélule trois fois par jour ;
  • réévaluation quotidienne : en l’absence d’amélioration en 48 à 72 heures, hospitalisation.

La diarrhée grave nécessite une prise en charge en hospitalisation pour réhydratation, réalisation d’un bilan comprenant une coproculture avec recherche de C. difficile, des hémocultures en cas de fièvre, et une imagerie s’il existe des douleurs abdominales et/ou des rectorragies associées. En l’absence d’argument en faveur d’une colite post-CT : réhydratation IV et prise en charge identique à la diarrhée grade 1/2. Cependant, en fonction du terrain et de la gravité du tableau clinique, d’emblée ou en l’absence d’amélioration rapide, discuter une antibiothérapie empirique par ciprofioxacine-métronidazole et un traitement par octréotide SC ou IV 100 à 500 μg trois fois par jour, ou IV 25 à 50 μg/h. Le niveau de preuve de l’efficacité des analogues de la somatostatine dans cette indication est faible mais son utilisation est recommandée par les guidelines [11].

Les colites post-CT [12] peuvent être en rapport avec une colite à C. difficile, une colite neutropénique, ou une colite« médicamenteuse », notamment chez les patients traités par biothérapies ou inhibiteurs de tyrosine kinase.

  • La colite à C. difficile : la CT en elle-même est un facteur de risque de l’infection à C. difficile, avec un spectre d’expression clinique allant de la simple diarrhée post-CT résistante au traitement symptomatique à la colite grave (colite fulminante, mégacôlon toxique) menaçant le pronostic vital [13]. Les traitements de première intention sont soit la vancomycine par voie orale, 125 mg quatre fois par jour, soit la fidaxomicine 200 mg deux fois par jour pendant 10 jours, avec mise en place de mesures d’isolement du patient. Dans les formes graves, le traitement de référence est la vancomycine par voie orale, 500 mg quatre fois par jour associée au métronidazole IV, 500 mg trois fois par jour pendant 10 jours.
  • La colite neutropénique (typhlite) : elle complique le plus souvent les CT aplasiantes des hémopathies malignes mais s’observe également au cours des CT des tumeurs solides, notamment à base de taxanes. Le diagnostic repose sur la survenue, dans un contexte de neutropénie avec fièvre, d’un tableau douloureux abdominal avec en imagerie un aspect d’épaississement des parois coliques, touchant le plus souvent le côlon droit, associé à une distension de la lumière colique et éventuellement de l’intestin grêle d’amont, la présence d’une pneumatose pariétale étant un signe de gravité. Le pronostic reste sévère, avec une mortalité de 22 % dans une série récente [14]. Ces patients doivent être pris en charge en soins intensifs.
  • La colite « médicamenteuse » : on peut regrouper dans cette catégorie des tableaux de colite de mécanismes très variés, survenant en outre dans un contexte de traitement par biothérapie ou inhibiteurs de tyrosine kinase. Plusieurs cas de colite ulcérée d’allure ischémique ont été rapportés avec des molécules anti-angiogéniques, notamment le bévacizumab, cette classe médicamenteuse étant par ailleurs associée à un risque de perforation digestive. De même, des cas de colite lymphocytaire ont été rapportés chez des patients traités par Folfiri-aflibercept [15], avec une bonne réponse thérapeutique avec l’association mésalazine et budésonide qui a permis la poursuite de la CT. Ces éléments soulignent l’importance de savoir évoquer une cause médicamenteuse spécifique devant des tableaux de diarrhée réfractaire chez des patients traités par CT.

Enfin, chez les patients pris en charge pour un cancer du pancréas, l’éventualité d’une insuffisance pancréatique exocrine en cas de diarrhée réfractaire ne doit pas être négligée, sachant que le traitement par extrait pancréatique améliore l’état nutritionnel, la qualité de vie et la survie de ces patients (survie 12,6 vs. 8,7 mois ; p = 0,002) [16].

“ En cas de diarrhée réfractaire ou sévère, une infection à C. difficile doit être systématiquement cherchée ”

Constipation

Les facteurs majeurs qui participent à l’apparition ou à l’aggravation d’une constipation sont l’inactivité physique, la baisse des apports hydriques et alimentaires, le régime pauvre en fibres, les désordres métaboliques (déshydratation, hypokaliémie, hypercalcémie, diabète, hypothyroïdie), les médicaments (les antiémétiques, notamment les sétrons, les dérivés morphiniques). Ce n’est pas un effet indésirable habituel des drogues de CT, sauf pour les vinca-alcaloïdes. Enfin, la constipation peut être le signe d’une progression tumorale, notamment sous la forme d’une carcinose péritonéale (tableau 1).

En premier lieu, la prise en charge repose sur des mesures hygiéno-diététiques : hydratation suffisante, activité physique régulière, alimentation riche en fibres (sauf en cas d’obstacle intra-luminal où un régime pauvre en résidus est privilégié), massages abdominaux, toilettes d’accès facile et « discret », confortables et équipées d’un marchepied utilisable en position assise [17]. Lorsqu’un traitement est prescrit, un laxatif osmotique (PEG, lactulose, sels de magnésium sauf en cas d’insuffisance rénale) doit être utilisé en première intention. Une prescription prophylactique est recommandée en cas d’introduction d’un traitement morphinique. Les laxatifs de lest et à base de paraffine doivent être utilisés avec précaution, notamment en cas de maladie avancée. En cas de non-réponse à un traitement de première intention, une association d’un laxatif osmotique à un laxatif stimulant (séné, bisacodyl, picosulfate de sodium) est recommandée. Les suppositoires (glycérine ou éductyl) ou les lavements doivent être proposés en première intention en cas de constipation distale.

Dans le cas d’une constipation rebelle induite par les opioïdes, un traitement antagoniste des récepteurs opioïdes périphériques peut être instauré. Plusieurs molécules ont l’AMM dans cette indication : méthylnaltrexone (12 mg SC, 4 à 7 doses par semaine), naloxégol (25 mg PO par jour, à ramener à 12,5 mg en cas de crampes abdominales) [17].

Mucite

Il s’agit d’une inflammation, associée ou non à des ulcérations de la muqueuse de la bouche et du tube digestif. Complication fréquente des CT, elle est un facteur potentiel d’altération de la qualité de vie et de l’état nutritionnel des patients [18].

La prévention est un élément majeur de sa prise en charge, en insistant sur la nécessité d’un bilan bucco-dentaire avant l’initiation de la CT et d’une bonne hygiène locale associée à des soins systématiques et répétés pendant toute la durée du traitement. L’utilisation des antifongiques n’est pas recommandée dans ce cadre, notamment les mélanges bicarbonate-antifongiques en suspension buvable [19] (tableau 6).

D’autres moyens de prévention sont recommandés mais souvent non disponibles dans la plupart des centres (cryothérapie, thérapie laser basse énergie) [20].

La prise en charge des mucites repose principalement sur les antalgiques, les bains de bouche et le maintien d’un apport nutritionnel correct, nécessitant parfois un abord parentéral [18, 21]. La prise en charge en fonction du grade de sévérité est résumée dans le tableau 7. Une candidose doit être systématiquement évoquée et traitée rapidement. Le traitement repose sur les antifongiques locaux (miconazole en gel ou comprimé gingival muco-adhésif), par voie orale (fluconazole 50 à 200 mg/j pendant 7 à 14 jours), notamment en cas d’odynophagie associée qui peut faire suspecter une œsophagite, ou systémique dans les formes les plus graves. En présence d’ulcérations aphtoïdes douloureuses, il faut également discuter d’une infection à Herpès, la présence de lésions à type de vésicules sur fond érythémateux étant évocatrice, à traiter par valaciclovir, 4 cp/j pendant 5 jours. L’halitose peut être traitée par IPP, bains de bouche au métronidazole ou antibiothérapie d’épreuve par métronidazole ou amoxicilline (± acide clavulanique) [18].

“ L’éducation du patient est fondamentale dans la prévention de la mucite ”

Les complications hématologiques

Anémie

L’anémie, définie par un taux d’hémoglobine (Hb) inférieur à 12 g/dl chez la femme et 13 g/dl chez l’homme, est très fréquente en oncologie chez les patients traités par CT pour une tumeur solide (89,5 % des 4 426 patients inclus dans une étude américaine) [22]. Une carence martiale est fréquemment associée (dans 42 % des cas dans la série de Ludwig) [23]. L’anémie, mais également la carence martiale isolée, altèrent la qualité de vie des patients et doivent être traitées.

La prise en charge de l’anémie est standardisée et repose sur une démarche en quatre étapes : 1) Qui faut-il transfuser ? 2) Quel bilan doit-on réaliser ? 3) Quelles sont les indications de la supplémentation martiale ? 4) À qui doit-on proposer un traitement par agent stimulant l’érythropoïèse (ASE) ?

  • 1)Qui faut-il transfuser ? Les patients avec un taux d’Hb < 8 g/dl ou avec un taux d’Hb < 10 g/dl en cas de mauvaise tolérance clinique ou de comorbidités cardiaques [24]. En cas de prise en charge palliative exclusive, une transfusion peut être envisagée si le patient est symptomatique, ce qui permet une amélioration transitoire de la dyspnée ou de l’asthénie mais pas de l’état général [25]. Dans tous les cas, une approche personnalisée, avec information préalable et discussion avec le patient (voire sa personne de confiance), est indispensable.
  • 2)Quel bilan doit-on réaliser ? Le bilan doit comprendre au minimum une NFS, un bilan martial (ferritine, coefficient de saturation de la transferrine), dosage des vitamines B12 et B9 [folates]).
  • 3)Quelles sont les indications de la supplémentation martiale ? (tableau 8) À noter qu’il est recommandé de ne pas réaliser successivement une transfusion et un traitement par fer IV le même jour.
  • 4)À qui doit-on proposer un traitement par agent stimulant de l’érythropoïèse (ASE) ? Un traitement par ASE est indiqué chez les patients traités par CT, avec un taux d’Hb < 10 g/dl, après avoir éliminé les autres causes d’anémie, et en association à une recharge en fer en cas de carence martiale absolue ou fonctionnelle (fer des réserves non mobilisable : ferritinémie normale ou élevée mais coefficient de saturation bas). Le taux cible d’Hb est de 12 g/dl, un taux d’Hb > 12 g/dl devant être évité afin de limiter le risque thrombo-embolique. Une surveillance régulière des taux d’Hb est recommandée afin de décider de la poursuite ou de l’arrêt de l’ASE. En cas d’Hb > 12 g/dl, le traitement est interrompu. Après huit semaines de traitement, si l’augmentation de l’Hb est inférieure à 1 g/dl, l’ASE doit être interrompu. Un traitement par ASE peut être poursuivi jusqu’à quatre semaines après l’arrêt de la CT [24, 26, 27]. Il sera stoppé après cette période.

La figure 1 résume la prise en charge de l’anémie d’après les recommandations de l’ESMO.

“ La prescription d’agents stimulants de l’érythropoïèse n’intervient qu’après la correction d’une éventuelle carence martiale (ou en folates, B12, et le traitement d’une autre cause d’anémie) ”

Neutropénie/neutropénie avec fièvre

On distingue deux entités : la neutropénie isolée et la neutropénie avec fièvre (NF) qui associe une fièvre à une neutropénie de grade 4.

En termes de prophylaxie, on distingue la prophylaxie primaire dont le but est de diminuer le risque de neutropénie dès le premier cycle de CT, et la prophylaxie secondaire dont le but est de diminuer le risque de neutropénie après un événement neutropénique. Elles reposent sur :

  • le dépistage du déficit en dihydropyrimidine déhydrogénase (DPD) en cas d’utilisation d’une CT à base de 5-FU et éventuellement du variant allélique UGT1A1*28 qui augmente le risque de neutropénie induite par l’irinotécan ;
  • la diminution de la dose-intensité de la CT ;
  • la prescription de Granulocyte-Colony Stimulating Factor (G-CSF) (tableau 9).

L’utilisation d’un G-CSF en prophylaxie primaire (tableau 9) est recommandée avec les protocoles de CT associés à un risque de neutropénie avec fièvre ≥ 20 % ou compris entre 10 et 20 % lorsqu’ils sont utilisés chez des patients à risque (âge > 65 ans, maladie métastatique, antécédent de neutropénie avec fièvre, état général altéré, dénutrition, anémie, comorbidités rénales, cardiaques et hépatiques). En oncologie digestive, seul le protocole DCF (docétaxel, cisplatine, 5-FU) est associé à un risque de NF supérieur à 20 %, les taux de NF avec les autres schémas usuels de CT étant compris entre 1 et 10 % (y compris pour les plus hématotoxiques : TriCT, VP16-cisplatine, gemcitabine-cisplatine). Cependant, en cas d’utilisation d’une CT avec un risque élevé de neutropénie de grade 3/4 (folfirinox : 30 à 45 %. FLOT : 50 %. trifluridine/tipiracil : 30 à 40 %), chez des patients à risque et/ou lorsqu’un report de cure ou une diminution de la DI de CT ne sont pas souhaitables, on pourra être amené à discuter d’une prophylaxie primaire, hors recommandation [28, 29].

L’utilisation d’un G-CSF en prophylaxie secondaire sera discutée lorsqu’on souhaite privilégier le maintien de la DI du schéma de CT sur sa diminution, après un premier épisode de neutropénie isolée ou avec fièvre. Il n’existe pas de recommandation concernant les indications, notamment en oncologie digestive. Le choix sera donc guidé par le contexte oncologique.

La prise en charge de la neutropénie isolée au décours d’une cure de CT repose sur un report de cure, sans prescription de G-CSF.

“ La prise en charge de la neutropénie isolée au décours d’une cure de chimiothérapie repose sur un report de cure, sans prescription de G-CSF ”

La neutropénie avec fièvre est définie par une fièvre > 38,5 °C pendant plus d’une heure, ou une fièvre > 38 °C pendant plus d’une heure associée à au moins un pic fébrile > 38,5 °C, avec un taux de polynucléaires neutrophiles < 500/mm3 (neutropénie grade 4) ou < 1 000/mm3 avec une chute prévisible < 500/mm3 dans les 48 heures (tableau 1). Une hypothermie dans un contexte de neutropénie est également à prendre compte. C’est une complication fréquente (1 % des patients traités par CT) et grave (10 % de mortalité). Dans 30 % des cas, la fièvre est secondaire à une bactériémie, dans 10 % des cas à un foyer infectieux identifié sur l’imagerie et dans 60 % des cas aucune cause n’est trouvée.

La prise en charge est standardisée et repose sur une démarche en trois étapes :

  • Évaluer la gravité, chercher un foyer infectieux.
  • Initier une antibiothérapie.
  • Évaluer la possibilité d’un traitement ambulatoire.

Après une évaluation soigneuse (tableau 10), une antibiothérapie doit être débutée en urgence, dans l’heure qui suit l’admission du patient. À noter que les G-CSF ne sont pas recommandés en première intention, comme pour la neutropénie isolée, mais ils peuvent être discutés en cas de sepsis sévère ou d’un risque de neutropénie prolongée (> 10 jours). Le score MASCC est une aide pour guider le choix de la voie d’administration (orale ou IV) et du protocole de l’antibiothérapie, à partir d’une évaluation du risque de complications sévères (tableaux 11 et 12).

L’étape suivante consiste à évaluer la possibilité d’un traitement ambulatoire. Chez les patients à bas risque (score MASCC ≥ 21), stables depuis plus de quatre heures, avec un score CISNE < 3, entourés à domicile, joignables et résidant à proximité d’une structure de soins, une prise en charge ambulatoire peut être organisée (tableau 13). Les patients à bas risque ne pouvant être pris en charge en ambulatoire doivent être hospitalisés.

Les critères d’arrêt de l’antibiothérapie sont l’apyrexie depuis plus de 48 heures, un taux de PNN > 500/mm3 et des hémocultures négatives, après avis si possible d’un infectiologue pour les patients hospitalisés.

“ La neutropénie avec fièvre nécessite la prescription d’une antibiothérapie en urgence ”

Thrombopénie

Le plus souvent toxique, d’origine centrale, la thrombopénie est un effet indésirable attendu chez les patients traités par CT. D’autres mécanismes sont cependant possibles et notamment, en oncologie digestive, l’hypertension portale. Cet élément devra être pris en compte dans les adaptations de dose de CT [30].

Chez les patients asymptomatiques, une transfusion est indiquée lorsque la thrombopénie est inférieure à 10 000/mm3 ou inférieure à 20 000/mm3 en cas de sepsis ou de saignement récent. Elle doit être discutée avant tout acte invasif dès lors que le taux est inférieur à 50 000/mm3. En cas de traitement anticoagulant, le seuil transfusionnel est fixé à 50 000/mm3. Chez le patient sous antiagrégant plaquettaire, le traitement peut être interrompu en cas de thrombopénie inférieure à 20 000/mm3 [31].

Chez les patients symptomatiques, présentant un saignement actif (épistaxis > 1 h, hématurie macroscopique, hématémèse...), une transfusion doit être discutée dès lors que le taux de plaquettes est inférieur à 100 000/mm3.

La prophylaxie secondaire est basée sur le report de la CT et/ou la baisse de la DI de la cure suivante. Le « Résumé des caractéristiques du produit » (RCP) de nombreuses molécules de CT donne des recommandations d’adaptation de dose.

Les toxicités cardiaques

Fluoropyrimidines

Les toxicités cardiaques des fluoropyrimidines (5-FU, capécitabine) sont non exceptionnelles. Leur incidence exacte reste mal connue, variant de 0 à 35 % dans les études, en fonction des critères diagnostiques retenus. Dans les séries ayant inclus le plus grand nombre de patients, le taux d’incidence varie de 2 à 4 % [32, 33].

Elles surviennent le plus souvent au cours du premier cycle de CT et sont régressives à l’arrêt du traitement. Les facteurs de risque cardiovasculaires, l’existence d’une cardiopathie ne sont pas des facteurs prédictifs établis de leur survenue. Le caractère dose-dépendant et le surrisque lié à l’utilisation du 5-FU en perfusion continue restent débattus. En revanche, ces toxicités semblent plus fréquentes lorsque le 5-FU est utilisé avec d’autres molécules de CT (cisplatine, acide folinique, bévacizumab, panitumumab).

Cliniquement, elles se manifestent le plus souvent par une douleur thoracique aiguë (80 %), des palpitations, une dyspnée, une hypotension qui peuvent témoigner d’un syndrome coronarien aigu, d’un trouble du rythme, d’une insuffisance cardiaque aiguë [32].

Leur prise en charge est mal codifiée. On peut retenir les éléments suivants [32, 34] :

  • Avant l’initiation du traitement :
    • Recherche d’éléments évocateurs d’une maladie cardiaque à l’interrogatoire et réalisation d’un ECG de référence. Un avis cardiologique sera demandé pour tous les patients symptomatiques, notamment au moindre doute chez les patients porteurs d’une cardiopathie ischémique connue.
    • Information du patient de la potentielle toxicité cardiaque des fluoropyrimidines, de la nécessité en cas de survenue de symptômes à type de douleurs thoraciques, palpitations, de l’arrêt du traitement s’il est en cours et d’une consultation en urgence.
  • En cas de survenue de symptômes évocateurs d’une toxicité cardiaque, notamment à type de douleurs thoraciques, arrêt immédiat de la perfusion de 5-FU si elle est en cours, réalisation d’un ECG et d’un dosage de la troponine. S’il existe des anomalies sur l’ECG (sus ou sous-décalage du segment ST, négativation des ondes T, troubles du rythme) et/ou une élévation de la troponine, une prise en charge sans délai en milieu cardiologique est indispensable. En cas de douleur thoracique isolée, sans modification de l’ECG ni de la troponine, un avis cardiologique est souhaitable avant une nouvelle cure de CT. À la phase aiguë, le traitement associe des vasodilatateurs (dérivés nitrés type trinitrine en sublingual ou inhibiteurs calciques), dont l’efficacité reste controversée, à un traitement anticoagulant et anti-agrégant plaquettaire dès lors qu’il existe des signes électriques et/ou une élévation de la troponine faisant suspecter un syndrome coronaire aigu.
  • Au décours de l’accident aigu, le problème posé est celui de l’imputabilité de la symptomatologie cardiaque au 5-FU ou à la capécitabine et de la possibilité de réintroduire la drogue utilisée, sachant que dans plusieurs études, le risque de récidive est élevé (40 à 80 %) [33]. Une décision au cas par cas sera prise, en concertation avec les cardiologues, en réévaluant soigneusement le bénéfice attendu de la CT et en informant clairement le patient du rapport bénéfice/risque de l’attitude proposée :
    • Chez les patients n’ayant pas présenté de modifications ECG ni d’élévation de la troponine, avec un bilan cardiologique normal, une réintroduction du 5-FU sera le plus souvent proposée, sous couvert d’un traitement vasodilatateur et d’une surveillance cardiologique rapprochée lors de la première réadministration.
    • Chez les patients pour lesquels la réintroduction du 5-FU est contre-indiquée (modifications ECG et/ou élévation de la troponine percritique, données du bilan cardiologique), une CT alternative au 5-FU devra être envisagée. Le raltitrexed – anti-métabolite, inhibiteur de thymidylate synthétase – qui peut être utilisé en association avec l’oxaliplatine et le bévacizumab ou avec l’irinotécan – est une alternative possible au 5-FU [34, 35] dans le traitement du cancer colorectal. Dans deux études, le taux de récidives d’événements cardiovasculaires chez des patients traités par raltitrexed, en raison d’une cardiotoxicité des fluoropyrimidines, était faible (0 et 10 %) [36, 37]. Le trifluridine/tipiracil – un autre antimétabolite, inhibiteur de la thymidine phosphorylase – indiqué dans le traitement du cancer colorectal et du cancer gastrique métastatiques, semble être dépourvu de toxicité cardiaque [38]. Le S-1 (tégafur/giméracil/otéracil) (Teysuno) vient d’obtenir une AMM européenne « en monothérapie ou en association avec l’oxaliplatine ou l’irinotécan, avec ou sans bévacizumab, pour le traitement des patients atteints de cancer colorectal métastatique chez qui il n’est pas possible de poursuivre le traitement avec une autre fluoropyrimidine, en raison d’un syndrome main-pied ou d’une toxicité cardiovasculaire survenus en situation adjuvante ou métastatique » mais cette drogue n’est pas encore disponible en France.

Oxaliplatine

Dans le RCP 2020 de l’oxaliplatine, il est mentionné que «l’intervalle QT doit être étroitement et régulièrement surveillé avant et après administration d’oxaliplatine », ce qui suppose la réalisation d’un ECG avant et après administration de cette drogue. Cette recommandation a été émise suite à la description de trois cas symptomatiques d’allongement du QT associé à des troubles du rythme et de la conduction, chez des patients traités avec une association 5-FU-oxaliplatine [39]. Il s’agit donc d’un effet indésirable très rare de l’oxaliplatine. Ces données invitent cependant à être particulièrement vigilant chez les patients à risque (antécédents ou prédisposition à l’allongement de l’intervalle QT, prise de médicaments connus pour allonger l’intervalle QT), ainsi qu’à dépister et corriger les troubles électrolytiques (hypokaliémie, hypocalcémie ou hypomagnésémie) avant l’administration d’oxaliplatine.

“ Une cardiopathie équilibrée ne contre-indique pas l’utilisation d’une fluoropyrimidine ”

Complications infusionnelles liées à la chimiothérapie

Les complications infusionnelles regroupent toutes les réactions indésirables liées à l’administration d’un traitement et définies comme non prédictibles, non-doses dépendantes, et disparaissant à l’arrêt de ce dernier.

Elles regroupent les réactions d’hypersensibilité liées à un allergène et les réactions d’hypersensibilité non allergiques comme le relargage cytokinique. Elles ne peuvent souvent pas être différenciées [40].

Les réactions d’hypersensibilité allergique sont symptomatiques sous la forme de manifestations cutanéo-muqueuses (urticaire, rash, prurit), digestives (douleurs abdominales, diarrhée aiguë), respiratoires (polypnée, dyspnée) et circulatoires (tachycardie, hypotension). La forme la plus grave est le choc anaphylactique, défini par l’apparition brutale d’une dyspnée ± désaturation, une hypotension ± des troubles de la conscience.

Les réactions liées à une libération de cytokines se manifestent le plus fréquemment par un syndrome pseudo-grippal, survenant le plus souvent dès la première cure, quelques heures à quelques jours après la fin de la cure. C’est un effet secondaire fréquent de la gemcitabine.

Parmi les réactions infusionnelles classiques qu’il faut également connaître, on citera :

  • le laryngospasme qui survient immédiatement pendant la perfusion d’oxaliplatine. Un allongement de la durée de perfusion (plus de 6 h) permet généralement de le contrôler. Les traitements intraveineux n’ont pas d’efficacité sur le laryngospasme, mais un traitement anxiolytique permet de diminuer l’anxiété générée par les symptômes ;
  • le syndrome cholinergique qui survient dans les 24 heures après l’administration d’irinotécan se caractérise par des crampes abdominales, une diarrhée, des vomissements, plus rarement une rhinorrhée ou une hypersudation. La prévention et/ou le traitement repose sur l’administration IV de 0,25 mg d’atropine.

La prise en charge des complications infusionnelles est décrite dans la figure 2.

Dans les formes peu sévères, une fois la symptomatologie résolue, la réintroduction de la perfusion à débit réduit avec une prémédication supplémentaire (corticoïdes et/ou antihistaminiques H1/H2) est généralement possible. En cas de réaction anaphylactique ou de complication infusionnelle de grade ≥ 3, il est conseillé de ne pas réintroduire le traitement. L’incidence des réactions d’hypersensibilité diffère en fonction des drogues de chimiothérapie et une prémédication à base de corticoïdes et d’anti-H1/H2 peut être instaurée avant chaque cure [41]. En cas de récidive malgré la prémédication, on peut, en fonction du type de drogue (taxanes, oxaliplatine), du profil du patient et des impératifs de la prise en charge oncologique, discuter d’un protocole de désensibilisation en centre expert [42, 43].

“ Toute réaction infusionnelle nécessite une prise en charge médicale et paramédicale en urgence ”

TAKE HOME MESSAGES

  • Les complications des chimiothérapies ont un impact potentiellement péjoratif sur le pronostic. Leur prise en charge doit reposer sur les recommandations des sociétés savantes (AFSOS, ESMO, ASCO, MASCC).
  • La prévention des nausées-vomissements chimio-induits est conditionnée par le potentiel émétisant des chimiothérapies et repose sur l’utilisation de corticoïdes, d’antagonistes des récepteurs 5HT3 (sétrons) et de la neurokinine de type 1, ainsi que d’antagoniste de la dopamine.
  • Le traitement de première ligne de la diarrhée chimio-induite repose sur le lopéramide. En cas de forme réfractaire ou grave, une hospitalisation est nécessaire pour éliminer une cause associée (notamment une infection à C. difficile) et mettre en œuvre un traitement renforcé associant hydratation IV et octréotide.
  • La recherche et le traitement éventuel d’une carence martiale doivent être systématiques chez un patient pris en charge pour un cancer et présentant une anémie.
  • La prise en charge de la neutropénie avec fièvre est une urgence dont le traitement repose sur une antibiothérapie adaptée à la gravité du tableau clinique.

Liens d’intérêts

JD déclare des liens d’intérêts suivants en rapport avec l’article : interventions ponctuelles pour les laboratoires Vifor Pharma et Sanofi. MAG déclare n’avoir aucun lien d’intérêt en rapport avec l’article. FS : interventions ponctuelles pour les laboratoires Leo Pharma, MSD, Amgen, Vifor Pharma, Helsinn, BMS, Pfizer, Sanofi, Sandoz, Accord Healtcare, Arrow, Thermofisher, GSK.

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