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Médecine thérapeutique

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Sécurité en anesthésie Volume 5, numéro 4, Avril 1999

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Au cours des 40 dernières années, la sécurité anesthésique a été renforcée au prix d’énormes efforts allant de la création d’une discipline spécifique de médecins et d’infirmiers anesthésistes à l’élaboration d’équipements électroniques de surveillance, en passant par la mise en place de structures spécifiques pour le réveil postanesthésique ainsi que par l’établissement, par les sociétés savantes, de protocoles de prise en charge thérapeutique. Si ces mesures ont à l’évidence amélioré la sécurité anesthésique, les indications des actes chirurgicaux ou exploratoires réalisés sous anesthésie se sont parallèlement étendues à des patients plus âgés et plus fragiles qu’auparavant [1], rendant plus difficile la lisibilité de l’amélioration de la sécurité anesthésique. Pour les années à venir, les efforts à accomplir en matière de sécurité anesthésique vont devoir s’orienter différemment, l’essentiel des accidents persistants ne pouvant être prévenu par les seuls moyens instrumentaux ou structurels puisque ces accidents découlent d’erreurs humaines directes ou induites dans lesquelles les acteurs sont plus souvent victimes que coupables. Il s’agit là d’un tournant important quant aux nouvelles stratégies à mettre en place en matière de sécurité, impliquant d’importants changements dans la gestion et l’organisation des soins. Avant de détailler les aspects propres à la sécurité anesthésique, il peut être utile de rappeler les définitions des termes employés en matière de sécurité, plus généralement rencontrés dans le domaine de la science des dangers, ou cindynique, et qui ont jusqu’à présent peu pénétré le monde médical. Toutes les actions entreprises depuis les débuts de l’anesthésie ont tenté d’accentuer les conditions de sécurité et de réduire le risque anesthésique. En dépit de l’importante augmentation du nombre d’anesthésies et de l’extension des indications chirurgicales à des patients plus âgés et plus gravement atteints qu’auparavant, la mise en place des moyens actuels de prise en charge thérapeutique et de surveillance de l’anesthésie a permis de réduire l’incidence des accidents. Actuellement, l’anesthésie est engagée dans une période de mutation importante car les améliorations en matière de sécurité nécessitent que soient reconnues les erreurs humaines, première cause des accidents, parmi lesquelles les plus fréquentes sont des erreurs-système. Ce constat met mal à l’aise une partie du monde médical, qui voit s’effondrer ses principes éducatifs classiques. Le simple constat que des erreurs sont constamment commises lors de la décision et de l’exécution des soins se heurte violemment au concept traditionnel de l’éducation médicale qui prône la médecine sans erreurs et insiste sur la notion de perfection d’une pratique où les erreurs sont inacceptables [29]. Certains réagiront en niant de telles analyses, préférant d’une certaine façon « tuer le messager » plutôt que prendre acte du constat et mettre en place, courageusement, les mesures de prévention de survenue des accidents et de réduction de la gravité des accidents qui surviennent.