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Hépato-Gastro & Oncologie Digestive

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à retenir Du no 8 octobre 2018 Volume 25, numéro 9, Novembre 2018

Maladies vasculaires du foie

Pierre-Emmanuel Rautou, Audrey Payancé

  • Le terme maladie vasculaire porto-sinusoïdale regroupe diverses atteintes précédemment nommées d’un point de vue histologique « hyperplasie nodulaire régénérative », « veinopathie portale oblitérante », « sclérose hépatoportale », « fibrose septale incomplète », « fibrose portale non cirrhotique » et d’un point de vue clinique « hypertension portale idiopathique » ou « hypertension portale intrahépatique non cirrhotique ».
  • La maladie vasculaire porto-sinusoïdale est une maladie rare des petits vaisseaux du foie.
  • Les deux modes de découverte principaux de la maladie vasculaire porto-sinusoïdale sont des anomalies inexpliquées des tests hépatiques et une hypertension portale sans cirrhose.
  • La biopsie hépatique est essentielle en cas de suspicion de maladie vasculaire porto-sinusoïdale.
  • Une biopsie hépatique est considérée comme adéquate si elle mesure plus de 20 mm de long après fixation et est peu/pas fragmentée ou bien est considérée adéquate par un anatomopathologiste expert.
  • Les maladies ou états suivants peuvent être associés à une maladie vasculaire porto-sinusoïdale : infection VIH, certains médicaments, maladies génétiques, états prothrombotiques, maladies dysimmunitaires ou de système, maladie hématologique.
  • Chez les malades atteints de cirrhose, la thrombose de la veine porte est le plus souvent asymptomatique.
  • Il n’est pas utile d’effectuer un bilan de thrombophilie en cas de thrombose porte chez les malades atteints de cirrhose.
  • En cas de thrombose porte chez un malade atteint de cirrhose, le scanner permet d’écarter le diagnostic différentiel majeur qu’est l’obstruction tumorale de la veine porte.
  • En cas d’obstruction veineuse porte d’origine tumorale, le traitement anticoagulant n’est pas indiqué.
  • Un traitement anticoagulant doit être envisagé chez les malades atteints de cirrhose avec thrombose de la veine porte lorsqu’ils n’ont pas de contre-indication définitive à une transplantation hépatique ou lorsqu’il existe une atteinte de la veine mésentérique supérieure.

Jéjunite ulcéreuse

Georgia Malamut

  • Le terme de jéjunite ulcéreuse fait référence de façon générale à des ulcérations du grêle proximal.
  • Les causes sont diverses principalement infectieuses, inflammatoires, néoplasiques, ischémiques ou médicamenteuses.
  • La forme typique de jéjunite ulcéreuse doit faire chercher une sprue cœliaque réfractaire maligne de type II, lymphome intraépithélial de bas grade caractérisé par un trou phénotypique.
  • Des études anatomopathologiques spécialisées, phénotypiques et moléculaires peuvent être nécessaires au bilan d’une jéjunite ulcéreuse pour éliminer notamment une lymphoprolifération intestinale.

Régime pauvre en FODMAPs et syndrome de l’intestin irritable

Pauline Jouët

  • Les FODMAPs, « Fermentable Oligo-, Di-, Mono-saccharides And Polyols », sont présents dans de très nombreux aliments.
  • En cas de syndrome de l’intestin irritable, près de la moitié des patients ont déjà suivi un régime diététique.
  • En cas de syndrome de l’intestin irritable, la réintroduction d’un aliment après une période d’exclusion alimentaire peut être associée à un effet nocebo chez quatre patients sur dix.
  • Les FODMAPs, carbohydrates présents dans de nombreux aliments, peuvent agir sur la plupart des mécanismes physiopathologiques impliqués dans le syndrome de l’intestin irritable.
  • La quantité de FODMAPs ingérée en cas de régime « normal », « pauvre » ou « riche » en FODMAPs est très variable.
  • L’efficacité du régime pauvre en FODMAPs a un faible niveau de preuve d’efficacité sur les symptômes de syndrome de l’intestin irritable.
  • Ce régime est complexe et doit être effectué avec l’aide d’une diététicienne.
  • Il n’est pour l’instant pas possible de prédire en pratique courante quels patients vont répondre au régime pauvre en FODMAPs.
  • En cas d’amélioration, la réintroduction des FODMAPs est possible en moindre quantité avec une tolérance symptomatique correcte.
  • En cas de régime pauvre en FODMAPs, il n’y a pas de bénéfice supplémentaire à supprimer le gluten.
  • Le régime pauvre en FODMAPs peut entraîner une perte de poids et une dysbiose.

Mastocytose – manifestations digestives

Harry Sokol

  • Les mastocytoses systémiques sont des maladies chroniques de l’adulte où les mastocytes s’accumulent également dans d’autres organes (moelle, foie, rate, tube digestif, os…).
  • La plupart des manifestations liées à la dégranulation mastocytaire sont paroxystiques, survenant spontanément ou déclenchées par divers facteurs ou stimuli.
  • Les manifestations liées à l’infiltration tumorale comportent des symptômes cutanés, une infiltration médullaire, un syndrome tumoral avec hépatosplénomégalie, des manifestations digestives (gastro-intestinales, hépatobiliaires) et de rares atteintes cardiopulmonaires.
  • Les symptômes gastro-intestinaux chez les patients atteints de mastocytose systémique sont chroniques et sont une source majeure d’altération de la qualité de vie.
  • La douleur abdominale est le symptôme le plus fréquent touchant approximativement un patient sur deux. La diarrhée est le second symptôme le plus fréquent (de l’ordre de 40 %), puis viennent les nausées et vomissements (30 %).
  • Le diagnostic de MS avec atteinte gastro-intestinale devrait être évoqué devant un tableau de trouble fonctionnel intestinal sévère.
  • Devant une suspicion de mastocytose systémique chez un patient avec tableau de trouble fonctionnel intestinal sévère, un dosage de la tryptase sérique et immuno-histochimie sur les biopsies gastro-intestinales peut être réalisé pour étayer le diagnostic.
  • Les symptômes gastro-intestinaux sont aussi fréquents que le prurit chez les patients atteints de mastocytose systémique.
  • La pathogénie de la symptomatologie gastro-intestinale au cours de la mastocytose systémique est attribuée à une infiltration mastocytaire du tube digestif ou à la libération de médiateurs mastocytaires.
  • Il faut savoir évoquer le diagnostic de mastocytose systémique devant une forme atypique de syndrome de Zollinger-Ellison, de syndrome carcinoïde ou de VIPome.
  • Le traitement comporte deux grands axes : prévenir et limiter la dégranulation et/ou ses conséquences ; contrôler la prolifération tumorale mastocytaire.

Hypersensibilité au gluten non cœliaque

Shérine Khater, Christophe Cellier

  • L’hypersensibilité au gluten non cœliaque est caractérisée par la survenue de symptômes digestifs et extra-digestifs déclenchés par l’ingestion de gluten, en l’absence d’anticorps spécifiques de la maladie cœliaque et d’atrophie villositaire.
  • Certaines protéines du blé (les inhibiteurs de l’alpha-amylase et la trypsine) et les FODMAPs pourraient être des potentiels déclencheurs impliqués dans l’hypersensibilité au gluten.
  • Il n’existe aucun marqueur biologique ou histologique spécifique pour ce syndrome. Le diagnostic est essentiellement un diagnostic d’exclusion.
  • Le rôle exclusif du gluten dans la physiopathologie de ce syndrome reste à démontrer, et certains le considèrent comme une hypersensibilité au FODMAPs.
  • Le respect du régime sans gluten reste débattu dans l’hypersensibilité au gluten.
  • Aucune complication évolutive liée à la consommation du gluten n’a été décrite chez ces patients.

Colites à éosinophiles de l’adulte

Gilles Macaigne

  • La colite à éosinophiles peut être primitive, sans cause connue de l’infiltrat éosinophilique, ou secondaire à une cause identifiée.
  • Dans la muqueuse colique normale, il est noté un gradient décroissant du taux de polynucléaires neutrophiles du colon droit vers le côlon gauche. Il n’y a actuellement aucun consensus concernant les normes des taux physiologiques de polynucléaires neutrophiles dans la muqueuse colique.
  • Les colites à éosinophiles primitives sont liées dans la majorité des cas à une réaction allergique alors que les colites à éosinophiles secondaires peuvent résulter soit d’un désordre éosinophilique (syndrome hyperéosinophilique), soit de maladies non liées à un désordre éosinophilique.
  • La symptomatologie est variable et non spécifique, souvent intermittente et entrecoupée de périodes de rémission.
  • Un contexte allergique personnel ou familial est noté chez 30 % à 75 % des adultes ayant une colite à éosinophiles.
  • Les examens biologiques sont d’intérêt limité en raison de leur faible sensibilité et spécificité.
  • Le diagnostic de colite à éosinophiles est rendu difficile par l’absence de consensus concernant sa définition histologique.
  • L’atteinte est hétérogène dans plus de 40 % des cas.
  • Un taux de polynucléaires neutrophiles supérieur à 40 par champ à fort grossissement dans au moins deux segments coliques différents pourrait être retenu pour le diagnostic histologique de colite à éosinophiles.
  • Le diagnostic de colite à éosinophiles primitive est un diagnostic d’élimination et impose d’éliminer les autres causes d’hyperéosinophilie colique.
  • Chez les patients symptomatiques avec colite à éosinophiles primitive, un régime d’exclusion peut être tenté, les allergènes les plus fréquemment impliqués étant le lait, le blé, le soja, les œufs, les crustacés et poissons, les noisettes.
  • La corticothérapie classique et le budésonide semblent être des options thérapeutiques efficaces permettant l’obtention de rémission prolongée.

Allergie alimentaire : quand y penser, comment la prouver ?

Habib Chabane

  • Les allergies alimentaires font intervenir des mécanismes IgE et non IgE-dépendants.
  • La prévalence des allergies alimentaires est d’environ 2 à 3 % de la population générale en Europe et jusqu’à 7 à 8 % dans la population pédiatrique.
  • Les démangeaisons bucco-pharyngées du syndrome d’allergie orale traduisent dans la majorité des cas une allergie de contact par réaction croisée pollens-aliments.
  • L’œsophagite à éosinophiles doit être évoquée devant une dysphagie récidivante ou une impaction alimentaire chez le grand enfant et l’adulte jeune.
  • La gastro-entérite à éosinophiles sera évoquée devant des vomissements et diarrhée avec altération de l’état général associée à une hyperéosinophilie sanguine modérée.
  • Des vomissements précoces inexpliqués, survenant chez un patient ayant un terrain atopique, doivent faire suspecter une allergie alimentaire.
  • Chez l’enfant, un reflux gastro-œsophagien persistant, non ou partiellement contrôlé par le traitement, doit inciter à chercher une allergie alimentaire.
  • Certaines allergies alimentaires survenant dans la petite enfance guérissent spontanément avec l’âge par acquisition de tolérance à l’aliment (exemples : lait de vache, œuf de poule, blé). Les autres allergies alimentaires, en particulier celles de survenue tardive, sont le plus souvent persistantes.
  • Une diarrhée chronique associée à un retard staturo-pondéral chez le nourrisson doit faire chercher une entéropathie allergique.
  • En l’absence d’autre cause, une constipation peut être liée à une allergie alimentaire dont il convient de faire la preuve.
  • Devant des épisodes récurrents de vomissements répétés parfois accompagnés de diarrhée et de fatigue intense, sans signe cutané, un syndrome d’entérocolite aux protéines alimentaires doit être évoqué.
  • La recherche non ciblée d’IgE anti-aliments, n’est pas une bonne stratégie diagnostique, car elle risque d’aboutir à des évictions non justifiées.
  • La présence d’IgE spécifiques sériques confirme la sensibilisation directe à l’aliment ou par réaction croisée, mais pas forcément le diagnostic d’allergie.
  • Le prick test à l’aliment est à privilégier en première intention, car plus facile à réaliser, peu coûteux et il donne des résultats immédiats.
  • Il n’y a pas d’indication à doser les IgG anti-aliments pour le diagnostic d’allergie (de type III) ou d’intolérance alimentaire.
  • L’objectif du bilan allergologique incluant les tests cutanés, les dosages d’IgE spécifiques et si besoin un test de provocation orale à visée diagnostique est de différencier la sensibilisation à un aliment (tests cutanés et/ou IgE spécifiques positifs) sans pertinence clinique, d’une vraie allergie.

Lésions ano-périnéales

Agnès Senéjoux

  • L’IRM est incontournable pour le cas particulier des suppurations ano-périnéales.
  • Un abcès anal nécessite un drainage chirurgical en urgence et ne peut en aucun cas être traité de façon purement médicale.
  • Les anti-TNF et en particulier l’infliximab sont des médicaments recommandés dans la prise en charge des suppurations anales de la maladie de Crohn drainée. Le bénéfice clinique concerne deux tiers des malades mais la rémission profonde radiologique est plus rare. Il paraît nécessaire d’optimiser la posologie, de maintenir le traitement longtemps et d’associer des thiopurines.
  • Les stratégies de traitement d’entretien et de désescalade de même que les autres biothérapies ne sont pas bien évaluées.
  • La fistulotomie doit être proscrite pour les fistules de la maladie de Crohn. Le drainage par séton est l’étape préalable à tout traitement conservateur d’obturation. Les stratégies d’épargne sphinctériennes concernant sont décevantes : l’injection de cellules souches allogéniques parait aujourd’hui être la méthode la plus prometteuse.

Maladies inflammatoires chroniques intestinales et cancer

Laurent Beaugerie

  • La prévention des cancers au cours des MICI ne se limite pas à la prévention des cancers minoritaires liés aux MICI ou à leur traitement.
  • L’utilisation prolongée des thiopurines est discutable si elle peut être évitée chez les hommes de plus de 60 ans, et chez les patients séronégatifs pour Epstein-Barr Virus.
  • Protection solaire et suivi dermatologique sont indiquées dès le diagnostic de MICI, quel que soit le traitement.
  • Toutes les femmes vivant avec une MICI ont intérêt à se prêter scrupuleusement au dépistage organisé du cancer du sein et à la surveillance gynécologique du col utérin.
  • Le lymphome est le principal risque de cancer attribuable aux thiopurines et/ou agents anti-Tumor Necrosis Factor (TNF). Le sur-risque absolu est modéré, sauf chez les hommes de plus de 60 ans, et, pour les thiopurines, chez les patients séronégatifs pour le virus d’Epstein-Barr.
  • Les patients qui n’ont ni colite ni antécédent familial au premier degré de cancer colorectal sont à risque moyen de cancer colorectal, mais doivent être surveillés par coloscopies itératives à partir de 50 ans.
  • La possibilité d’une cancérisation des lésions inflammatoires doit maintenant être prise en compte dans les décisions thérapeutiques de fond d’une iléite ancienne.
  • Les cancers ano-rectaux sont fréquents en cas de lésions ano-périnales chroniques de maladie de Crohn et justifient une surveillance proctologique.
  • Après un cancer, il est prudent de respecter une pause de deux à cinq ans avant de reprendre un traitement immunosuppresseur, sauf en cas de MICI sévère non contrôlée.
  • L’effet chimiopréventif de la prise régulière de dérivés 5-aminosalicylés sur le risque de néoplasie colorectale dans la rectocolite hémorragique est à peu près établi.

Maladies inflammatoires chroniques intestinales, fertilité et sexualité

Romain Leenhardt, Pauline Rivière, Isabelle Nion-Larmurier, Patrick Papazian, David Laharie, Philippe Marteau

  • Santé sexuelle et image corporelle influencent le fonctionnement psychosocial et la qualité de vie.
  • Les symptômes anxio-dépressifs occupent une place primordiale en lien avec l’altération de la sexualité.
  • Les patients souffrant de MICI ressentent souvent une altération de leur image corporelle.
  • Les traitements des MICI n’ont pas d’impact direct sur la fonction sexuelle.
  • Rapports anaux réceptifs : prévention des infections sexuellement transmissibles et dépistage.
  • Le couple en situation d’infertilité doit être rassuré et adressé au gynécologue.
  • Écouter et éduquer pour rassurer et corriger les idées reçues erronées.
  • La fécondité au cours des MICI est dans la majorité des cas identique à celle de la population générale.
  • L’objectif au cours d’une grossesse est l’obtention et le maintien de la rémission de la MICI. Pratiquement tous les traitements sont possibles sauf le méthotrexate et la thalidomide.

Maladies inflammatoires chroniques de l’intestin et vacances

Stéphane Nahon

  • Les vacances font parties des objectifs thérapeutiques chez les patients MICI mais nécessitent d’être préparées.
  • Plusieurs fiches destinées aux patients ont été rédigées par l’association François Aupetit en collaboration avec des médecins experts.
  • La protection des cicatrices récentes nécessite une attention particulière.
  • La plage et la baignade ne sont pas contre-indiquées chez les patients stomisés.
  • Une intervention chirurgicale récente ou des lésions ano-périnéales inactives ne représentent pas un obstacle à une exposition solaire ou à une baignade.
  • Un risque plus important de mélanome ou de cancers cutanés non mélaniques (carcinome épidermoïde ou carcinome basocellulaire) existe y compris chez les patients ne prenant aucun traitement immunosuppresseur.
  • Le risque de cancers cutanés chez les patients traités par immunosuppresseurs et/ou biothérapies au long cours justifie une prévention et une surveillance dermatologique régulière.
  • Certaines vaccinations sont recommandées chez les patients immunodéprimés tels que la vaccination contre le pneumocoque et le virus de l’hépatite B, et le virus de la grippe.
  • Si un patient est amené à réaliser fréquemment des déplacements en zone d’endémicité de la fièvre jaune, la vaccination devra être réalisée si possible avant la mise en route du traitement immunosuppresseur ou par biothérapie.
  • Certaines vaccinations sont obligatoires pour rentrer dans certains pays dont la fièvre jaune.
  • Ce vaccin est contre-indiqué chez les patients immunodéprimés ce qui limitera chez ces malades l’accès à ces pays sauf si une anticipation de la vaccination a été faite avant la mise en route d’un traitement immunosuppresseur ou une biothérapie.
  • Lors d’un voyage en dehors de l’Union européenne et Suisse, seuls les soins médicaux urgents et imprévus pourront éventuellement être pris en charge par la caisse d’Assurance-Maladie.

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