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Hématologie

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Traitement par alisertib des lymphomes T périphériques en rechute ou réfractaires : des résultats décevants Volume 25, numéro 3, Mai-Juin 2019

Illustrations


  • Figure 1

Les lymphomes T périphériques en rechute ou réfractaires (R/R) ont un pronostic particulièrement défavorable, avec une survie sans progression (SSP) et une survie globale (SG) de 3,1 et 5,5 mois, respectivement, lors de la rechute [1]. Le pralatrexate, un antimétabolite, la gemcitabine, un antifolique, et la romidepsine, un inhibiteur des histones déacétylases, font partie des options thérapeutiques à partir de la deuxième ligne, avec un taux de réponse globale (RG) de l’ordre de 30 % et une SSP très courte [2, 3]. L’alisertib, un inhibiteur de la kinase Aurora A – nécessaire à la mitose et surexprimée dans les lymphomes T périphériques – a une activité antitumorale dans les lymphomes B et T en rechute ou réfractaires, avec un taux de RG d’environ 30 % dans les essais de phase II [4]. Dernièrement, dans le Journal of Clinical Oncology, ont été publiés les résultats de l’essai de phase III Lumiere, comparant, dans les lymphomes T périphériques en R/R après au moins une ligne thérapeutique antérieure, l’alisertib à un traitement au choix (pralatrexate, romidepsine ou gemcitabine) [5].

L’essai Lumiere était une étude de phase III multicentrique, internationale et ouverte. Le critère principal de jugement était l’amélioration du taux de RG et/ou de la SSP, évalué par un comité indépendant. Les schémas d’administration étaient les suivants :

  • alisertib 50 mg × 2/j par voie orale de J1 à J7, cycles de vingt et un jours,
  • gemcitabine 1 000 mg/m2 par voie IV à J1, J8 et J15, cycles de vingt-huit jours,
  • pralatrexate 30 mg/m: une injection par semaine pendant six semaines, cycles de sept semaines,
  • romidepsine (États-Unis seulement) : 14 mg/m2 voie IV à J1, J8 et J15, cycles de vingt-huit jours.

La réponse était évaluée toutes les huit semaines jusqu’à dix mois, puis toutes les douze semaines, par scanner et TEP-scanner selon les critères de Cheson 2007. L’étude a dû être précocement arrêtée en raison de l’absence de supériorité de l’alisertib sur le bras comparateur en termes de SSP dans l’analyse intermédiaire.

Entre le 31 mai 2012 et le 20 octobre 2014, 271 patients ont été inclus dans l’étude, 138 dans le bras alisertib, 133 dans le bras comparateur (gemcitabine n = 30, pralatrexate n = 80, romidepsine n = 23). Les patients avaient un âge médian de 63 ans (19-86), avaient reçu une médiane de deux lignes de traitements antérieurs (rang 1-11), avaient le plus souvent un lymphome T périphérique sans autre spécification (PTCL-NOS) ou un lymphome angio-immunoblastique (AITL), et avaient un score IPI (pour international prognostic index) le plus souvent égal à 2 ou 3. Le taux de RG était de 33 % dans le bras alisertib, contre 45 % dans le bras comparateur (odds ratio : 0,60, IC95% : 0,33-1,08). Les taux de réponses complètes (RC) étaient de 18 et 27 %, respectivement. La SSP médiane était de 115 jours dans le bras alisertib et de 104 jours dans le bras comparateur (hazard ratio [HR] : 0,87 ; IC95% : 0,644-1,162) (figure 1). La SG médiane était de quatorze mois contre 12,1 mois, respectivement (différence non significative). L’essai n’était pas conçu pour comparer les différents bras comparateurs entre eux. Il n’y avait pas de différence significative d’efficacité entre les différents types histologiques de PTCL. Quinze patients seulement étaient encore sous traitement à la fin du recueil de données (neuf sous alisertib, six sous pralatrexate). Le principal motif d’arrêt des traitements était la progression de la maladie ou une réponse insuffisante, sans différence significative entre les deux bras. Il n’y avait pas de différence significative en termes de tolérance, avec une toxicité essentiellement hématologique dans les deux bras.

 

Ainsi, l’alisertib n’a pas montré de preuve de supériorité significative dans les lymphomes T périphériques R/R par rapport à un bras comparateur mixte. Une association de l’alisertib avec des chimiothérapies conventionnelles ou d’autres thérapies ciblées serait une piste à explorer.

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