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Hématologie

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Lymphome B de haut grade : peut-on réduire la toxicité pour les patients de pronostic favorable ? Volume 26, numéro 1, Janvier-Février 2020

L’association rituximab-cyclophosphamide, doxorubicine, vincristine et prednisone (R-CHOP) reste le traitement standard des lymphomes malins non hodgkiniens (LNH) B de haut grade [1]. Les patients de moins de 60 ans ayant un score IPIaa (pour age adjusted international prognostic index) favorable et n’ayant pas de forte masse tumorale (plus grand diamètre < 7,5 cm), ont un pronostic très favorable avec 95 % de survie sans progression (SSP) et 98 % de survie globale (SG) [2]. Au vu des toxicités des traitements d’immunochimiothérapie et du pronostic favorable de ces patients, la question d’une possibilité d’allégement des traitements, et donc ainsi des effets secondaires, se pose chez ces patients. L’objectif de l’essai FLYER était de démontrer la non-infériorité d’un traitement par quatre cycles de R-CHOP suivis de deux injections de rituximab par rapport au traitement standard (6 R-CHOP) chez les patients jeunes au pronostic favorable [3].

Cette étude de phase III randomisée, menée sur 138 centres (Danemark, Israël, Italie, Norvège et Allemagne), incluait les patients de 18 à 60 ans avec un LNH de haut grade CD20+ nouvellement diagnostiqué et de bon pronostic (sans facteur de risque de l’IPIaa, ni forte masse). Les patients présentant une atteinte neuroméningée étaient exclus. La randomisation entre les deux bras de traitement (6R-CHOP ou 4R-CHOP + 2R) était réalisée après stratification sur le centre et le stade Ann Arbor. Les cycles de R-CHOP étaient réalisés tous les 21 jours avec une administration concomitante de rituximab à 375 mg/m2 intraveineux (IV) à J1 et de CHOP : cyclophosphamide (750 mg/m2), doxorubicine (50 mg/m2), vincristine (1,4 mg/m2, maximum 2 mg dose totale), IV à J1 avec une corticothérapie orale par prednisone ou prednisolone (100 mg) de J1 à J5. Dans le bras 4 cycles de R-CHOP, les patients recevaient le cinquième et sixième cycle de rituximab en monothérapie (cycles de 21 jours). Une radiothérapie n’était prévue qu’en cas d’atteinte testiculaire pour irradiation du testicule controlatéral. Le critère d’évaluation principal était la SSP à 3 ans, en supposant un taux de réponse à 93 % dans le groupe 6 R-CHOP et pas de différence entre les groupes avec une marge de non-infériorité fixée à -5.5 %

Entre décembre 2005 et octobre 2016, 592 patients ont été inclus : 295 dans le bras 6R-CHOP et 297 dans le bras 4R-CHOP + 2R. Les deux groupes étaient comparables en dehors d’un nombre un peu plus important de patients présentant des signes généraux dans le groupe expérimental (9 versus 3 % [p = 0,002]). L’âge médian était de 47 mois (19-60) dans le bras standard et 49 mois (17-60) dans le bras expérimental. Avec un suivi médian de 66 mois, la SSP à trois ans était de 96 % (IC95% : 94-99 %) dans le groupe 4R-CHOP+2R versus 94 % (IC95% : 91-97 %) dans le groupe 6R-CHOP soit une différence absolue de 3 % démontrant la non-infériorité (marge de non-infériorité prédéfinie de -5,5 %). Dans les deux groupes, le taux de réponse était élevé avec un taux de rémission complète de 91 % dans le bras 4R-CHOP+2R versus 92 % dans le bras standard. En termes de toxicité, on retrouve légèrement moins de leucopénies de grade 3-4 dans le groupe expérimental (80 versus 110 événements). Par contre, le nombre d’effets secondaires non hématologiques, en particulier cardiologiques et seconds cancers, semble comparable dans les deux groupes.

L’essai FLYER semble montrer que chez les patients jeunes avec un LMNH B de haut grade de pronostic favorable, un traitement par quatre R-CHOP puis deux rituximab n’est pas inférieur au traitement standard par 6 R-CHOP. Cependant, il est dommage que l’étude se soit limitée aux patients de moins de 60 ans pour un lymphome dont l’âge médian au diagnostic est de 60 ans. De plus il aurait également été intéressant que soient pris en compte les critères de mauvais pronostics tels que les anomalies moléculaires comme les caractères double ou triple-hit.

Une réduction du nombre de R-CHOP semble donc dédiée à une population très précise, au vu des résultats de cet essai. Cette amélioration de l’efficacité pour tous les patients tout en réduisant la toxicité sera probablement liée à l’utilisation de nouvelles thérapies ciblées.

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