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Bulletin du Cancer

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Immunociblage des tumeurs : situation et perspectives en 2000 Volume 87, numéro 11, Novembre 2000

Auteurs
JE2176 Université Montpellier I, coordinateur du groupe de travail, Immunociblage des tumeurs et ingénierie des anticorps, centre de recherche en cancérologie, CRLC Val-d'Aurelle-Paul-Lamarque, 34298 Montpellier Cedex 5.

Après plus de 15 années de travaux expérimentaux, l'immunociblage des tumeurs par des anticorps monoclonaux dirigés contre des marqueurs tumoraux connaît actuellement un développement clinique important. Cette progression est due pour beaucoup aux résultats thérapeutiques encourageants obtenus par l'injection d'anticorps recombinants en grande partie humanisés, tels que le rituximab, anti-CD20, dans les lymphomes B folliculaires et l'herceptine, anti-ErbB2, dans les carcinomes du sein. Grâce à l'ingénierie génétique, il est en effet possible de greffer les régions variables ou hypervariables des anticorps murins sur des molécules d'IgG humaines, ou même d'obtenir des anticorps entièrement humains, soit chez des souris transgéniques pour une grande partie du répertoire des IgG humaines, soit par sélection de domaines variables humains exprimés sur des phages. Le marquage des anticorps antitumeurs par des radio-isotopes a joué un rôle important dans la démonstration de la spécificité de l'immunociblage tumoral et reste intéressant pour le diagnostic par immunoscintigraphie, ainsi que pour la radio-immunothérapie de certains cancers. Dans cette revue, nous décrirons les progrès réalisés et les perspectives d'utilisations diagnostiques et thérapeutiques des anticorps antitumeurs et de leurs fragments. Au niveau diagnostique, l'immunoscintigraphie par les fragments Fab marqués à l'iode 123 ou au technétium 99m a fourni des images tumorales très élégantes depuis plusieurs années, mais l'influence de cette technique sur la conduite du traitement reste limitée. L'immuno-TEP (tomographie par émission de positons) pourrait améliorer la sensibilité et la précision de cette méthode. La chirurgie radio-immunoguidée et l'immunophotodétection restent des méthodes prometteuses encore à l'étude. Au niveau thérapeutique, les anticorps anti-CD20 marqués à l'iode 131 ont donné des résultats spectaculaires dans les lymphomes B non hodgkiniens de différents degrés de malignité. Pour les tumeurs solides, moins radiosensibles, les chances d'efficacité de la radio-immunothérapie passent par l'attaque plus précoce de tumeurs de très petite taille, par l'utilisation de stratégies de ciblage en plusieurs étapes et par l'utilisation de radio-isotopes émetteurs de particules alpha. D'autres utilisations d'anticorps sont décrites comme celles des anticorps bispécifiques antitumeurs et anticellules effectrices du système immunitaire, ou la synthèse de fragments d'anticorps exprimés sur les récepteurs de lymphocytes T appelés T bodies, ou encore l'étude biologique des intrabodies. Les résultats publiés et les nombreuses études en cours montrent que l'immunociblage des tumeurs prendra une place toujours plus importante dans le traitement des maladies cancéreuses.