JLE

Médecine thérapeutique

MENU

La réémergence du choléra Volume 4, numéro 3, Mars 1998

Auteur

Le choléra est une maladie infectieuse diarrhéique très contagieuse et strictement humaine. Elle est due à Vibrio cholerae, un bacille à Gram négatif transmis par voie orale, présent à l’état saprophyte dans l’eau des estuaires et parasite du zooplancton [1]. Le choléra est une des maladies de la misère, de la malnutrition et de la surpopulation qui entraînent une forte mortalité. On retrouve sa trace dans des textes sanscrits datant de 2 500 ans. La maladie semble rester confinée au sous-continent indien jusqu’au XIXe siècle. La première description historique par un Européen a été faite en 1503 par un officier de Vasco de Gama, qui décrivit une épidémie de diarrhées cataclysmiques rapidement mortelles (en 8 heures) et ayant provoqué 20 000 morts à Calicut. A partir de 1817, avec l’essor de la marine à vapeur, le choléra s’est répandu à travers le monde au cours de sept vagues pandémiques (figure 1 ). Avant la découverte de la bactérie responsable, Snow (1854) reconnut le rôle important de l’eau dans la transmission de la maladie. C’est au cours de la cinquième pandémie que Koch isola et caractérisa pour la première fois l’agent responsable du choléra, le vibrion cholérique (V. cholerae), bacille incurvé en virgule déjà observé au microscope dans les selles de cholériques dès 1854 par Pacini.Il fait peu de doute que l’émergence du choléra soit favorisée par l’activité humaine. Les épidémies font souvent suite à des rassemblements humains (fêtes, enterrements...) qui permettent une rapide diffusion des bactéries par contact direct interhumain. Le degré d’immunité de la population est aussi capital dans l’émergence de ces épidémies. Ceci est attesté par le fait que, en zone d’endémie, les enfants paient un lourd tribu à la maladie, alors que les adultes sont relativement épargnés du fait de contaminations itératives qui leur confèrent une immunité parfois abrogée par la malnutrition. Enfin, il existe des différences importantes de sensibilité au choléra entre les populations exposées à V. cholerae. Ainsi, près de 90 % des sujets infectés restent asymptomatiques et éliminent les bactéries pendant quelques jours dans leurs selles. Seulement 10 % d’entre eux auront une diarrhée, dont environ 1 % présenteront un choléra sévère. L’histoire du choléra illustre la dynamique d’adaptation d’un agent pathogène à son hôte en fonction de l’environnement, de la résistance naturelle et du comportement des populations qu’il infecte.